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LIVRE CINQUANTE-TROISIEl\IE.

bonne foi qu'il apporlait dans es premieres im–

prcssions, se di ait qu'il fallait donner

a

l'Eu–

rope non-seulement la paix mais la liberté, et

commencer par In France.

JI

y avait done bien

autre chose

u

fai1·e dans ces deux ou trois pre–

micrs jours qu'a rccevoir

a

bras ouverls

l\'I.

le

comte d'Arlois;

il

y avait

a

rompre définitive–

ment avec Napoléon en le frappnnt de dé–

chéancc,

il

y avait

a

détermincr

Ja

forme du

futur gouvcrnement,

a

rédigcr une conslitu–

tion, et

a

l'imposcr comme condition du nouvcau

regne.

L'élonncment du messagcr du comte d'Arlois

fut cxtt·cme.

l\L

de Vilrollcs étail de sa not11re

impétueux, ainrnnt

a

se melcr des choses les

plus hautes , meme de cellos qui élaicnt supé–

rieurcs usa position, ficr des dangcrs qu'il avait

courus , et fort enorgucilli de sa nouvelle im–

portance . Doué d'unc remarquablc inlelligence,

il senlait tres-bien que les Bourbons ne pou–

vaiont pas régner comme autrefois, mais la pré–

lention de leur fairc des eonditions quclconqucs,

éeriles ou sous-cnlendues , le eonfondait de

surprise et d'indignation (sentiment qui était

alors dans le creur de tous les royalistcs), et il

se scrait volontiers laissé aller

a

des propos fort

déplacés, si la grandeur de tout ce qu'il avait

sous les yeux n'avait contenu son impétuosité.

Pourtant il comprit qu'avant de rccevoir le

prince, n'imporle

a

quelle condition,

il

fallait

détróncr Napoléon qui ne l'était pas encore,

qu il fallait amener

a

cetle résolution un grand

corps, le Sénat, lcquel était peu estimé clu pu–

blie snns doutc, mais eontenait les meillcurs

restes de la révolution frarn;aise et était armé de

ses grands príncipes, qu'il fallait enfin accomplir

cetLe reuvre devant une arméc que Napoléon

commandait en personne. En présence des dif–

fi cultés qui rcstaient

a

vaincre, M. de Vilrolles

se calma un peu, mais

i1

demeura prcssant, il

dit et redit que

1\1.

le comtc d'Arlois était

In,

impaticnt d'arriver, impatient de témoigncr sa

gralitude

a

MM. de Talleyrand et de Dalberg, et

que décemment on ne pouvait le faire lrop long–

temps allendre.

M. de Talleyrand opposa

a

eette impatienee le

corps amortissant qu'il opposail

a

tous ]es chocs

importuns sa moqueuse insouciancc, disant

leolement, apres avoir promené <;a et Ja des re–

gards distraiLs, qu'il fallait voir, qu'il rcstaitbien

des choses

a

faire a aot d'en arrifor au bonheur

de se jcter dan les bras de

l\J.

le comte d'Arlois,

et qu'au surplus on s'en oceuperait le plus pro-

chainement qu'on pourrait.

l\f.

de Vitrolles en–

tcndit de la bouehe de

M.

de Dalberg des paro.les

bien plus capablcs encore de le glaccr, si son

ardeur avait été moins grande. M. de Dalberg

étail des plus décidés conlre Napoléon, mais des

plus décidés aussi eonlre le rétablissement in–

condiLionnel eles Bourhons.

11

était franchemcnt

libéral, et ne ménageait

a

personne l'cxpression

de ses scnlimcnts. -

JI

s'agit bien d'aller vite

1

dit-il

a

M. de Vitrolles, il s'agit d'aller surcmcnt.

Ricn n'cst aisé iei. On a toutes les peines imagi–

nables

a

obtenir que la déehéance soit définiti–

vcment prononcéc. Napoléon intimide encorc

tout le monde. On ne peut se servir que du

Sénat. Le Sénat vaincu par les éYéncments se

rcndra, mais en cxigeant des garanties,ct

il

aura

raison. D'aillcurs l'empereur de Russic, par qui

lout se fait ici, pense commc le Sénat. Ce n'cst

pas par gout que ce prince acecpte ]es Bourbons,

et

il

est d'avis qu'on prennc bcaucoup de pré–

caulions en rcmettant la Franco dans lcurs

mains. Sachez done atl.endre, et ne pas vouloir

cuei11ir le fruit avant qu'il soit mur. - Quelquc

révoltanle que paru

~a

M. de Vitrollcs eette ma–

niere de procédcr, il fallut bien se soumcltre et

attendre.

Du resle, on n'avait gucre perdu de tcmps. Le

5,J mars on avait re<;u les souvé ra ins ólrangers,

et

fait

décider par eux qu'ils ne lraitcraicnt plus

avcc Napoléon, ni avec aueun mcmbre de sa

fa

milie : le

1

cr

avril on avait formé un gouver–

nement provisoirc, et laissé plaoardcr dans París

I'adresse du corps municipal en faveur des

Bourbons. On était au matin du 2avril:

il

n'y avail

done aucun instant qui o'eut été employé. l\fais

l'heurc était venue de p:.isscr

a

l'acte essentiel et

décisif, eelui de prononcer la déehéanec de Na–

poléon. lnsliluer un gom•ernement provisoire,

c'était bien déclarer implicitemcnt qu'on ne re–

connaissait plus le gouvernement de Napoléon;

mais il fallait le déclarcr cxplicitement, et apres

avoir fi·anchi le premier pas, le Sénat ne pouvait

certaincment pas refuscr de franchir le second.

Pourlant, si on voyail quelques sénateurs pressés

de se faire valoir, par1ant et agissant assez vive–

mcnt dans le seos du jour, la massc était eon–

sternée, sileneieuse, inactive, et quoique prele

a

prononcer la déebéance de Napoléon, elle dc–

ma ndai t des yeux, sinon de Ja voix, qu'on se

chargeat de formuler l'arret afin qu'elle n'eüt

qu'a le signer. Mais il

y

avait daos le Sénat quel–

ques personnages moins embarrassés et plus en–

clins

~

se mellre en avant, c'étaient les anciens