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r>20

LIVRE

CINQUANTE-TROISIE~IE.

est de plus exaspere. Ses soldats partagent ses

ressentiments, et si les Autrichiens ont pu, en

aya nt J'ennemi dans lcur capitale, livrer encore

les batailles d'Essling et de \Vagram, les

Fran~ais

J

ne feront pas moins pour arracher leur patrie

aux mains de l'étranger, et, apres tout,

il

n'y a

pas si grand orgueil

a

croire que les

Fran~ais

valent les Autrichiens, et Napoléon l'archiduc

Charles!

Un peu ramené par

Ja

rudesse de M. de Cau–

Jaincourt;'le-prince deSchwarzenberg lui répondit

qu'il n'avait jamais oublié ce qu'il devait person–

nellcment

a

Napoléon, mais qu'il y avaitqucl–

qu' un

a

qui

il

devait davantage, c'était son propre

souverain; que le mariage de Maric-Louise,

il

l'avai t désiré, demandé meme, qu'il n'cn méeon–

naissait pas la valeur, qu'il y voyait un lien,

mais pas une chaine ; qu'en considération de ce

líen, l'Aütriche avait tout fait en 1813 et en 18'14

pour éclairer Napoléon et l'amener

a

des réso–

Jutions modérées, qu'elle n'y avait pas ;Jussi, et

qu'il devait

y

avoir terme

a

tout, meme aux

ménagements de la parenté; que, quant aux

acles de désespoir, on en prévoyait de redouta–

bles de la part d'un homme degénie commandant

l'armée

fran~aise,

mais qu'on était préparé,

qu'on se battrai t aussi en désespérés ; qu e si, pour

les

Fran~ais,

il

s'agissait d'arracher leur patrie

aux mains de l'étranger, il s'agissait pour toutes

les puissances d'arracher leur indépendance aux

mains d'un dominateur impitoyable; qu'on avait

été esclave, qu'on ne voulai t plus l'etre; que s'il

fallait sortir de Paris, on en sortirait, mais qu'on

y

rcntrerait, et que les alliés ne scraient pas

moins dévoués

a

leur indépendance que les

Fran~ais

a

l'intégrité de leur sol.

Il est évident que si l'Autriche, par conve–

nancc et par prudence, avait vo ulu ménager

Napoléon en 1815, et s'était contentée, en lui

o.lfrant la paix de Pragu e, <le mettre des bornes

a

sa domination absolue sur l'Europe, que si

a

Francfort elle avait cncore, par convenance et

prudence, offert de lui laisser la France avec le

Rbin et les Alpes, eL que si en dernier licu

a

Chatillon, pour éviter les hasards de la marche

sur París, elle avai t offert de lui laisser la France

de 1790, il est évident qu'aujourd'hui, croyant

avoir surmonté tous les dangers, et satisfait a

toutes les convenances, l'Autriche aimait mieux

en finir d'un gendre insupportable, et surtout re–

cueillir tous les fruits de la commune victoire,

fruits pour elle inespérés et immenses, car en

ótant

a

la France les Pays-Bas et les provinces

du Rhin et en

y

renon~ant

pour elle-meme, elle

aurait en échange la ligne de l'Inn, le Tyrol, et

enfin l'Italie. Le plaisir fort donteux pour elle,

et en beaucoup de cas tres-embarrassant, de voir

une archiduchesse demcurer régente de Francc,

ne valait pas le danger de voir son terrible gen–

dre ressaisir le sceptre, et elle préférait donner

a

celte archiduchesse une indemnité en Italie,

meme

a

ses dépens,

qu~

de la laisser a Paris

pour y garder la place de NHpoléon. Ce calcul,

fort naturel, ne prouvait pas que

Fran~ois

11 fUt

mauvais pere ; il prouvait que ce prince aimait

mienx l'intéret de ses peuples que celui <le sa

filie, et on ne peut pas dire qu'il manquat ainsi

i1

ses véritables d.evoirs.

C'est la ce qui expliquait le peu d'appui que

la cause de Napoléon trouvait aupres du 'princc

de Schwarzenberg, représentant beaucoup trop

franc d'une politique que M. de Metternich, s'il

eut été

a

Paris en ce moment, eut suivie avec

plus de ménagement, mais avec autant de con–

stance. M. de Caulaincourt, convaincu par tout

ce qu'il avait vu et fait pendanL ces trois jours,

qu'il ne ramenerait personne

a

Napoléon, ni

parmi les serviteurs les plus éminents de l'Em–

pire, ni parmi les représentants' des souverains

alliés, voulut cependant voir l'empereur Alexan·

drc cncore une fois, afin de savoir si la personne

de Napoléon étant sacrifiée,

il

ne reslcrait pas

du moins quelque chance pour sa dynastie.

Alcxandre le

re~ut

avec la meme bonté, mais en

luí répétant

a

peu pres ce qu'il luí avait dit de

la nécessilé d'aller

a

Fontainebleau conseiller un

grand et dernier sacrifice. - Partez, lui dit-il,

partez, car on me demande

a

chaque instant

votrc renvoi; on me dit que votre préscncc

intimide bcaucoup de gens et leur fait craindrc

de notre part un relour vers Napoléon. Je fini–

rai par etre obligé de vous éloigner, car ni mes

alliés ni moi ne voulons autoriser de pareillcs

suppositions. Je n 'ai aucun rcssentiment, croyez–

le. Napoléon est malheureux, et des cet instant,

je luí pardonne le mal qu'il a fait

a

Ja Russie.

Mais Ja Frunce, l'Europe ont besoin de repos, et

avec luí elles n'en auront jamais. Nous sommes

irrévocablcment fixés sur ce point. Qu'il réclamc

(

ce qu'il voudra pour sa personne : il n'cst pas

de retraite qu'on ne soit disposé

a

lui accordcr.

S'il veutmcme accepter la main quejelui tends,

qu'il vienne dans mes États, et

il

y recevra une

magnifique, et, ce qui vaut mieux, une cordiale

hospitalité. Nous donnerons lui et moi un grand

exemple

a

l'univers, moi en offrant, luí en ac-