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LIVRE CINQUANTE-TROISIEME.

France de sérieux dangers pour l'équilibre

général.

Ce traité fut signé au milieu de la joie des

coalisés, tous fort contents d' etre solidement

liés et largement subventionnés, excepté l'Au–

trichc pourtant, qui tout en voyant dans la nou–

velle alliance de précieuses garanties contrc les

entreprises de la France en Italie, n'en voyait

pas autant contre les prétentions de la Russie en

Pologne et en Orient. Lord Castlereagh ne borna

pas la ses travaux. Il proposa et

fit

adopter Ja

résolution Cle persévérer pendant quelque temps

encore, mais pendant un ternps limité,

a

négo:–

cier a Chatillon. On avait offert la paix

a

Napo·

léon, a la condition du retour de la France a ses

anciennes limites, et, pour etre conséquent avec

soi-meme, on devait, s'il se résignait, traiter

avec luí. D'ailleurs les stipulations de Chau–

mont, eº donnant vingt ans de durée

a

la coali–

tion, rassuraient contre les tentatives qu'il pour–

rait faire a }'avenir pour reprendre ses anciennes

conquetes. l\fais s'il prolongeait les négociations

avec l'intention évidente d'occuper les puissan–

ces et de se jouer d'elles, on devait lui fixer un

délai apres Iequel on déclarerait les négocia–

tions rompues, et on proclamerait la résolution

définitive de ne plus avoir de relations avec lui,

ce qui serait une véritable déchéance prononcée

par l'fütrope. Jusque-Ia rien de contraire a sa

dynastie ne dcvait etre souffert, et le comte

d'Artois en Franche-Comté, le duc d'Angouleme

en Guyenne, devaient etre éloignés des quar–

tiers généraux des puissances belligérantes.

Ces mesures, du point de vue des coalisés,

étaient si bien calculées, qu'elles re¡;urent un

prompt et universel assentiment. C'est par elles

que lord Cnstlereagh consacra son influence per–

sonnelle, et surtout l'influence de son pays dans

la coalition européenne. Aussi écrivit-il a son

cabinet que sans doute cet ensemble de mesures

coti.terait cher

a

l'Angleterre, mais qu'il était sur

d'etre approuvé d'elle, car

il

s'était agi de prcn–

dre ou de laisser échapper le premier role, et

qu'il s'était háté de le prendre quoi qu'il pti.t en

COUler

/lUX

finances britanniques. 11 n'avait cer–

tes pas

a

craindre d'etrc désavoué, quelle que

fút la somme de millions promise. L'Angleterre

a toujours su payer sa grandeur, et s'est rare–

ment trompée sur ce qu'elle valait.

Aussitót ces mesures arretées, l'ordre fut en–

voyé aux plénipotentiaires des quatre cabinets,

de signifier

a

1\1.

de Caulaincourt qu'on attcndait

la réponse de

la

France; que si les préliminaires

proposés ne lu.i convenaient pas, elle n'avait qu'a

en présenter d'autres, qu'on les examinerait dans

un esprit de conciliation, pourvu toutefois qu'ils

ne s'écartassent pas sensiblement des príncipes

posés; mais qu'au dela d'un certain temps, on

déclarerait le congrcs de Chátillon dissous, et

toute négociation définitivement abandonnée.

A peine Blucher et ses conseillers, Gneisenau,

Mufiling et autres, eurent-ils appris Ja résolution

adoptée de les laisser libres, et de les renforcer

de

!JO

mille hommes, qu'ils corn;urent de nou–

veau l'ambition, qui déja leur avait été funeste,

d'entrer les premiers

a

Paris. Ils examinerent

a

peine s'il ne vaudrait pas mieux, avant d'entre–

prendre ce nouveau mouvement offensif, alteo·

drc la jonction des

oO

mille hommes qu'on leur

destinait, et ils prirent sur-le-champ le parti de

se porter en avant, mais en obliquant

~égere­

ment a droite, c'est-a-dire en se dirigeant vers

la l\Iarne, ou ils devaient rcjoindre un peu plus

promptement Bulow et vVintzingerode qui

étaient _en marche, l'un vers Soissons, l'autrc

vcrs Reims. Dans leur fiévrcuse impatiencc, ils

aimaient mieux les rallier chemin faisant, quel–

que danger qui put résulter de leur marche

isolée, que les attendrc daos le voisinage du

prince de Schwarzenberg, ou les armées de Silé–

sie et de Boheme pouvaient se préter un secours

mutuel. Ils se disaient, a la vérité, que de cette

fa¡;on ils attireraient Napoléon

a

cux, et déga–

geraient le princc de Schwarzenberg, mais ils

n'ajoutaient pas que c'était au risque de se com–

promettre eux-memes beaucoup en ledégageant.

De plus, ayant vu courir sur Jeurs flanes quel–

ques troupes Jégeres, ils cspéraient en se por–

tant vers la Marnc rencontrcr peut-etre les

maréchaux l\farmont et Mortier isolés de Napo–

Jéon, et trouver ainsi l'occasion de se venger de

Ieurs

récent~s

üéfaites. Ce qu'ils ne disaient pas,

c'est que les mouvements des corps fran¡;ais

étaient calculés autrement que ceux des corps

alliés, et qu'ils ne donnaient pas Ja meme prise

aux hasards de la guerre.

Qµoi qu'il en soit, le 24 février, Blucher, qui

s'était porté jusqu'a l\'léry, rcpassa l'Aubc

a

An–

glurc, et se mit en route pour Sézanne. Sentant

confusément le danger de cette marche, il fit

dire au prince de Schwarzenberg qu'il allait,

pour le dégager, s'exposer a bien des périls, et

qu'il le priait instamment, aussitót qu'il serait dé–

bnrrassé de la présence de Napoléon, de se rcpor–

ter en avant pour rendre a l'armée de Silésie le

service que l'arméc de Boheme allait en rccevoir.