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LIVRE CINQUANTE-TROISIEl\'IE.

irrité, en

íit

la

remarque a Napoléon avec quel–

que aigreur, et une altercation était engagée

entre eux a ce sujet, lorsqu'on apporta un bul–

letin de l'ennemi saisi par nos soldats, et racon–

tant a sa maniere la triste journée de la Fere–

Champenoise. Ce bulletin, quoique la date en

füt inexacte, révélait avec certitude Ja marche

des coalisés sur París. Apres la triste confirma–

tion de ce fait, obtenue de la bouche de quel–

ques prisonniers, Napoléon se reporta sur Saint–

Dizier, fort touché d'une pareille nouvelle, plus

touché encore de l'effet qu'elle produisait autour

de lui. Les esprits, déja tres-inquiets de ce qui

avait pu se passer depuis qu'on s'était dirigé vers

la Lorraine, ne garderent plus de mesure en

apprenant que les coalisés avaient marché sur

Paris. On se déchaina avec une sorte d'emporte–

ment contre le fol entetement de Napoléon, au–

quel, depuis le retour de M. de Caulaincourt,

on attribuait la rupture des négociations. On se

mit a dire qu'apres avoir

fait

périr déjl-une

partie de l'armée dans cette campagne, il allait

faire périr la capitale elle-meme, et que tandis

qu'il bataillait inutilement sur les derrieres de la

coalition, celle-ci vengeait peut-etre !'incendie

de Moscou sur Paris en flammes. Bientót l'émo–

tion devint telle, qu'il fallut en tenir grand

compte, et le lendemain 28, Napoléon, revenu a

Saint-Dizier, délibéra en compagnie de Berthier,

Ney, Caulaincourt, sur le parti

a

prendrc. Si

l'on avait pu prévoir qu'il n'était plus temps de

secourir París, le mieux assurément eut été de

persévérer dans un projet, hasardeux sans

doute, mais présentant les seules chances de

salut qu'il füt permis d'entrevoir encore, de lais–

ser par conséquent l'ennemi faire des révolu–

tions dans Ja capitale, et de se jeter sur ses der–

rieres avec les 120 mille hommes qu'on serait

parvenu

a

réunir. Mais dans l'espérance, qui

n'était pas perdue, de sauver Paris, il était na–

turel d'y marcher en toute bate, et puisqu'on

n'avait pas réussi a en détourner les généraux

alliés par

la

derniere manreuvre, d'essaycr au

moins de les surprcndre au moment ou ils se–

raient occupés devant cette grande ville, et de

lomber sur eux avcc la violence de Ja foudre .

Bcrthier, Ney furent de cet avis , et le soutinrent.

avec chaleur. Dans l'érnotion qu'on éprouvait,

courir

a

Paris était devenu la passion univer–

selle. Napoléon , qui ne se gouvernait point par

l'émotion, pensait différemment. Il avait marché

vers les places pour se refaire une arméc, pour

reven ir

a

cette force de 100 milie hommcs, qui

dans ses mains devait faire trembler la coalition.

París pris, ou en danger de l'ctre, ne suffisait

pas pour le détom_'ncr d'un si grand but, car des

qtf>on le saurait en possession d'une force pa–

reille,

il

était presque certain que les coalisés

sortiraient de París bien vite, ou expieraient,

s'ils

y

restaient, la satisfaction

d'y

avoir paru un

moment. Napoléon s'arretait peu a l'idée d'une

révolution politique, parce que, malgré toute sa

sagacité,

il

ne se figurait pas le décri dans lequel

son gouvernement était tombé. 11 n'envisageait

les choses qu'au point de vue militaire, et de ce

point de vue il regardait comme plus important

d'avoir 100 milie hommes que de sauver Paris.

Cependant, seul de son avis, accusé d'un entete–

ment insensé,

il

dut céder en préscnce de la

douleur universelle, et se résoudre a venir au

secours de la capitale. Mais a

y

marchcr il fallait

y

marcher sur-lc-champ, car pour y arriver a

temps il n'y avait pas une minute

a

perdre. Na–

poléon prit done son parti soudainement, et

il

se mit en route a l'heure meme, coupant droit

de Ja Marne a l'Aube, de l'Aube a la Seine, pour

revenir sur Paris par la gauche de Ja Seine ,

et éviter ainsi la rcncontre des armées coali–

sées.

Parti le 28 de Saint-Dizier, il avait couché

avec l'armée a Doulevent ( voir la carte n° 62),

était reparti le 29, avait passé l'Aube a Dolan–

court, et était venu coucher a Troyes, laissant

en arriere l'armée qui ne pouvait pas franchir

les distances aussi vite que luí. En route il avait

re<:u un mcssage de M. de Lavalette, qui lui

signalait le danger imminent de la capitale, la

masse d'ennemis qui la mena<:aient au dehors,

l'activité des intrigues qui

la

mena<:aient au de–

dans, et sur ce message il avait encore accéléré

sa marche. Le 30 au matin

il

avait poussé jusqu'a

Villeneuve-l'Archeveque, et la, cessant de mar–

cher militairement, voulant apporter au moins

a

Paris le secours de sa présence,

il

avait pris

la

poste, et tantót

a

cheval, tantót dans un misé–

rable chariot, il s'était, avec M. de Caulaincourt

et Berthier, dirigé sur París. 11 avait envoyé en

avant, comme on l'a vu, le général Dejean, pour

annoncer son arrivée et presser instamment les

marécha ux de prolonger la résistance. Vers mi–

nuit, ayant couru toute la journée, soit a cheval,

soit en voiture, il était enfin parvenu a Fromen–

teau, impatient de savoir ce qui se passait.

Déja on apercevait une nombreuse cavalerie

précédée de quelques offieiers. Sans hésiter, Na–

pol éon appela ces officiers

a

lui. Qui est la? de-