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LIVRE CINQUANTE-1'ROISIE1\IE.
rcprésenlants de Napoléon fussent placés en pré–
senr.c de
l\f.
de Talleyrand et des ministres alliés,
dans une réunion commune. La discussion fnt
vive, et le maréchal Macdonald , que les petitcsses
ele cctte discussion indignaient, y soutint avec
énergic la cause de la famille impériale. Enfin,
Ja rudessc et Ja fierté de 1\1. de Caulaincourt, qui"
surpasserent mcme les hauteurs habituel!es de
M. deTnlleyrand, mirent un tcrme
:rn
débat, et on
tQmba
d'accord. On était au 1
O
avril, et on annon–
~nit
l'arrivée, prochaine de
l\'I.
Je comte d'Artois.
Le 11, il y cut une réunion générale des mi–
nistres des puissances, des membres du gouver–
nemcnt provisoire et des représentanls de Napo–
léon. Le trailé fut signé par les ministres des
monarqucs alliés, sur des inslruments séparés,
et lVI. de Talleyrand, au nom du gouvernement
royal, sans adhérer au traité lui-meme, garantit
I'exécution des conditions qui concernaient Ja
Francc.
:M.
de Caulaincourt, pour
la
prcmiere
fois alors, se dessaisit de l'abdication de Napo–
léon, et
Ju
remita l\L de Talleyrand qui
la
rc<¡ut
avec une joie pcu dissimuléc. Ainsi devait finit' la
plus grande puissanee qui eutrégné sur l'Europe
depuis Charlemagne, et le conquérant qui avait
signé les traités de Campo-Formio, de Lunéville,
de Víenne, de Tilsit, de Bayonnc, de Presbourg,
était réd U-it
i:i
acccptcr, par son noble représen–
tant, non pas le traité de Chatillon dont
il
avait
cu raison de ne pas vouloir, mais le traité du
11 avril, qui lui accordait l'ile d'Elbe, avec une
P'msion pour lui et les siens : terrible exemple
du cbatimen t que la forlunc réserve
a
ceux qui se
sont laissé enivrer par ses faveurs
!
Ces sigoaturcs échangées,
:M.
de Talleyrand
prcnant la parole avec un mélange de dignité et
de courtoisie, dit aux trois envoyé.s de Napoléon,
que lcurs devoirs envers Icur maitre malheureux
étant Iargcrnent rcmplis, le gouvernement comp–
tait maintenant sur lcur adhésion, et y tenait
a
cause de leur mérite et de leur honorable r e–
nommée. A cette ouverture,
l\J.
de Caulain'court
répondit que ses devoirs envers Napoléon ne se–
rnicnt pleinemcnt accomplis que lorsque toutes
les conditions qu'on venait de souscrirc auraicnt
élé
fidclement exécutées. Le maréchal Ncy r é–
pondit qn'il avait
Mja
adhéré au gouvernement
des Bourbons, et qu'il y adhérait de nouveau.
- Je ferai, dit le maréchal l\1acdonald, comme
l\I.
de Caulaincourt. - On se quitta apres ces
déclarations, et
l\I.
de Caulaiucourt, suivi du
maréchal Macdonald , repartit imrnédiatement
pour Fontainebleau.
Un peu avant la signature de ce lraité du
11 avril, Napoléon avait fait redemander
a
M. de Caulaincourt l'acte de son abdication. Bien
qu'il n'eul aucune illusion sur l'Autriche, et qu'il
comprit que, tout en aimant sa fille, Fran<¡ois
11
dut lui préférer l'intéret de son empirc,
il
s'était
flatté que si Marie-Louise voyait son pcre, elle
en obtiendrait quelque chose, la Toscane peut–
etre, précieuse par le voisinage de l'ile d'Elbe.
11
lui avait done conscillé, par la corrcspondanec
secrete qu'il avait élablie
~vcc
elle, de s'adresser
a
I'empereur Fran<¡ois: l\'.larie-Louise, suívant ce
conseil, avait envoyé plusieurs émissairesa Dijon,
et avait re<¡u de son perc des protcstalion's de
tendressc qui étaient de nalure
a
lui laisser
quelque cspérancc. En memc temps un faux
avis parvenu
a
Napoléon lui avail fait croire que
Fran<¡ois JI désapprouvait la précipitation avcc
laquelle on condamnait
h
régence de .Marie–
Louise au profit des Bourbon s. C'est
a
la suite de
ce faux avis que Napoléon avait redemandé l'aclc
de son abdication, mais sans insister, ayant bien·
tót reconnu lui-memc la légeretédes informatíons
qu'on lui avait fait parvenir.
1"1.
de Caulaincourt
avait ncttement rcfusé pour ne pas romprc les
négociations. Napoléon, appréciant ses motifs,
accueillit M. de Caulaincourt et le maréchal I\'Jac–
donald avcc beaucoup ge cordialité et de témoi–
gnages de gratitude. Il prit le traité de leurs
mains, le lut, l'approuva, sauf le refus de la Tos·
cane qu'il regrettaít, et remercia vivcment ses
deux négociateurs, surtout le maréchal Macdo–
nald, duque!
il
n'aurait pas attendu une con–
duite aussi amicale.
11
les renvoya cnsuile tous
- dcux, comme s'il cút voulu prendrc quelque
repos, et remcttre au•lendemain la suite <le eet .
entretien.
·
A peine les deux négociateurs étaient-ils sor–
tis, qu'il
fit,
selon son habitud.e, rappeler
l\f.
de
Caulaincourt, pour s'épancher avee lui en toulc
coofiance.
11
était calme , plus doux que de
coutume, et avait dans ses paroles et dans son
attitude quclquc chose de solennel. Bien qu'il
cut mis a se modérer dans ces circonstances cx–
traordinaircs toute la force de son ame, et que
sur les ailes de son géoié il se füt
co~ne
élevé
au-dessus de la terre, ce que
l\'I.
de Cau1aincourt
n'avait pu s'cmpecher d'admircr profondément,
il sembla en ce moment s'élever plus haut
eocore, et parler de toutcs choses avec un désin –
téressement extraordinaire.
11
remercia de nou–
veau
l\J.
de Caulaincourt, mais cette fois tres–
personnellement, de ce qu'il avait fait, et en