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LIVRE CINQUANTE-TROISIEl\IE.
et Noisy. Au meme instant la division Ledru des
Essarts se logea dans le bois de Romainvillc, qui
couvre le flanc des hauteurs du coté de la plaine
Saint-Denis. Marmont distribua ensuite ses
troupes de la maniere suivante. Il avait
a
sa
disposition l'unc des dernieres divisions tirées
des dépots de Paris, sous le duc de Padoue, ses
anciennes divisions Lagrange et Ricard, le ras–
semblemcnt du général Compans qu'on lui avait
adjoint la veille, et enfin quelque cavalerie sous
les généraux Chastel et Bordessoulle. Il laissa sa
cavalerie entre Charonne et Vincennes, avec
mission de défendre le pied des hauteurs du coté
sud, et de couvrir la barriere du Trone;
il
pla<¡a
le duc de Padoue
a
sa droite, sur le bord extréme
du plateau dé Romainville, dans les plus hautes
maisons de Bagnolet et de Montreuil, qui sont
baties en amphithéatre sur le revers méridional,
ayant besoin de soleil pour leurs arbres fruitiers.
Jl
rangea sur le plateau méme et au centre la
division Lagrange, adosséc aux maisons de
llellc–
ville,
la
division Ricard
a
gauche dans le bois
de Romainville, enfin, sur le penchant nord, la
divisiou Ledru des Essarts, du corps de Com–
pans, et au pied dans la plaine, aux Prés Saint–
Gervais, la division Boyer de Rebeval. La divi–
sion l\fichel, qui attendait le maréchal l\lortier
pour se ranger sous ses ordres, gardait en son
absence la Grande et la Petite-Villette.
La fusillade et la canonnade avaient do bonne
heure révéillé Paris, qui du reste n'avait guere
dormí, et Joseph, accompagné du ministre de la
guerre, du ministre de la police, des directeurs
du génie et de l'artillerie, avait établi son quar–
tier général au sonJmet de la butte l\font–
martre.
Barclay de Tolly, convaincu que lorsquc le
prince royal de Wurtemberg au sud, lllucheJ'
au nord, seraient entrés en ligne, le combat tour–
nerait bientot
a
l'avantage des alliés, ne voulu t
cependapt pas laisser aux défenseurs de Paris le
premier succes de la journéc.
n
résolut en con–
séquence de reprendre le plateau de Romainville,
et
il
y employa une partie de ses rése11vcs. Ces
- réserves se .composaient des gardes
a
pied et
a
cheval, et des grenadiers réunis. Le général Pas–
kewitch dut, avec une brigade de la 2° division
des grenadiers, gravir le platcau par Rosny;
il
dut aussi l'attaqucr pqr le sud, en s'y portant
par l\fontreuil avec
la
seconde brigade de celte
2° division, et avec la cavalerie du comte Pahlen.
La
1r
0
division des grcnadiers
fut
confiée au
prince Eugene de \Vurtemberg, pour assaillir
Pantin et les Prés Saint-Gervais dans la plainc
au nord.
rette att.aque, conduite avec vigueur, eut un
commencement de succes. Le général Mezenzoff,
qui avait été repoussé le matin, renforcé par les
grenadiers, remonta sur le plateau malgré
la
division Lagrangc, et parvint
a
l'occuper. Adroite,
la 2° brigade des grenadiers, apres avoir tourné
le plateau par Montreuil et Bagnolet, obligea la
division du duc de' Padoue, en la débordant,
a
rétrograder. Nous perdimes done du terrain ,
bien que nos soldats résistassent avec une bra–
voure désespérée soit au nombre, soit a la qua–
lité des troupes qui étaient les plus aguerries de
la coalition.
Cepcndant, tout en perdant du tcrrain, nous
contenions l'ennemi. En effet, les cuirassiers
russes, amenés sur le plateau, essayerent de
charger notre infanterie, furent couverts de mi–
traille, et arretés par nos ba'ionnettes. A mesure
qu'on se retirait de Romainvi!le sur Belleville,
le plateau se resserrant, nos troupes avaient
l'avantage de se concentrer. A droite nous trou–
vions l'appui des maisons de Bagnolet,
a
gauche
celui du bois de Rom'ai·nville, et nos soldats, se
dispersant en tirailleurs, faisaient essuyer aux
assaillants des pertes nomhreuses. Not1'e artille–
rie, favorisée par le terrain, parce que le pl.ateau
s'élevait en rétrogradant vers Belleville, vomis–
sai t la mitraille sur les grenadiers russes; et
a
chaquc instant renversait parmi cux des ligues
entieres. Pendant ce temps les jeunes soldats de
Ledru des Essarts avaient reconquis arbre par
arbre le bois de Romainville, et débordé ainsi
les troupes russes qui avaient occupé la largeur
du plateau. Au pied meme du plateau, vers le
coté nord, le général Compans était resté maitrc
de Pantin avec le secours de la division Boyer
de Rebeval, et des Prés Saint-Gervais avec le
sccout·s de la division Michel. 11 avait meme re–
jeté au dela des deux villages le prince de Wur–
tcmbcrg qui avait tenté de s'en emparer a la tete
de la
1
re
division de grenadiers.
Le maréchal Mortier s'établissant enfin dans
la
plaine Saint-Denis, avait placé les divisions
Curial et Charpentier de jeune garde
a
la Vil- .
lette, la division Christiani de vieille garde
a
la
Chapelle, et sa cavalcrie au pied méme de Mont–
martre.
Il était dix heurcs du matin, et si nous avions
cu, indépcndamment des troupes qui couvraient
le pourtour de París, une colonne de
1
Omille
soldats aguerris pou.r prendre l'ofl'ensive, nous