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PRElUIERE

ABDICATION. -

FÉVRIER

i8i4.

42!'>

un momcnt le retour

~e

prinecs chéris, se de–

mandaient avec chagrin s'il fallait tout

a

coup

renoncer

a

eet espoir. lis eherchaient une excuse

a

leurs vreux secrets dans les malhcurs que Na–

poléon avait attirés sur la France, et se <lisaient

que toute main, memc celle de l'étranger, était

bonne pour se délivrer d'un si odieux despo–

tisme. Cepcndant ils se

con~entaient

de former

des vreux, et ils dcmeuraient complétement inac-·

tifs. Des conversations

a

voix bassc entre les

membres de l'ancienne noblesse et du clergé, des

bruits malveillants dans lesquels on exagérait nos

revers ou contestait nos succes, une résistance

inerte aux mesures de l'administration, consti–

tuaient tous leurs cfforts contre le gouvernement

impérial. Les émigrés qui, depuis la révolution,

n'avaient cessé de vivrc

a

l'étranger aupres des

princes de Bourbon, avaient presque pcrdu

l'habitude de correspondre avec l'intérieur de la

France. lis l'cssayaient en ce moment saos trou–

ver aucun empressemcnt

a

leur répondre, et par

exemple dans les provinces inenacécs d'invasion

personne n'aurait osé accourir

a

leur rencontrc

pour proclamer les Bourbons. A peine quelques

royalistes osaient-ils hasarder une manifestation

daos les villes déja solidement occupécs par les

armóes alliées. A Troyes, dcux vieux chcvaliers

de Saint-Louis avaien t présenté

a

Alexandre une

pétition pour demander le rétablissement des

Bourbons, imprudence qui devait couter cher

a

ces infortunés

!

A París, on cilait deux membres

de l'auciennc noblesse,

MM.

de Polignac, qui,

transférés de leur prison dans une muison de

santé, s'étnient évadés pour aller,

a

leurs risques

et périls, offrir

a

M.

le comtc d'Artois leur dé–

vouemen t éprouvé.

Ríen de sérieux évidemment ne pouvait etre

len.té

par ces hommes, trop étrangers <lepuis

".ingt-cinq ans ·aux affaires de la France pour y

eiercer quelque influence.

Il

fallait que des

membres du gouvernement actuel, les uns mé–

contents de Napol-éon qui les avait maltraités,

les a1,1tres·désirant asslirer leur situation sous un

r9gime nouveau, tendisscnt la main aux roya-

1istes,

po.ur

q.u'une menée tani soit peu cfficace,

et en tbut cas· bien cachee, füt ourdie en leur

favcur. on·

essayai~

quelquc chosc de parcil

actuellement, mais tres-secreLement et en lrem-

blant. ·

· · pe

tou$ les mécontents que le régimeimpérial

avait-

f~its ,

.Je plus .éclatant, celui qui donnait le

·

.ph.~~a- pense1~

alix amis des Bourbons comme aux

~n;li.s ~cs.:noóaparte,

était l\L de Talleyrand. 11

était l'objet des espérances des uns, des craintcs

des autres, et quoiqu'il fUt en position, etmeme

a

la veille de jouer un grand róle, ils s'exagé–

raient bcaucoup ce qu'il pouvait et ce qu'il ose–

rait faire. Que le moment venu, Napoléon étant

définitivement vaincu, l'ennemi se trouvant

dans Paris, l\L de Tallcy1·and füt le seul hommc

dont on put se servir pour constitucr un nou–

veau gouvernement sur les ruines du gouverne–

ment renversé, c'était incontestable, mais qu'il

put et voulUt prendre l'initiativc d'une révolu–

tion, le drapeau tricolore floltant encore sur les

Tuilerics, c'était une fausse tcrreur de Ja police

impériale, et une pure illusion des salons roya–

listcs. La mauvaise volonté de

M.

de Talleyrand

pour l'Empire était sans doutc aussi gt'ande

qu'elle pouvait l'elre, mais ses moyens et sa

témérité n'étaient pas au niveau de cette mau–

vaise volonté. En refusant

le

portefeuille des

aífaires éh·angercs deux mois auparavant, sur–

tout parce qu'on ne voulait pas lui laisser Ja

qualité de grand dignitaire,

il

avait

a

peu pres

rompu nvcc l'Empire, et, comme on l'a vu,

Napoléon la veillc meme de son départ pour l'ar–

mée l'avait traité de maniere

a

lui inspirer les

plus vives appréhensions. Quclques insinuations

de personncs en rapport avec les Bourhons lui

avaient appris, ce qu'il savait du reste, que les

services d'un éveque marié seraient tres-bien

accueillis des princes les plus pieux, car il n'y a

rien qui ne s'oublic devant les scrvices, non ,pas

rendus mais

a

rendrc. Les partis n'ont que la

mémoire qui leur eonvient : sclon le besoin du

jour, ils ont tout oublié ou se souviennent de

tout.

M.

de Talleyrand avec sa profonde con–

naissance des hommes et des choses n'en était

done pas

a

apprendre que sa carriere, finie avee

les Bonaparte, était aiséc

a

recommcncer avec

les Bourbons. l\fais il connaissait le duc de Ro–

vigo, facile, familier, amical meme avcc ceux

qu'il surveillait, capable néanmoins au premier

soup<;on sérieux, ou au premier ordre de Napo–

léon, d'appliquer sa rude main de soldat sur un

mantean de grand dignilaire. Aussi

M.

de Tal–

leyrand était-il d'une extreme circonspection.

- Chez lui, daos un hotel de la rue Saint-Flo–

rentin, qui devint bientót célebre,

M.

de Tal–

leyrand recevait entre autres personnagcs le duc

de Dalberg, l'abbé de Pradt, le baron Louis._

l\I.

de Dalberg, descend:mt des illustres Dalberg

d'Allemagne, neveu du princc Primat, d'abord

eonemi, puis ami de l'Empirc, bien dote

a

l'épo–

que des sécularisations, brouillé quelque temps