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t!08

LIVRE ClNQUANTE-TROISIEl\fE.

exclusivement avec les Bourbons, seuls souve–

rains légitimes de la France.

A

pres une délibé–

ration vive et confuse, on se sépara d'accord sor

un point, l'envoi d'une députatio11

a

Alex\\nrlrc

pour lui exprimer Je vreu forme! des royalistcs .

En cffct, cette députation alla chercher Alexan–

dre

a

l'Élysée d'abord, puis

a

l'hótcl de la rue

Saint-Florentin, ne ful point re<;ue par ce prince,

mais par M. de Nesselrodc, qui , se rcnfcrmant

dans Ja réserve convenable, leur répéta que

l'Europc rétrnie

a

París cntendait suivre exclusi–

vemcnt le vreu de la Francc, et que si, commc

tout l'indiquait, ce

' 'OOU

étnit favorable aux

Bourbons, les souverain s alliés seraient heureux

d'assister

a

leur restauration' et

d'y

contribuer

par leur plein assentiment.

Le premier acte de cette révoluLion était done

accompli. Les sotivcrains entrés daos París, rc<;us

paisiblement par une populat.ion désarmée qu'ils

s'attachaient

a

flatter, s'étaient mis en rapport

avcc quelques grands pcrsonnages, et, sur leur

conseíl, avaient déclar·é qu'ils ne traiteraieñlplus

avec Napoléon, landis qu'ils élaient prcts, au

contraire,

a

traíter avantageusement avec tout

gouvcrnement issu du vreu de la nation fran –

<;aise. C'était assez pour que l'opinion , fatiguée

de

la

domination d'un soldat qui ne prenait

jamais de repos et n'en laissait

a

pcrsonne, se

pronon~aL bient~t

en faveur de la seule dynastie

qui s'offrit

u

'}'esprit en dehors de cel!e que la

victoire avait élevée et que la victoire renver–

sait. Un rnoment d'hésitation en préscnce d'un

événement si subit, et apres vingt-quatre ans

d'abscnce des Bourbons, était bien naturel ;

mais les heures allaient produire ici l'effet qu'en

d'autres temps produisent les mois et les années.

Le soir meme, et le lendemain 1

cr

avril, tous

ces esprits remuants qui se précipitent dans le

torrent des révolutions, les uns pour en profi–

ter, les auLres pour le plaisir de s'y meler, al–

laient, venaient sans ccsse, et de chez

:M.

de Tal–

leyrand couraient chcz les personnagcs dont le

concours était nécessaire, en particulicr chcz les

sénateurs.

11

n'y avait d'aucun cóté grande résis–

tance

a

craindre, car pour Lout Je monde Napo –

léon vaincu était Napoléon détróné . ll exislait

bien, dans le peuple de Paris, quelques rcgrets

pour le guerrier éblouissant qui avait longtemps

charmé son imagination, et qui , quclques jours

auparavant, sernblait encore le défenseur de ses

murs; mais si , on excepte le peuple de quelques

grandes villes, et surtout les paysans dont la

chaumiere avnit été ravagée, pour la France en-

tiere, la paix, conséquence assurée de la chute

de Napoléon, était un immense soulagement. Du

reste, parmi ceux qui mettent plus directement

Ía main aux événements, l'entrainement vers un

nouvcl état de choses était général. Les anciens

révolutionnaires, sans songer que c'étaient les

Bourbons qui allaient remplacct• Napoléon, se

Jivraient au plaisir de la vengeance contre l'au–

teur du 18 brumaire. Les gens sensés reconnais–

saient daos ce qui arrivait la suite tant prédite

des foll es témérités qu'ils avaient déplorées, et

d'un pouvoir saos contre-poids. Les hommes,

occupés particQlierement de lcurs intérets, cher–

chaicnt la fortune poul' al!er vers elle, et, ne Ja

voyant plus <lu cóté de Napoléon , tournaient ail–

leurs leurs regards. Avec des dispositions aussi

uoanimcs, on n'avait })Oint

a

craindre que le

Sénat se souvint de sa longue soumission pour

en rougir ou pour

y

persévérer. Ordinairemcnt

on s'cn prcnd d'une trop longue soumission

a

celui qui vous l'a imposée, et loin d'etre un

embarras pour la pudeur, elle est au eontrairc

un · prétcxte pour l'ingratilude. Le fidcl e et

infortuné du c de Viceuce avait pu s'en con–

vaincre dans ccttc meme journéc du 51 mars, et–

dans la nuit qui avait suivi, car en sortant de

chcz l'cmpercur Alexaodre il n'avait cessé de

visiter tour

a

tour les nombreux personnagcs qui,

u

des titres divcrs, avaient serv i le gouvernement

impérial, et pouvaient en ce momcnt extreme

lui apporter un utile secours.

11

luí semblait

qu'cn invoquant la foi pro rnisc, ou au moins la

reconnaissancc, car il n'y avait pas alot'S une

fortune qui ne fUt due

a

Napoléon,

OH

pf:lrvicn–

drait

a

raífermir les fidélités ébranlées, et que si

les souverains alliés, fort soigncux de ménager le

sen timent public, le trouvaient tant soit pcu

persistant en faveur de Napoléon, ils s'arrete–

raient, et., au lieu de faire une révolution, se

borneraient

a

faire la paix, reuvre pour laquelJe

l\I.

de Caulaincourt était aujourd'hui tout pré–

paré. Cclle fois, en effet, il avait pris au fond de

son creur Ja résolulion de violcr ses instructions,

et dut-il ctre désavoué

a

Fonlainebleau, il élait

déterminé

a

signer

a

París la paix de Chatillon.

l\Iais sa tournéc, non interrompue pendant vingl–

quatre heures, le consterna, l'indigna, le remplit

de mépris pour les hommes, qu'il ne eonnaissait

pns assez pour s'attendrc

a

ce qui lui arrivait.

Droit, rude, sensé, M. de Caulaincourt n'avait

pas cette profonde science des hommes, qui óte

to ute colere en óta nt tou te surprisc.

11

passa ces

deux jours

a

s'étonner et

a

s'emporler. Sa