PfiEMIERE ABDICATION. -
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son protégé Bernadotte, grande chance de faire
accueillir.
Alexandre écouta ce qu'on lui dit avec beau–
coup de satisfaction et de faveur. Quelques
jours s'étaient écoulés depuis les échecs de Nan–
gis et de Montereau, et sa vive imagination, re–
mise des fortes impressions qu'elle avait éprou–
vées, s'enflamma de nouveau des qu'on Jui
montra la perspective d'cntrer
a
Paris. 11 agréa
les propositions de Blucher, et provoqua un
conseil des coalisés pour les mettre en discus–
sion.
Ce
conseil, auqucl assisterent outre les
trois souvcrains, MM. de Metternieh, de Nessel–
rode, de Hardenberg, Casllereagh, le prince de
Schwarzenberg et les principaux généraux de la
coalition , fut fort animé. Alexandre attaqua
l':wmistice et
le
systeme
de
la temporisation,
insista sur la nécessité de pousser vivcmcnt Ja
guerre, et déelara que, quant
a
lui,
il
était prét
h
la continuer avec son ti.dele allié Je roi
de
Prusse, si ses autres alliés l'abandonnaient,
a
quoi l'empereur Franc;ois répondit en dcman–
dant si on ne Je rangcait plus dans le nombre
des alliés sur lesquels on avait raison de comp–
ler . La-dessus on se tendit la main, et on con–
vint de la nécessité d'agir promptement et vi–
goureusement, de maniere
a
ne Jaisser aucun
répit
a
l'ennemi commun. Aprcs quelques expli–
cations on se· trouva pl us d'aecord qu'on ne
l'avait espéré. De part et d'autre on rcconnut
que l'armistice ne compromettait rien, puisqu'il
ne suspendait pas
mcm~
les hostilités, et que
toute stipulation qui directement ou indirecte–
menl aurait pu déroger aux p1·opositions de
Chatillon avait été soigneusement écartée. Il n'y
avait done rien de changé a la situation des
puissauces alliées. On s'arrctait,
il
est vrai,
u
Chaumont, mais par une prudence toute simple,
pour se tenir
a
quelque distanee de Napoléon,
pendant qu'on s'affaiblissait pour expédier sur
Dijon des secours reconnus indispensables au
comte de Bubna. Du reste, la formation d'une
armée puissante qui pourrait agir sur les flanes
de Napoléon, et le ramcncr en arriere, était une
.bonne mesure, qu'il n'y avait aucunc raison de
1ie pas prendre, si l'on en avait le moyen. Des
lors accorder au maréchal Blucher la liberté de
. ses mouvements, et Je renforcer jusqu'a doubler
so.n armée, si on le pouvait, ne faisait objection
" dans Pesprit de personnc. La diffieulté consistait
~-ñiq"Q.ei.nent
a
priver le jaloux et susceptible
. B~rl:ra-.dotte.
d~
deux corps qui conslituaient la
. . ineiJléute partie des forces placées sous son
..
: _
commandcment. Déja
il
s'était plaint, avait memc
proféré des menaces, plll·ce qu'on ne semblait
pas estimer assez haut ses services, et avait laissé
entrevoir qu'il pourrait bien rentrer sous sa
tente, et s'y croiser les bras. Diverses causes lui
avaient inspiré ces dispositions chagrines. L'Au–
triche n'avait cessé de protéger le Danemark
contre la Suede, et on avait refusé d'admettre
au coogres de Chatillon un plénipotentiaire sué–
dois. Quant
a
ce seeond point, on se souvient
sans doute que l'Angleterre, la Prusse, la Russie,
l'Autriche, avaient reQu pouvoir de traiter pour
tous les coalisés, grands et pctits, et vraiment le
prioce Bernadotte par sa personne ne donnait
pas asscz d'imporlance
a
la Suede, pour qu'on
accordat
a
celle-ci le role de sixieme grande puis–
sance. A ces deux causes
de
mécontentement s'en
joignait une troisieme, plus agissante quoique
moins avouée. Le ministre d'Angleterre, sondé
plusieurs fois sur les projets de la coalition
a
l'égard du tróne de France, avait dit netlement
au curieux BernadoUe, que les puissances ne
faisaient point Ja guerre pour substituer une
dynastie
a
une autre, que les questions de gou–
vernement intérieur ne les regardaient point, et
qu'elles laisseraient Ja France décider de son
sort dans Je cas ou une nouvclle révolution vien –
drait
}1
éclater chez elle , mais que, pour ce qui
les regardait, les Anglais considéraient les Bour–
bons; comrne pouvant seuls rcmplaeer convena–
blement les Bonaparte. L'humeur du nouveau
Suédois, qui auratt bien voulu redevenir Fran-
9ais pour régner sur la France, était visible de–
puis Jors, et se manifcstait
a
chaque instant pour
la moiodre contrariété. On ne Je redoutait pas
sans doute, mais pourtant un trouble quelconque
l:lans les affaires de
Ja
eoalition, pendant qu'elle
avait toutes ses forces oceupées devant Napo–
léon
>
était une chose de quelque importance, et
on craignait de s'exposer
a
des difficultés en
ótant
[1
Bernadotte la portion la plus eonsidérable
de son armée.
On n'était arrcté que par cette crainte, et
Alexandre, malgré son désir de satisfaire le
bouillant Blucher, hésitait avec les autres mem–
bres du conseil, lorsque lord Castlereagh se Je–
vant soudaioement, et agissant comme une sorle
de providence qui disposait de tout, demanda
aux militaires si véritabfoment ils regardaient
l'adjonetion des corps de Bulow et de Winlzin–
gcrode
a
l'arméc de Silésie comme nécessaire.
Ceux-ci ayant répondu affirmativement,
il
dé:
clara qu'il se chargeait d'aplanir toutes les diffi-