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tí46

LIVRE CINQUANTE-TROISIEME.

nislas-Xavier, destiné aujourd'hui

a

lui succéder

sous Je nom de Louis XVIII, lequel était un

savant, un Iettré et un sage; qu'il avait laissé

un autre frere, le comte d'Artois, modele de

bonté et de grace frarn;aises, enfin des neveux,

le du c d'Angouleme, le duc de Berry, types

de l'antique honneur chevaleresque. Sous ces

princes, doux, justes , ayant conservé les vertus

qu'une affrcuse révolution avait presque empor–

tées de Ja ferre, la France, aimée , estimée de

l'Europe, trouverait le repos et le Jaisserait au

monde. Elle trouvcrait meme la liberté, qu'elle

n'avait pas r encont.rée au milieu des orgies san–

guinaircs de la démagogie, et que Iui apporte–

raient des princes formés vingt ans

a

l'école de

l'Angleterre.

II

y avait une incontestable por–

tion de vérité dans ce langagc <le la flatterie im–

paticn ~_,

et tout cela pouvait devenir vrai, si

les passions des partis ne venaient corrompre

tant d'heureux · éléments de prospérité et de

repos.

Quoi qu'il en soit, les Bourbons, outre leur

mérite, avaient pour eux la puissance de la né–

cessité. En efl'et, la République, toute souillée

encore du sang versé en 1795, n'élant pas pro–

posable

a

la France épouvantée, la royauté seule

étant possible, et des deux royautés alors pré–

sentes aux esprits, celle du génie, celle de la

t.radition, la premiere s'étant perdue par ses

égarements, que restait-il , sinon la seconde,

consacrée par les siecles, et rajeunie par le

malheur?

II

élait done- bien naturel qu'apres

avoir employé quclques jours

a

se remettre les

Bourbons en mémoire , on se ralliat

a

eux

avec un

entrainem~nt

qui croissait d'heure en

heure.

II

fallait done se hater de faire deux choses :

rédiger la constitution qui lierait les Bourbons

en les rappelant, et en meme temps recevoir

M. le comte d'Artois

a

Paris. M. le comte d'Ar–

tois étai t dcmeuré caché

a

Nancy , comme on l'a

vu, atlcndant le retour de M. de Vitrolles, qui

était vcnu se concerter avec le gouvernement

provisoire, et qui n'avait pas voulu retourner

aupres du prince avant que la question de la

régcnce de l\farie-Louisc füt vidée. Cette ré–

gence étant définitivemeut repoussée, le rappel

des Ilourbons restant la seule solution imagina–

ble, il fallait r envoyer M. de Vitrolles

a

Nancy

pour qu'il y allat chercher le prince. M. de Tal–

leyrand et les membres du gouverncmeut pro–

visoire, malgré les exigences de M. de Vitrolles,

lui donnerent pour instruction de dire

a

M. le

comte d'Artois qu'il serait re<; u aux portes -de

Paris avcc tous les honneurs das

a

son rang;

qu'il serait conduit

a

Notre-Dame pour y en–

tendre un

Te Dettm,

et de Notre-Dame aux Tui–

leries; qu'il devrait cntrer avec !'uniforme de

garde national; qu'il était mcme

a

désircr qu'il

prit la cocarde tricolore, car ce scrait un moycn

ccrtain de s'attacher l'armée; que tel était l'avis

des hommes éelairés dont le concours était ac–

tuellement indispensable; que le pouvoir qu'on

luí attribuerait serait eclui de représentant de

Louis XVIII , dont il avait les lettres patentes;

que ces lettres scraicnt soumises au Sénat, qui,

s'appuyant sur elles, décernerait au prínce le

litre de lieutenant-général du royaume, aux

conditions, bien entendu, de la constitution

nouvelle.

l\I. de Vitrolles , sous l'inspiration des senti–

ments qui animaient le vieux partí royaliste, se

récria fort contre Ja cocarde tricolore, les cou–

leurs blancbes étant, sclon lui, celles de l'antique

royauté, et l'embleme de son droit inaliénable ;

contre la prétention du Sénat d'investir lui-meme

l\L le comte d'Artois du pouvoir royal, et par–

dessus tout contre I'idée d'imposer une constitu–

tion au souverain légitime. l\L de Talleyrand

n'aimant point

a

lutter, et comptant sur le

temps pour arranger toutes choses, dit assez lé–

gercment

a

M. de Vitrolles qu'il fallait partir

sans délai pour aller chercher le prince, qu'on

verrait au moment meme de l'entrée de M. le

comte d'Artois comment on pourrait résoudre la

difficulté de la cocarde; que, reJativement

a

Ja

constilution, il était indispensable d'en faire une,

mais qu'on la rendrait la moins genante possible,

et qu'on tacherait surlout de lui óter l'apparence

d'une loi imposée.

JI

lui répéta, en un mot, qu'il

fallait partir, et ne pas retarder par des diffi–

cultés puériles la marche des événements.

Il

le

chargea en meme temps de porter au prinee

l'assurance de son dévouemcnt personnel le plus

absolu.

Afin de convaincre davantage

1\'1.

de Vitrolles

qu'il n'y avait pas mieux

a

faire que de s'en

aller avec ces conditions, on lui procura une au-,,......_

dience de l'empcreur Alexandre. Pendant cette

audience M. de Vitrolles ayant voulu, avec l'ar–

rogance des partís victoricux, plaider pour les

anciennes couleurs et pour la pleine liberté du

roi de Francc, l'empereur Alexandre, sortant de

sa douceur habituelle, lui <lit que les monarqucs

alliés n'avaient pas franchi le Rhin avec 400 mille

hommes pour rendre la France esclave de l'émi-