PREMIERE ABDICATION. -
MARS
i8U.
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l'évacuation de Par·is, et les deux préfets, avec
une députation choisie parmi les membres du
conseil municipal et les chefs <le la garde
nationale, partirent de l'hotel de ville pour se
rendre au chateau de Bondy, et y invoquer les
bons sentiments des souverains victoricux.
En ce moment meme Napoléon arrivait aux
portes de Paris. On l'a vu s'arrétant le 25 mars
_aux environs de Saint-Dizier, pour
y
fairc
reposer ses troupes, et se donner le temps de
raJJ1er les garnisons dont il était venu chercher
lé- renfort. Le 24, le 2?>, il avait opéré divers
mouvements entre Saint-Djzier et Vassy, se
flaltant'toujours d'avoir attiré asa suite le prince
de Schwarzenberg, et autorisé
a
le croirc par
les rapports de ses Iieulenants, qui , sous
l'impression de Ja journée d'Arcis-sur-Aubc,
s'imaginaient voir autour d'eux des masses
innombrables d'ennemis. Du reste il était résolu
a
s'en assurer d'une maniere positive, en abor–
dant de tres-pres, a la premiere occasion , la
nombreuse troupe de cavalerie qui s'était atta–
chée
a
ses pas. Pendant ce temps,
M.
de CauJain–
court, inconsolable de Ja rupture des négocia–
tions, insistait pour qu'on essayat de les rouvrir,
a
quoi Napoléon ne paraissait guere disposé.
Une circonstanee favorable s'était offerte pour–
tant, et
M.
de Caulaincourt lui avait fait une
sorte de violence pour l'amener
a
Ja mettre
a
profit. Le général Piré, battant l'estrade avec Ja
cavalerie légere, avait fait prisonniers le baron
de Wessenberg, et
f\I.
de Vitrolles Jui-merne qui
revenait de sa mission auprcs du comte d'Artois,
mais qu'heureusement pour luí on ne rcconnut
point.
M.
de Caulaincourt, sccondé par Berthier,
avait obtenu qu'on renverrait
l\'I.
de Wesscnberg
libre avec une Jettre pour le prince de
l\f
etter–
nich, daos laquelle M. de Caulaincourt affirmerait
que Napoléon était enfin résigné a de grands
sacrifices, sans toutefois dire lesquels. C'est tout
ce que
M.
de Caulaincourt nvait pu arracher
a
son maitre, bien qu'il et"1t voulu donner un peu
plus de précision
a
ces nouvelles ouvertures , afin
de les faire accueillir. Délivré
a
condit.ion de
remplir cette mission ,
l\I.
de Wessenberg s'en
était chargé, et fai sant passer M. de Vitrolles
pour un de ses domestiques, l'avait sauvé du
plus grand des périls.
Le 26, l'occasion d'une forte reconnaissance
s'étant présentée, Napoléon n'avait cu garde de
la laisser échapper. Tandis qu'il était entre
Saint-Dizier et Vassy sur Ja gauche de la Marne,
remplissant de ses partís le pays entre la Marne
CONSULAT.
5.
et l'Aubc, il avait
aper~m
une cavalerie tres–
nombreuse sur la rive droite de la l\farne, un
peu irn-dessous de Saint-Dizier, daos la direc–
tion de Vitry. A la vue de l'ennemi se montrant
en force, il n'y avait pas
a
hésiter; i1 fallait
rnarcher
a
luí pour le battre d'abord, et ensuite
pour savoir qui cet enncmi pouvait etre. Malgré
le grave inconvénient de traverser une rivicre
devant une troupe en bataille, on marcha droit
au gué d'Hcericourt, on y franchit la Marne en
masse,
a
l'exception du corps d'Oud ínot
qu~
fut
envoyé un peu au-dessus' pour la passer
a
Saint-Dizier. L'ennemi fut embarrassé en recon–
naissant que c'était
a
l'armée
fran~aise
tout
cntiere qu'il avait affaire. Néanmoins
il
avait
1
O mille chevaux et quelques milie hommes
d'infanterie légcre, et il les
lan~a
sur nous au
moment ou nous traversions la Marne. On
re~ut
les uns et les autres comrne
i1
convenait. La
cavalerie de la garde, apres s'etre melée avec
les escadrons ennemis, les mil en complete
dérou te. Ils furent obligés de se replier, et
Wintzingerode, car c'était lui , voyant qu'il s'était
cngagé fort imprudemment, résolut de gagner
la route de Bar-sur-Aube, malgré l'inconvénient
de défiler a portée de Saint-Dizier qu'Oudinot
venait d'occupcr. On chargea
a
outrance l'ennemi
en retraite, et tandis qu'il était vivcment poussé
en queue, il fut pris en flanc par notre infanterie
qui débouchait de Saint-Dizier. Dcux bataillons
d'infanterie ayant voulu se formcr en carré, le
brave Letort fondiL sur eux
a
la tete des
dr~gons
de la gar<le, et les coucha par terre. L'élan était
tel que les dragons continucrent lcur coursc
sans s'inquiéter des fantassins russcs ·qu 'ils
avaient enfoncés et dépassés. Ces derniers, qui
avaient paru se rendre, voyant les dragons
parlis, essayerent de se relever, et tirereut sur
eux par derriere. Nos cavaliers alors, rebrous–
sant chcmin, les sabrerent impitoyablement.
Cette poursuite dura jusqu'a la nuit, et on revint
a
Saint-Dizier apres avoir tué ou pris a l'arriere–
garde de Wintzingerode, cbargée de nous suivre
et de nous tromper, environ 4 mille hommes et
trente bouches
a
feu.
11
nous en avait
a
peine
co'IHé 5 ou 4 cents hommes, brillant trophée,
le dernier, hélas, de cette hérolque et fatale
campagae
!
Le Jcndemain 27, Napoléon informé que
l'ennemi lcnait encore Vitry, s'en approcha pour
l'enlever. l\fais un vieux mur un fossé plcin d'eau,
opposaient un obstacle a scz difficile
a
vaiocre.
Macdonald, que nos récents malheurs avaient
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