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LIVRE QUARANTE-HUITIEl\IE.

a

M. de Narbonne par l'interrnédiaire de M. de

Caulaiocourt, qui rempla<;ait

a

Dresde l\L de Bas–

sano retenu encore

a

París,

fit

appeler le prince

Eugene. Le vice-roí, bien qu'il eut des défauts,

ceux de son origine

a

moitié créole, c'est-a-dire un

p~u

de nonchalance et de négligence des détails,

et que par ces défauts

il

eut cneouru souvcnt le

bJame de Napoléon, Je viee-roi avait néanmoios

conquis toutc son estime par une rare bravoure,

un vif sentiment d'honneur, et une r ésignation

exemplaire

a

supporter une situation affreuse

pendant la retraite. Napoléon lui témoigna sa

satisfaction , lui annonr;a qu

1

il constiluait en

fa–

veur de sa fille une fort belle dotation , celle du

duché de Galliera, et que cette récompense allait

él.re

publiée par le

Moniteur

comme prix des

services par lui rendus daos la campagnede

18

1

12.

Puis

il

Jui dit qu'il follait partir tout de suite

pour Milan, ou il reverrait sa famille, de laquelle

il

était séparé depuis plus d'une année, et se

mettrait en mesure de rcmplir une rnission im–

portante. Napoléon lui apprit ce qu'il avait

a

y

faire

1 •

11 devait d'abord prendre Je commande–

ment non-seulement <lu royaume de Lombardie,

mais du Piémont et de Ja Toscan e, sous le r·ap–

port militaire bien entendu, et employer tout

l'été a organiser une belle armée d'Italie. Les

élément.s nécessaires se trouvaient sur les lieux

soit en cadrcs, soit en conscrits déja instruits.

Les cadres du

4c

corps, avec lequel le prince

Eugene avait fait Ja campagne de Russie, ve–

naient de rentrer en Italie, et pouvaient fournir

vingt-quatre bataillons. L'armée italienne pouvait

en fournir vingt-quatre au moins. Les régiments

du Piémont, qui avaient recouvré les bataillons en-–

voyés en Espagne, revenus vides mais plus aguer–

rís que jamais, permettraient de porler

a

quatre–

vingts bataillons peut-etre l'arméc de la haute

Italie. L'artillerie abondait daos cette contrée, et

au mois de juillet on devait y avoir facilement

cent cinquante bouches

a

feu attelées. La cavale–

rie, qui aurait dú etrc prete pour le général Bcr–

trand, et qui ne l'avait pas été pour lui , le serait

pour Je prince Eugene. Il était done facil e a ·avoir

la une arméede quatre-vingt mille hommes dans

deux ou trois mois , et beaucoup mieux organisée

que J'arméc avec laquelle on venait de vaincre

les coalisés en Saxe, parce qu'on aurait dn tcmps

et du rcpos pour la pourvoir du matériel néces–

saire. Enfh1 Nnpoléon destinait au prince Eugenc

1

Ici encore, je ne m'en fie pas

a

des conjccturcs. Je racontc

les faits d'apres des pieces anlhentiques, d'apres des leltres

des lieutenants du prcmier mérite,_le général

Grcnier, qui avait re<;u récemment une blessure,

mais qui allait retourner en Italie pour s'y gué–

rir, et enfin l'illustre Miollis,

a

Ja

fo

is savant,

hommc d'esprit, spartiate et soldat héro"ique.

Restait Murat. Ce malheureux princc perdait

presque la tete sous la couronne que Napoléon y

ava it posée. Profondément atteint daos son

orgueil par les paroles insérées au

llf

onileur'

apres son départ de l'armée, craignant d'avoir

encouru pour toujours la disgrace de Napoléon,

d'etre réservé des lors avcc son royaume de

Naples

a

quelque compensation,

a

quelque

arrangemcnt de paix, ayant preté l'orcillc aux

ouvertures que l'Autriche adressait

a

tous ceux

qui avaient envie d'abandonner la France saos

l'oser' ayant peur

a

chaque pas de faire trop ou

trop peu , il était da ns l'état du roi de Bavierc,

du roí de Saxe, de tous ces alliés enfin, qui trop

honnetes pour nous trahír ne l'étaient pas assez

pour n'y point penser, et avec bien plus de

remords qu'eux, car il devait tout

a

Napoléon ,

dont

il

avait épousé

Ja

sreur, sceur dont

il

se

défiait meme, bien qu'elJe n'eut pas moins envie

que lui de conserver ce royaume tant aimé, ce

royaume cause de leurs fautes et de leurs mal–

heurs

!

Dans cette situation il y avait des moments

ou

il

semblait tomber en délire. Sa sarnté s'alté–

rait visiblement' et ce héros' si beau

a

voir sur

le champ de bataille de la l\foskowa, devenu un

faible roi, tourmenté de soucis' perdait

a

la fois

sa beauté, sa sérénité, son courage. Son peuple,

auquel il avait su plaire, en était saisi de compas–

sion , et comme pour Je consoler, le couvrait

d'applaudissements , qu.and

il

le voyait. Quelque–

fois ce pauvre Murat songeait

a

venir se jeter aux

pieds de Napoléon, et

iJ

luí offrir de comman<ler

les restes de sa

cav~ lerie;

quelquefois il voulait

se donner

a

l'

Autriche, et il avai.t dépeché

a

celle-ci un prince Cariati , dont la conduite était

devenue

a

Vienne un tel scandale, que M. de

Narbonne avait été obligé de la signaler

a

Napo–

léon.

Tout cela cbez Napoléon excitait la pitié, mais

une pitié saos bienveillance , et

il

était décidé

a

y mettre fin. Il ne doutait pas que sur un ordre

formel de sa part , appuyé d'une menace positive,

menace plus facile

a

réaliser

a

l'égard de Naples

qu'a l'égard de la .Suede , l\furat n'accourut

a

ses

pieds, et

j]

résolut d'abord de l'appeler

a

l'armée,

de Napoléon uu prince Eugenc, leLtres ou tous ces fails son t

rappclés ou consignés, et toujours motivés longuement.