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tHIO

LIVRE CINQUANTE-TROISIEl\fE.

étaient tenaces, mais Je caractere brisé, personoc

n'était capable de parler avec vigueur. Au lieu

de répondre, ils se conlenterent d'agir. Regar–

dant M. de l\fontesquiou commc un arrogant,

av:mt-coureur d'autres bien pires que lui, ils se

haterent d'écrire ce qui Jeur convcnait dans leur

projet de constitution, encouragés qu'ils étaient

par J'approbal.ion secrete de M. de Talleyrand,

et par l'approbation peu dissimulée de l'empe–

reur

Al~andre.

11 faut ajouter que ces alterca–

lions avaient acquis leur plus grande vivacité le

!)

avril, le jour meme ou les marécbaux trai–

taient

a

Paris la question de la r égencc de Marie–

Louise, et

ou

les représentants du royalisme

étaient en proie aux plus grandes alarmes. Ohte–

nir dans un pareil moment la proclamation des

Bourbons par le Sénat, n'importe

a

quelle con–

dition, était un avantage inestimable.-Finissons–

en,

ditnf.

de Talleyrand

a

M. de Montesquiou,

obtenons de la seule autorité reconnue l'cxclu–

sion des Bonaparle et le rappel des Bourbons,

et pu is on s'appliquera

1

ou

a

se débarrasser de

genes importunes, ou

a

les subir. - Finissez-en ,

dit·il égalcment aux sénateurs, proclamez les

Bourbons, car Bonaparte vous ferait paycr cber

vos actcs du

1

cr

et du 2 avril. Proclamcz les

Bourbons, et imposez-lcur les conditions que

vous voudrez. Si elles ne lcur convicnnent pas,

ils r efu seront

la

couronne, mais n'en croyez

ríen. Ils prendront la couronne n'importe com–

ment, et nous serons sortis des mains du furi cux

qui est

a

Fontaincbleau. - Ces conseils, excel–

lcnls pour ajourner les difficultés , fort

in suffi~

sants pour les résoudre, étaient un moyen de se

tirer actuellemcnt d'embarras. Le Sénat les

suivit, et le lendemain 6, tandis que les rnaré–

chaux retournaient

a

Fontainebleau pour deman

der l'abdication pure et simple, il vota la con–

stitution en la fondant sur les bases que nous

avons exposées.

Le Sénat., dans ectte constitution,

rappelait

librement au tróne,

sous le titrc de Ro1

DES

FRAN–

<;:A ts, Louis-Stanislas-Xavicr, frere de Louis XVI ,

et lui conférait la royauté h éréditaire, dont ce

prince ne devait elre saisi qu'apres avoir preté

serrnent d'observer fidelcmen l la conslitu tion

nouvelle; il établissait ensuile un roi inviolable,

des ministres responsables, deux chambres, l'une

héréditaire, l'autrc élective;

il

composait avcc le

Sénat la cbambre héréditaire, dont

il

limitait

le nombre

a

200

membre~,

ce qui laissait

a

la

royauté une cinquantaine de nominations

a

faire;

il composait la chambre élective avec Je ·Corps

législatif actuel, jusqu'au renouvellement légal

de ce corps; il assurait aux mernhres du Sénat

lcurs dotations,

i1

ceux du Corps législatif lcui·s

appointcments; il réservait au roi le pouvoi r

exécutif tout entier, le droit de paix et de gucrre

compris; il partageait le pouvoir législatif entre

le roí et les deux chambrcs, admcltait une ma–

gislralure inamovible, consacrait la liberté des

cultes , la liberté individuelle

1

la liberté de la

prcsse; il maintenait la Légion d'honneur, les

deux

nobles~es ,

les avantages altribués

a

J'ar–

mée, la dett c

publique~

les ventes diles natio–

nales, et proclamail enfin l'oubli des votes et

actes anléricurs, etc.

Ces dispositions rédigées en lcrmcs simples,

clairs, et assez généraux pour laisser beaucoup

a

faire an temps, furent votées le 6 au soir. Le 7,

on imprima la constitution; le 8, on la publia

dans les divers quartiers de Ja capitale. L'efl'et, il

faut le dire, n'en fut pas heureux. Le Sénat,

qu'on aurait du fortement appuyer, car lui seul

pouvaitlransporter la couronne de Napoléon aux

Bourbons, lui scul pouvait dans cclte lransmis –

sion représenter la nation

t1

un litre quelconque,

et faire de sages conditions pour elle, le Sénat,

disons-nous , que par ces motifs on aurait dti ap ·

puyer, n'était ni estimé ni aimé de personnc.

Les bonapartistes rcprochaienl

a

ce corps cl'avoir

levé sur son fondatcur une main parricide; les

amis de Ja liberté,

a

peine réveillés d' un long

sommeil, ne voyaient en lui que le senile inslru–

ment d'un insupportable despotismc; enfin, les

royalistes systémaliques, déteslant en lui la Ré–

volution et l'Empire, étaient indignés de ce qu'il

osait surgir du milicu de sa honle pour dicter

des conditions au roi légitime; et qucllcs condi–

tions

!

celles qu'il empruntait

a

une révolution

abhorrée. C'était

a

leurs yeux un acle de révolte,

d'impudencc, de cynisme inoul. Ils eurent rc–

cours au moyen le plus aisé, celui dont avait usé

M. de Montesquiou, ils attaquer ent le Sénat par

son coté faible, et ils se récriercnt, avec tout Je

public du reste, contre le soin qu'il avait cu de

garantir ses intérets en spécifiant le maintien de

sa dotation . On vcnait de 13.cher la bri e

a

Ja

prcsse, non pas celle des journaux, mais celle

des pamphlcts, la seule en vogue alors, et ce ful

un déluge d'écrits, de plaisanterics ameres contre

ce Sénat

conservateur)

qui, de tout ce qu'il élait

cbargé de conserver, n'avait su conscr ver qu e

ses dotations. L'avidité prise sur le fait est l'un

des vices dont

il

cst toujours facile de faire rirc

les hommes, ordinairement impitoyables pour