PREMIERE ABDICATION. - rtvRIER 181.4.
45?:i
On a vu précédemmcnt quellc avait été la
position des maréchaux Mortier et Marmont,
pendant que Napoléon revenait de la Marne sur
la Seine pour livrer les combats de Nangis et de
l\fontereau. Le maréchal l\fortier, envoyé a la
suite d'York et de Sacken sur Soissons, n'avait
pu atteindre ces deux généraux, qui s'étaient
dérobés par leur droite et sauvés sur Chalons,
mais
il
avait repris Soissons tombé un moment
dans les mains des alliés. D'apres l'ordre de Na–
poléon, qui le rappelait sur la Marne, il était
revenu sur Chateau-Thierry, et s'y trouvait le
jour meme ou Blucher
commen~ait
l'exécution
de ses nouveaux projets. Quant au maréchal
Marmont, placé entre Étoges et l\fontmirail, de
maniere a se lier d'un cóté avec le maréchal
l\fortier sur la l\Iarne, de l'autre avec Napoléon
sur l'Aube,
il
avait succcssivement occupé Éto–
ges, Montmirail et Sézanne. Ayant vu Blucher
passer l'Aube a Anglure le 24, et revenir le 2o
sur Sézanne, il s'était retiré en bon ordre sur
Esternay, derriere le Grand-Morin , apres avoir
tue quelques hommes
a
l'ennemi sans en avoir
perdu lui-meme. Sa conduite était désormais
toute tracée·, c'était, en se voyant séparé de Na–
poléon par le mouvemeot de Blucher, de se
replier sur la Marne, de s'y joindre au maréchal
Morticr, et de disputer avec lui le terrain pied
a
pied, jusqu'a ce que Napoléoo put venir
a
leur
secours. Il avait done mandé a Mortier, qui se
trouvait
a
Chateau-Tbierry, de se diriger vers la
Ferté-sous-Jouarre pendant qu'il s'y rendrait de
son cóté, ctil avaitinformé Napoléon de ce qui se
passait, en le priantd'accourir le plus tót possible.
Le 26 au matin, Blucher ayant recommencé
sa poursuite, l\farmont continua son mouvement
rétrograde jusqu'a la Ferté-Gaucher, puis tirant
sur la
~Ia rne
il prit le chemin de Ja Ferté-sous–
Jouarre. (Voir la carte n° 62.) Blucher le suivit
comme la veille sans pouvoir l'atteindre, et, en
le voyant se diriger sur la Ferté-sous-Jouarre au
lieu d'aller
a
Meaux, tomba dans de grands
doutes. 11 ne comprit pas que Marmont, allant
a
la Ferté-sous-Jouarre de préférence
a
Meaux:
ce qui l'éloignait de Paris, devait avoir un grave
motif pour agir de la sorte, et que ce ne pouvait
etre que le désir d'etre plus tót réuni
a
l\fortier;
que des lors, en abandonnant aux deux maré–
chaux l'avantage de leur réunion, qu'on ne pou–
vait plus lcur díspu ter, il fallait au moins son–
ger
a
les couper de Paris, et pour cela courir
soi-meme
a
Meaux. Il ne
fit
pas cette réflexion
si simple , et, quoique arrivé de tres-bonne
heure
a
Jouarre, et pouvant encore occuper
Meaux avant Ja nuit,
il
perdit la soirée
a
cher–
cher ce qu'il ne devinait pas, sous le prétexte,
si souvent allégué par les généraux qui ne savent
pas le prix du temps , d'accorder a ses troupes
un repos nécessaire.
Le lendemaio 27 février, comprenant enfin
que les deux maréchaux, maintenaot r.éunis
a
la
Ferté-sous-Jouarre , devaient avoir grand souci
de gagner Meaux afio de se retrouver sur la
route de París, il dirigea Sacken par sa gauche
sur Meaux meme, et poussa Kleist droit devant
lui s0r Sammeron, pour y franchir la Marne au
moyen d'un équipage de pont qu'il trainait a sa
suite. Outre le motif d'intercepter la route de
París sur l'une et l'autre rive de la 1'1arne,
il
avait
celui de passer cette riviere avee le gros de ses
forces, et de s'en couvrir, dans le cas fort pro–
bable ou Napoléon abandonnerait I'armée de
Boheme pour courir apres l'armée de Silésie.
Mais les deux maréchaux
fran~ais
étaient plus
alertes que Blucher' et tandis qu'il avait
a
peine
arreté ses résolutions le 27 au matin, ils étaient
a ce meme moment en pleine marche sur Meaux,
afin de repreodre lcurs communications avec
París, que le besoin urgent d'opérer leur jone–
tion les avait contraints de négliger un instant.
lls ne comptaient pas a eux deux, apres leurs
fatigues et leurs pertes,'plus de 14 mille hommes,
d'excellente qualité,
il
est vrai, mais c'était bien
peu pour se faire jour
a
travers une armée de
oO
mille ennemis, qu'ils pouvaient trouver sur Ja
route de Meaux. I-Ieureusement, ils s'y prirent
pour réussir avec autant d'adresse que de promp–
titude.
La l\'Jarne, entre la Ferté-sous-JouarreetMeaux,
décrit une multitude de contours, dont la route
de Paris rencontre le bord, conúne une tan–
gente touchant successivement a plusieurs cer–
cles. (Voir la carte n° 62.) A Trilport cette route
rencontre l'un de ces contours, franchit laMarne,
et vient ensuite aboutir a Meaux. Les deux ma–
réchaux étaient partis bien avant Je jour, pour
atteindre le pont de Trilport., l'occuper, traver–
ser la Marne, et s'emparer de i\Ieaux . De plus,
voulant aussi occuper Ja route de Paris qui suit
la rive droile de la l\[arne, ils avaient jeté le
général Vincent sur cette rive, par le pont de la
Ferté-sous-Jouarre, et lui avaientordonné d'aller
se placer derriere l'Ourcq, qui, aux environs de
Lizy, s'approche tres-pres de Ja Marne sans s'y
réunir pourtant, et forme avcc elle une Jigne de
défense presque continue. Établis ainsi derriere
•
•