PRE.MIERE
ABDICATION. -
AVRIL
t8i4.
d'incertitude ou l'on se trouvait. Alexandre,
passant tout
a
coup avec la mobilité de sa nature
d'une extreme confiance
a
une extreme défiance,
se crut trompé par les représentants de Napo–
léon , et oubliant meme la loyauté de
M.
de
Caulaincourt. qui pourtant luí était si counue,
supposa que Ja fictélité íaisait tairc chez lui la
sincérité, que par conséquent luí et les deux
maréchaux étaient
a
París pour cacher une
grande manreuvre militaire. La supposition
aurait pu etre vraie quelques jours auparavant
lorsqu'ils avaient été envoyés pour la premiere
fois, et qu'ils n'avaient pas engagé leur parole,
mais actuellement ce n'était qu'une illusion de
la crainte. Alexandre
fit
appeler les trois pléni–
potentiaires, leur témoig na son mécontentement,
et alla jusqu'a leur dire que s'il ava it suivi son
premier mouvement et les conseils de ses alliés,
i1
les aurait fait arreter. M. de Caulaincourt
répondit avec hautcur au soupc;on dontils étaient
l'objet;
i1
dit qu'apres le noble abandon que le
monarque russe avait montré en traitant avec
eux, ils n'auraient jamais voulu ctre les com–
plices meme d'une ruse de guerre;
il
soutint
qu'on avait mentí indignement aux rnonarques
alliés, et offrit de se constituer prisonnier
jusqu'a ce que le fai t cut été vérifié. Alexandre
n'accepta point cette proposition, et. pour prouver
qu'il n'avait pas conc;u ces défiances
a
la légere,
il
communiqua la dénonciation et le nom du
dénonciateur
a
M. de Caulaincourt. Celui-ci
fut indigné, et d'un commun accord on cnvoya
des officiers
a
Fontainebleau pour aller aux
informations. Quelques heures apres, ces offi–
ciers revinrent avec la relation exacte de ce qui
s'était
pas~é.
D'apres leur rapport, tout se bor–
nait
a
une espece de sédition militaire qu i
s'était apaisée d'elle-meme, Napoléon n'ayan t
pas voul u en protiter.
C'était pour tout le monde une raison de
ha.ter le dénoument. Celte raison n'était pas la
seule, car on annon<;ait
a
chaque instant l'ar–
rivée de M. le comte d'Artois, et ce prince rei;u
dans París avec les acclamations qui ne man–
quent jamais aux nouvcaux arrivants ,
il
pouvait
devenir impossible de ríen obtenir pour Napo–
léon. Alexandre avait bien promis de ne pas
admettre M. le comte d'Artois
a
Paris avant la
signature des conventions relatives
a
la famille
impériale, mais c'était un motif de plus d'en
finir. On se bata done. D'abord, on pensa qu'il
n'était pas sage de vivre sur un armistice tacite
qui pouvait a tout moment etre rompu, sans
qu'il y eut
a
aceuser personne. On eonvint d'un
armístice formel et écrit pour tou tes les armées,
et particulierement pour celle qui. campait
autour de Fonlainebleau. Il fut stipulé quant
~
celle-ci, que la Seine, depuis Fontainebleau
jusqu'a Essoune, la séparerait des troupes alliées ,
et
a
partir de la ville d'Essonne , l'Essonne
elle-mcme, en suivant cette riviere aussi loin
que l'exigerait l'extension des cantonnements.
Cet armistice signé, on s'occupa du traité qui
devait régler Je sort de Napoléon et de sa
fa–
mille.
L'ile d'Elbe, quoique contestée plus d'une fois
a
l'instigation de
l\f.
Fouché et des ministres
autriehiens, ue fut plus mise en question grace
a
la volon té bien prononcée d'Alexandrc. 11 fut
convenu que Napoléon posséderait cette ile en
toute souveraineté, en conservant pendant sa
vie le litre dont le monde était habi tué
a
le
qualifier, eclui d'En1PEREun. Il
fot
eonvenu en
outre qu'il pourrait se faire aceompagner de
sept
a
huit eents bommes <le sa vieille garde,
lesqucls Iui serviraient d'escorte d'honneur et de
slit·eté. Restait
a
fixer le sort de l\farie-Louise et
de son fils.
1\1.
de l\Ietternich était arrivé le
10
avril, et avait refu sé la Toscane, disant
qu'Alexandre, en se mont1·ant disposé
a
l'ac–
corder, n'était génércux que du bien d'autrui.
Parme et Plaisa nce avaient été assignés
a
la
mere et au fils. On s'était ensuite occupé des
arrangements pécuniaires. On avait consentí
a
un trai temen t annuel de deux millions pour
Napoléon, et
a
pareille somme a part.ager entre
ses freres et
sreur~.
Ces sommes devaient etre
priscs tant 1mr le Trésor franc;:ais que sur le
revenu des immenses pays eédés par la Francc.
A cette condition Napoléon s'engageait
a
li vr er
toutes les valeurs du Trésor extraordinaire ainsi
que les diamants de la couronne. Sur ce Trésor
extraordinaire on lui permettait de distribuer
2 millions en capital au x officiers dont
i1
vou–
drait'récompenser les services. Une principauté
élait promise au prince
~ u gene
, lorsqu'on
arreterait les arrangements définitifs de terri–
toire. Enfin la dotation de l'impératrice José–
phine devait etre mainlenue, mais réduite
-ª
un
million.
Ce n'est qu'apres de Jo ngs débats que ces ar–
rangements furent adoptés. Le gouvernement
provisoire y faisant obstacle, non
a
cause de l'é–
tendue des sacrifices pécuniaires, mais
a
cause
de la reconnaissance du rcgoe impérial qu'on
pouvait en induire, Alexa!ldre voulut que les
~