PRE.l\IIERE ABDICATION. -
ilIARS
1814.
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il ne lui fallait pas plus de deux jours pour fran–
chir la distance d'Arcis ·a Vitry. (Voir la carte
nº 62.) De Vitry il lui était facile de se porter a
Bar-le-Duc, et sans qu'il
fit
un pas de plus, les
garnisons de Metz, de Mayence, deLuxembourg,
de Thionville, de Verdun, de Strasbourg, avaient
la possibilité de le joindre au nombre de trente
et quelques mille hommes. Si Napoléon se por–
tait jusqu'a Metz, ce qui n'e'xigeait que trois
journées, il pouvait, en pivotant autour de cette
place, faire insurger la Lorraine, l'Alsace, la
Franche-Comté, et recevoir des Pays-Bas 1
l'S
milie
hommes encore. 11 devait done se trouver
a
l\Jetz a la tete de 120 mille combattants, au mi–
lieu de provinces soulevées contre l'ennemi, et
si le maréchal Suchet, envoyé pour remplacer
Augereau, reeueillant tout ce qui était sur son
chemin, remontait sur
Besan~on
avec 40 mille
hommes, les destinées devaient certainement
etre changées.
Napoléon manda
a
Paris ses derniercs résolu–
tions, prescrivit qu'on lui expédiat en matériel
d'arlillerie, en bataillons de la jeune garde, en
bataillons tirés des dépóts, tout ce qui ne serait
pas indispensable a la défense de la capitale; re–
commanda de nouveau de ne pas se troubler si
l'ennemi approcliait, ce qui, selon luí, ne pouvait
etre qu'une apparition de deux ou trois jours,
car les aUiés le suivraient des qu'ils le sauraient
sur leurs communications. Il renouvel::t aux ma–
réehaux Marmont et l\fortier l'ordre de lejoindre
sur la l\farnc par Chalons, et se mit ensuite en
route pour Vitry. Précédemment il n'avait ja–
mais quitté la Seine sans laisser de Nogent a
l\fontereau des corps respectables. Ce n'était plus
le cas eette fois, puisqu'il était obligé d'exécutcr
en masse la diversion projetée sur les derríercs
de l'ennemi, et que c'était sur cctte díversion
scule qu'il comptait désormais pour sauver Paris.
20 mille hommes laissés entre Nogent et París
n'eussent pas arreté le prince de Sehwarzenbcrg,
et eussent manqué
a
Napoléon dans les opéra–
tions qu'il méditait. Toutefois, croyant utile de
garder les ponts de la Seine, et possible d'y ar–
reter l'ennemi quelques hcures, ce qui dans
certains cas n'était pas indiffércnt, il laissa le gé–
néral Souham avec un mélange de gardes natio–
nales et de bataillons organisés a la bate, pour
disputer Nogent, Bray, Montereau. Le général
Alix qui, avec des forces de cette composition,
avait si bien défenélu Sens, et qui s'y trouvait
encore, fut placé sous les ordres du général
Souham.
Le trajel d'Arcis
a
Sommepuis s'opéra sans
difficulté. Apeine rencontra-t-on quelques bandes
de Cosaques qui voltigeaient entre l'Aube et la
Marne, et pillaient le pays, tout ruiné qu'il était.
Les corps d'Oudinot, de l\facdouald, de Gérard,
qui avaient marché de Provins sur Arcis, en
cótoyant l'Aube, défendirent successivement la
riviere au pont d'Arcis, et défilerent ainsi en vue
de I'ennemi sans en recevoir aucun dommage.
Le
2·1
au soir Napoléon, avec une partie de
l'arméc, coucha a Sommepuis. (Voir la carte
nº 62.) Le lendemain, 22,
il
marcha sur Vitry
avec une avant-garde. Vitry avait été mis en état
de défense par l'armée de Silésie, et cinq
a
six
mille Prussiens et Russes, protégés par des ou–
vrages de campagne, l'occupaient. Napoléon, ne
voulant pas risquer une affaire meurtriere pour
un poste qui n'avait pas d'importance,
fit
cher–
cher un gué entre Vitry et Saint-Dizier. On en
découvrit un
a
Frignicourt, et
il
y passa avec sa
cavalerie et les divisions de jeune garde du ma–
réchal Ney. Il laissa un délachement pour garder
ce gué, et
il
vint coucher au cbateau du Plessis
pres Orconte. Il
lan~a
sur Sainl-Dizier la cava- _,,
Jerie Iégere du général Piré, qui réussit a y en–
trer, et y enleva deux bataillons prussiens.
Le lendemain 23, Napoléon jugea convenable
de s'arreter a Saint-Dizier pour y attendre la
qucue de ses colonnes, car Oudinot, Macdonald,
Gérard étaient en arriere, et il voulait également
rallier Marmont et Mortier, qui avaient ordre de
venir
a
lui par Ch:ilons. Il fallait attendre aussi
la
division de gardes nutionales du général
Pacthod qui avait bien servi avec Oudinot et
Macdonald, et qu'on avait laissée a Sézanne pour
escorter un dernier convoi de troupes et de ma–
téricl. Toutefois, ayant des doutes sur la possibi–
li té de recueillir ce dernier rassemblement,
Napoléon ordonna au ministre de la guerre de
veillcr asa sureté, et de le rappeler meme a Paris
si on ne croyait pas qu'il lui füt possible de
percer jusqu'a Vitry a travers les masses enne–
mies.
Sans perdre un instant Napoléon poussa sa
cavalerie légere sur Bar-le-Duc, afin qu'elle s'em–
parat du pont de Saint-Mihiel sur la l\fouse, de
celui de Pont-a-Mousson sur la l\foselle, et
il
expédia de nouveau
a
toutes les garnisons l'ordre
de le rejoindre. 11 s'appretait a leur épargner la
moitié du chemin , en marchant encore une
journée ou deux
a
leur rencontre, et il allait
ainsi voir ses forces augmenlcr d'heure en heure.
Sans les maréchaux l\fortier et Marmont, sans le
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