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PREl'tlIERE

ABDICATION.

AVRIL

i814.

?Hi9

suadé son ancicn maitrc. - Vous verrez qu'il ne

revicndra pas, avait dit Napoléon, tristement

mais saus amertume . -

Durant cet intervalle ,

M.

de CaulaincourL avait

enfin trouvé le temps d'expédier les ralifications

<lu traité du

1

·l avril, et de les rcrncttre au comtc

Orloff, revetues de la signaturc impériale. 11

était retourné aupres de Napoléon, qui venait

de recernir de l\farie-Louisc une leltre extreme–

ment aífectucusc. Celte lett1·e lui donnait les

nouvclles les plus satisfaisantes de son fils,

1

ui

téruoignait le dévouemcnt le plus complet, et

cxprimait la résolution de le rejoindre aussi

promptement que possible. Elle produinit sur

Napoléon un efiet extraordinaire. Elle le rappela

en quelque sorte

l1

Ja vie. C'étai t comme si une

nouvelle cxistence se fUt offcrle

a

sa puissante

imagination. - La Providence l'a voulu, dit-il

a

1'1.

de Caulaincourt, je vi vrai. .. Qui pcut sonder

!'avenir ? D'ailleurs ma fcmme, mon fils me suffi·

sent. Je les vcrrai, je !'espere, je les veJTai sou–

vent; quand on sera

convai~cu

que je ne songe

plus

a

sortir de ma retrailc, on me permeltra de

les recevoir, pcut-etrc de les allcr visilcr, et puis

j'écrirai l'histoire de ce que nous avons fait ...

Caulaincourt, s'écria-t-il, j'immorlaliscrai vos

noms

!••.

Puis il ajouta : Il y a encore

H1

des rai–

sons de vivrc

!.. . -

Alors se raltachant avec une

prodigieu e mobilit é

a

cette nouvelle cxislcnce

dont

il

venait de se tracer l'image, il s'occupa

des détails de son établissement

a

l'ile d'Elbe, et

voulut que M. de Caulaincourt alla t lui-memc,

soit auprcs de Maric-Louise, soit aupres des sou–

verains, pour r égler la maniere dont sa femme

le r ejoindrait. 11 n'avait songé

a

se réserver

aucun argent; tout le trésor de l'arméc avait été

épuisé pour la solde. 11 rcstait quclqucs millions

a

~Iarie-Louisc.

Son intcntion était de les lui

laisser, afin qu'ellc n'eut de scrvicc

a

réclamer

de personne, et surtout pas de son perc. Seulc–

ment d'apres la néccssité démontrée de recourir

a

cette unique rcssource,

il

consentit

a

ce qu'on

partageat avcc clic.

11

chargea l\L de Cuulain–

court d'aller Ja voir, et de lui conseiller de nou–

vcau de demander ·une cntrcvue

a

l'empereur

Fran~ois

qui, touché peut-etre par sa présencc,

lui accorderait

la

Toscanc. "Elle dévait ensuite

venir le trouver par Orléans sur la routc du

Bourbonnais . Toutefois

il

recommanda itérati–

vemcnt

a

1\L de Caulaincourt de ne p:is presser

l\farie-Louise de Je rejoindrc, de laisser

a

cet

égard ses résolutions naitrc de son creur, car,

dit-il plusicurs

fo

is, je connais les

f

emmes.ct

sur-

tout la micnne ! Au lieu de la cour de France,

telle que je l'avais faite, luí offrir une prison,

c'cst une bien grande épreuvc ! Si clic nú1ppor–

tait un visagc triste ou enuuyé,j 'en serais désolé.

J'aime micux la solitude que le speclaclé de Ja

tristcssc ou de l'cnnui . Si son inspiration la porte

vcrs moi, je la rcccvrai

a

bras ouverts ; sinon,

qu'cllc reste

a

Parme ou

a

Florencc,

la

ou elle

régncx-a enfin. Je ne lui dcmanderai que mon

fils. - Apres l cxpre.>sion de ces scrupulcs, Na–

poléon s'occupa des détails de son voyage. On

était convenu de le faire accompagncr

a

l'ile

d'Elbc par des commissaircs <les puissances, et

il parut tenir surlout

a

la présence du comrnis–

sairc anglais. - Les Anglais, dit-il, sont un

pcuple libre, et ils se respectcnt. - Tous ces

détails réglés,

il

se sépara de

1\1.

de Caulaincourt,

en lui renouvelant ses témoignages de confiance

absolue et de gratitude étcrnclle.

1\1.

de Caulain–

court partit pour aller remplil' sa mission auprés

de l\farie-Louise et des souverains.

Tandis que cettc scene lugubrc avait Jieu

a

Fontaineblcau , une sccne toutc différentc se

passait

a

París, car au milieu des pcrpétuclles

vicissitudcs de ce monde, la joic, incessammcnt

portée des

UDS

aux autrcs, vient luire tout

a

coup sur des visages longtemps assombris, en

laissant plongés dans une noire tristessc les vi–

sagcs sur lcsqucls elle n'avai t cessé de briller. En

effet tout éLait agilation, emprcssement, démon–

strations de dévo uement autour de 1\1. le comte

d'Artois, qui allait faire dans París son entrée

sol cnnellc.

l\L de Vilrolles avait rejoint le princc le 7, et

l'avai t trouvé

a

Nancy assistant

a

un

Te Deum

c¡uc l'on chantait pour célébrcr ce qu'on appclait

la délivrance de la Francc.

l\'I.

Je comtc d'Artois

fut snisi d'unc émotion bien naturelle en appre–

nan t qu'il allail cnfin rentrcr dans cette ville de

Paris qu'il avait quittée en

'1790,

pour vivre

proscrit cnviron un quart de siecle. 11 avait

autour de lui quclqucs amis fideles, MM. Franc;ois

d'Escars, Julcs de Polignac, Rogcr de Damas, de

Ilruges, l'abbé de Latil, qui partageaicnt son

bonhcur et se préparaicnt

a

l'accompagncr dans

la capitalc. ll laissa M. lc com te Roger de Damas

a

Nancy pour y prcndre, sous le litre de gou–

Ycrneur, l'administration de Ja Lorraine, et

aprcs s'etre muni d'un uniforme de garde na-

. tional,

il

se mit en routc de maniere

a

etre dans

les environs de París le jour qui serait choisi

pour son entréc,.

Les provinces qu'on traversait étaient horri-