PREl\HERE ABDICATION. -
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tSU.
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.En ce moment se passait
a
Vincennes un fait
a
jamais glorieux pour ·1a jeunesse francaise. En
avant de la barriere du Treme se
tro~vait
une
batteric scrvie par des vétérans et par les éleves
de l'Écolc polytechniqnc, que l\Iarmont, cxclusi–
vement occupé de ce qui se passait sur le plateau
de Romainville, avait prcsque laissée sans appui. ·
Cctte hatterie s'étant cngagée trop avant sur
l'avenuc de Vinccnnes, afirl de tirer contre la
cavalerie de Pahlen, fut tournée par quelques
escadrons qui, passant par Saint-Mandé, vinrenl
la prendre
a
rcvcrs. Les braves élcves de l'École,
abrés sur leurs pieces, résisterent vaillammcnt,
et furent heurcusement secourus par la garde na–
tionale postée
u
la barriere du Trone, et par un
détachement dcdragons. Ces dernicrs, s'élarn;ant
sur les pieces, parvinrent
a
les reprcndre. On
ramena la ba tterie sur les hauteurs de Charonne,
et la, aidés d'une foulc d'hommes du peuple
armés de fusils de chassc, nos braves jeuncs gens
continuerent
a
fairc un fcu meurtrier.
La clef de toute la positfon était
a
Belleville :
tant que ce point culminant de la chalne des
hauteurs n'était pas emporté, la massc cnncmic
qui combattait au nord, devant la Villettc, la
Chapclle et l\fontmartrc, celle qui combattait au
sud, entre Vincennes et Charonne, ne pouvaient
pas faire de progres sérieux. La ligne courbe des
alliés était commc arretée vcrs son milicu,
a
un
point fixe qui était Belleville. Belleville en efl'et
domine le plateau deRomainville lui-mernc. Des
clOtures nombreuses, jointcs
a
l'avantage de la
position, y rendaient la résislance plus facile.
l\farmont, établi en cet cndroit avec les débris
des divisions Lagrangc, Ricard, Padoue, Ledru
des Essarts, disposant en outre d'une nombreuse
artillerie de campagne,
y
tenait ferme contre
une multitude d'assaillants,et il avait fait répon–
dre. au message de Joseph qui autcirisait les ma–
récbaux a traiter, que jusqu'ici
i1
n'était pas
encorc réduita se rendrc. L'officierdu maréchal,
porteur de cettc réponse, avait trouvé J oscph
parti, et
il
était revenu sans avoir pu rcrnplir sa
mission.
Cependant l'heure
fa
tale approcbait. Le prince
de Schwarzenberg ne voulan t pas finir la
j
ournée
sans avoir enlevé le point décisif, avait ordonné
d'y diriger deux colonnes d'attaque, une au 'sud,
qui passant entre l\fénilmontant et le cimetiere
du Pere Lachaise, s'emparerait du boulevard
extérieur, et séparerait ainsi Belleville de l'en–
ceinle de Paris; une au nord, qui serait chargée
d'emportcr
a
tout prix les Prés Saint-Gervais;
la Pclitc-Villette, la buttc Saint-Chaumont, et
viendrai t par le nord donncr la main
a
la colonne
qui aurait passé par le sud.
Vaincre ou périr était dans ce moment la loi
des coalisés, et
i1
lcur fallait forcer tous les
obstaclcs sans aucunc perte de temps, car
a
chaquc instant Napoléon pouvait survenir, et
s'il les cut trouvés repoussés de Paris, il les au–
rait cruellemcnt punis d'avoir osé s'y montrer.
Vers trois hcures de l'apres-midi l'action recom–
rnen9a violemment. Le chef de bataillon d'artil–
lerie Paixbans, qui prouva dans cettc journée ce
qu'on aurait pu faire avec de la grosse artillerie
bien postéc, avait placé huit pieces de gros cAli–
bre au-dcssus de Cbaronne, sur les pentes de
l\lénilmontant, quatrc sur le revers nord de Bel–
leville, et huit sur la buttc Saint-Chaumont. 11
était pres de ses pieces chargées
a
mi traille, avec
ses canonniers les uns vétérans, les autres jeunes
gens des Écoles, et attendait que l'ennemi, mai–
trc de la plaine, essayat d'aborder les bauteurs.
En eífet les grcnadiers russes s'avancent les uns
au sud du plateau par Charonne, les autres sur
le platcau meme en face de Belleville, les autres
enfin au nord,
a
travers les Prés Saint-Gervais.
Tout
a
coup ils sont couverts de mitraille ; des
lignes entieres sont renversées. Pourtant ils sou–
tiennent le fcu avec constancc, gravissent au sud
les pentes de Ménilmontant, et vicnnent par le
boulevard cxtérieur prendre Belleville
a
revers,
Belleville ou le maréchal l\farmont se défend
avec acharnemcnt. L'autrc division de grena–
dicrs, qui avec les Prussiens et les Badois atta–
quait Pantin, les Prés Saint-Gervais, la Petitc–
Villctte, et les avait arrachés aux divisions Boyer
et Michel presque détruites, gravit la butte Saint–
Chaumont sous le feu plongeant des batteries
du commandant Paixhans, cmporte la bi.Itte qui
faute de troupes n'était pas défendue par de l'in–
fanterie, et se joint a la colonne qui arrive du
revers sud par Charonne et Ménilmontant. Les
ennemis, ayant gagné le boulevard extéricur par
ses deux pentes nord et sud, se trouvent ainsi
entre Bellcville et la barriere de ce nom, qu'ils
sont pres d'enlever.
A
cettc nouvellc le maréchal l\farmont, qui
n'avait pas cessé de se maintenir
a
Belleville, se
voyant coupé de l'enceinte de Paris, réunit ce
qui luí reste d'hommes, et ayant
a
ses cotés les
.généraux Pelleport et l\feynadier, le colonel
Fabvier, fond l'épée a la main sur
l~s
grenadiers
russes qui commern;aicnt a pénétrer dans la
grande rue du Faubourg du Temple. 11 les re-
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