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PREl\IIERE ABDICVTION. -

AVl\IL

mu.

voir, on eut ditqu'ilreprésentait un maitre irrité,

instruit de ce qui s'était passé

a

Petil-Bonrg

entre l\fannont et Je prince de Schwarzenberg.

11.n'en élait ríen pourtant. Napoléonet le colonel

Gourgaud ignoraient tout, mais ce dernier, cé–

dant aux facheuses habitudes de l'état-major

impérial' allait a

S011

insu déterminer un événe–

ment de grande importance. Il

y

a des tcmps ou

la

fortune, apres vous avoir tout pardonné, ne

vous pardonne plus rien, et vous punit non–

seulement de vos

fa

u tes, mais de celles d'autrui.

Napoléon l'éprouva cruellement en cettc circon–

stance.

C'était le vieux général Souham qui , en sa

qualité de plus ancien divisionnaire, comman–

dait en l'absence du maréchal Marmont. Le co–

lonel Gourgaud parla du meme ton, tanta lui

qu'aux autres généraux, Compans, J3ordessoulle,

Meynadier, et, par surcroit de malheur, un nou–

vel ordre arriva en cet instant, ordre écrit cette

fois, adressé directement au général Souham, et

lui prcscrivant de se rendre immédiatement

a

Fontaineblcau. C'était la suite naturellc d'un

usagc établi

a

l'

état-major impérial, et consistant

a répéter par écrit tous les ordres verbaux de

l'empereur. Le vieux Souham ne

fit

pas celte ré–

tlexion si simple, mais frappé de Ja maniere dont

Je colonel Gourgaud avait parlé, frappé plus en–

core de la Tépétition écrite des merncs ordres, et

ayant en ce moment la défiance d'une con–

science qui n'était pas irréprochable, il

con~ut

sur-le-clrnmp une penséc des plus malheureuses.

Napoléon, suivant Iui, savait tout; il connaissait

non-seulement la convention seérete conclue

par le maréchal 'Marmont avec le prince de

Schwarzenberg, mais l'adhésion qu'elle avait re–

~ue

des généraux divisionnaires du 6° corps, et

il les appelait

a

Fontainebleau pour les faire ar–

reter, peut-etre meme fusiller. Le général Sou–

ham était un général de la révólution, cxcellent

homme de guerre, ancien ami de Moreau, ayant

conservé pour Napoléon Ja haine sourde de tous

les gé(l.éraux de l'arméc du Rhin, se plaignant

comme Vandamme, et avec autant de motifs, de

n'avoir pas été fait maréchal, resté républicain

au fond du cceur, et assez habitué aux procédés

révolutionnaircs pour croirc Napoléon capable

des actes les plus violents.

JI

assembla tout de

suite ses collegues, les généraux Compans, Bor–

dessoulle, Meynadier, Ieur dit que Napoléon,

évidemment informé de ce qui s'était passé, les

appelait au pres de Iui pour les fairc fu.siller, et

qu'il n'était pas d'humeur

a

s'exposer

a

une fin

pareille. IIs n'en étaient pas plus d'avis que lui,

et apres quelques objections qui tomberent de–

vant l'affirmation répétée que Napoléon savait

tout, ils conscntirent

a

ce que proposait le géné–

ral ouham, c'est- 3.-dire

a

ne pas attendre le re–

tou du maréchal Marmont pour exécuter la

convention conclue avec le prince de Schwarzen–

berg, et par conséqnent

a

passor l'Essonne pour

se mettre aux ordres du gouvernement provi–

soire. Le général Souham était si rempli de

l'idée qu'on l'appelait pour s'emparer de sa per–

sonne, qu'il avait établi ün piquct de cavalerie

sur la route de Fontainebleau, avec ordre d'ar–

reter et d'abatlre le premier officier d'état-major

qui paraitrait , si Napoléon, par impatience

d'etre obéi, renouvelait ses messages. Le colonel

Fabvier, attaché

a

l'état-major du maréchal Mar–

mont , désolé de ces résolutions si légeres et si

facheuses,

s'effor~a

en vain de calmer le général

Souham, de lui prouver qu'il s'exagérait le dan–

ger de ·sa situation, qu' au surplus les précau–

tions qu'il venait de prescrire pour garder la

route devaient le rassurer, qu'il n'avait qu'a

y

joindre celle de rester de sa personne au dela de

l'Essonne, de maniere

a

s'échapper au premier

signa!, que ne pas s'en tenir la, mais prendre

sur soi le déplacement des troupes, c'était mériter

et peut-etre encourir

le

traitement qu'il redou–

tait bien

a

tort en ce moment. Rien ne put cal–

mer cet esprit effaré, et aux excellentes raisons

du colonel Fabvier

il

ne sut opposer que cet

adage vulgaire de la soldatesque :

Il vaut mieux

tuer le diable que se laisse1· tue1· pm· lui.

Il per–

sista done dans son erreur.

Poussés par cette· fatale illusion, les généraux

divisionnaires du

6e

corps avertirent le prince

de Schwarzenberg, ou ccux qui le

rempla~aicnt,

de leur prochain mouvement, et craignant de

rencontrer de fortes oppositions de la part des

troupes , ordonnerent que tous les officiers des

r égíments, depuis les colonels jusqu'aux sous–

lieutenants, marchassent avec leurs soldats et

a

leur poste, de peur que les officiers se réunissant

pour s'entretenir, ne vinssent

a

se communiquer

Jeurs réflexions, pcut-étre leurs doutes, et ne

fussent ainsi amenés

a

un soulevement contre

des chefs dont ils auraien t deviné la défection.

Ces précautions une fois prises, le 6° corps

conduit par ses généraux franchit l'Essonne vers

quatre heures du matin, le

!"5 ,

pendant que les

maréchaux étaient en conférence rue Saint-Flo–

rentin. Il

s'avan~a

en silence vers les avant-postes

ennemis. Les troupes obéirent, ignorant Ja fau te