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LIVRE

QUARANTE-HUITIEI\IE.

des renseignernents sur la marche de l'cnnemi,

il

r econnut promptemcnt

fi

quel point le coup

porté aux coalisés était décisif, car malgré leurs

fastucuses prétentions, ils r étrogradaient en toute

Late. On n'apercevait sur les routes que des

colonnes de troupes ou d'équipages e1,1 r etraite,

et on les voya it sans pouvoir les saisir faute <le

cavalerie. l\lais il était évident qu'ils ne s'arréte–

raient plus qu'a l'Elbe, et peut-etre

a

l'Oder.

Cette défaite, réelle, incontestable, ne les cmpe–

chait pas de lenir le langage le plus arrogant.

Alexandre, tou t joyeux de s'etre bien compo1'té

au feu, osait appeler celte journée une victoire,

et, il faut le dire, c'éta it une triste habitude de

ses généraux d'en imposer étrangement sur les

événements militaires, comme s'ils n'avaient pas

fait, depuis deux siecles d'assez grandes choscs

pour etre véridiques. Toutefois , qu'il en füt ainsi

chez les Russes, on pouvait le concevoir, car on

mcnt aux nations en proportion de leur ignorance;

mais les Alleman<ls auraient mérité qu'o n leur

débitat moins de mensonges sur cette journée

!

Pourlant les Prussiens, tout étourdis apparem–

men t d'avoir tenu tete a Napoléon, eurent le

courflge d'écrire pa:rtout, surtout

a

Vienne, qu'ils

ava ient rcmporté une

véritab~e

victoire, et que

s'ils se retiraient c'était faute de m1,1nitions , et

par un simple calcul militaire

!

Calcul soit, mais

celui du vaincu qui va chc"rcher ses suretés loin

de l'enoemi dont il ne peut plus soulenir l'ap–

proche. Les coalisés en effet marchercnt aussi vite

que possible.. pour repasser

l'Els~er,

la Pleiss, la

J't'Julde, l'Elbe, et mettre cent lieues de pays entre

eux et les Frarn;ais.

Napoléon, apres s'étre convaincu de l'impor–

tance de cette bataille de Lutzen par la prompti–

tude de l'ennemi a battre en retraite, écrivit

a

.l\Junich,

a

Stuttgardt,

a

Paris , des lettres pleines

d'unjuste orgueil, et d'une admiration bien méri–

tée pour ses j eunes soldats. II alla couch er le 5 au

soir

a

Pégau, et, suivant son usage, se leva au

milieu de Ja nuit pour ordon ner ses dispositions

de marche. Il se pouvait que les coalisés prisscn t

deux dircctions, que les Prussiens

ga~nasseot

par Torgau la route de Berlín, afio d'aller cou–

vrir leur capitale, et que les Russes suivissent la

route de Dresde pour rentrer en Sílésie.

11

se

pouvaít au contraire qu'abandonnant Berlín

a

son sort, et au zele du pri nce royal de Sucde,

]es coali és continuassent

a

ffi<'trcher lous ensem–

ble sur Dresde, restant appuyés aux montagnes

ere la Boheme et a l'Autríche, pour décider cellc–

ci en leur faveur , en luí affirmant qu'ils étaieot

victorieux, ou que, s'ils

ne~l'étaient

pas cettc fois,

ils Je seraient la prochaine. L

'u.ne

et l'autre de ces

manieres d'agir étaient possibles, car pour l'une

et pour l'autre

il

y avait de fortes raisons

a

faire

valoir. Si en effet il importait fort de demeurer

réunis, et de se tenir serrés

a

.J'Autriche,

il

im–

portait également de ne pos abandonnel' Berlín et

toutes les ressources de la monarchie prussienne

aux Frani;ais. Napoléon combina ses dispositions

dans cctte double hypothese. Si les coalisés se

divisaient, il pouvait se diviser aussi, etd'une part

envoyer une colonnc de 80 mille hommes

a

la

suite des Prussiens, laquelle les poursuivrait

a

outrance, passerait l'Elbeapres eux, puis entrerait

victorieuse

a

Berlin, et d'autre part marcher lui–

meme avec

140

mille hornmes

a

la suite des

Russes, les talonner sans relache, pénétrer daos

Dresde avec eux, puis les rejeter en Pologne. Si

au contraire les coalisés ne se séparaient point,

il

fallait suivre Ieur exemple, ajourner la satisfac–

tion d'entrer

a

.6er]in, et poursuivrc en masse un

en11emi qui se retirait en masse. Napoléon, avec

une profondeurde combinaisons dont

il

étaitseul

capable, arretu son plan de maniere a pouvoir se

plier

a

l'une ou

a

l'autre hypothese..

11

Jaissa le

corps de Ney en ar-riere pour se remettre de ses

blessures, car sur

i

7 ou

18

mille hommes movts

ou blessés de notre cóté, ce corps en avait eu

12

mille a Jui seul. I! autorisa Je maréchal

a

rester deux jours a Lutzen pour y établir dans

un bon hópital ses blessés les plus maltraités, et

préparer Je transporta Leipzig de ceux qui étaient

moins gravement att.eints. Il luí ordonna d'entrer

ensuite

tl

Leipzig en grand appareil. Cette ville

avait montré un esprit assez hostíle pour qu'on ne

lui épargn at pas Je spectacle de nos triomphes, et

la

terreur de nos armes. De Leipzig le maréchal

devait marcber sur Torgau , et

y

rallier les

Saxons, raífermis probablement daos leur fidélité

par Ja victoire de Lutzen. En les repla<;antavec la

division Durulte sous Je général Reynier , c'était

un corps de

14a 1

o

mille hommesdontlemar·échal

Ney se trouverait renforcé. Napoléon luí donna

en outre le maréchal Víctor, non-seulement avec

les seconds batailJoas de ce mal'échal réorganisés

a

Erfur t, mais avec une partíc de ceux du maré–

chal Davoust, que celui-ci dcvai t preter pour

quelqucs jours. Le maréchal Victor pouvait avoir

ainsi vingt-deux bataillons, faisantenviron 15 ou

16

mille hommes.Enfin, restaitla division Puthod,

la quatrieme du corps de Lauriston, laisséc avec

le général Sébastiani sur la gauche de l'Elbe,

pour chatier les Cosaques de Tettenborn , de