BRIENNE ET l\'IONTMIRAIL. -
FÉVRIER
i81.4.
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rnit un peu plus génée, un pcu plus dominée
par uneorgueilleuse rivale; qu'elle n'avait done
ríen
a
gagncr
a
une bataille qui dans un cas lui
ferait perdre tous les fruits ·de la bataille de
Leipzig, et dans l'autre la rendrait plus dépen–
dante qu'elle n'était de Ja Rm¡sie; que ce qu'ellc
pouvait vouloir, en ltalie par exemple, la Francc
le
lui concéderait tout de suite, en conscntant
a
rcpasscr les Alpes; qu'ainsi, sa ns cornpter les
liens du sang qui devaient étrc quelque chose
apres tout, l'intérét vrai de l'Autriche était de
condure la paix, aux conditions qu'elle-meme
avait offertcs
a
Francfort.
A ces raisonnements mélés de bcaucoup de
paroles douces et flatteuses pour l'cmpe1·eur
Fran<;ois, Napoléon en avait ajouté d'autres non
moins spécieux dans Ja lettrc dcstinée au prince
de Schwarzenberg, et bien fails pour toucher la
mémoire de ce princc, sa prudence rnilitaire, et
son orgueil que les généraux russes et prussiens
ne cessaient de froisser. Ces leltrcs furent expé–
diées l'une et l'autre
a
litre de réponsc
a
la der–
niere démarche du prince de Schwarzenberg.
Malheurem¡ement quoique tres-habilement rai–
sonnées et écrites , elles ne s'accordaient pas
complétement avec la situation morale des puis–
sances alliées, que Napoléon du milieu de son
camp ne pouvait pas biea apprécier. Sans doute
si l'Auttiche eUt été moins engagée dans les liens
de la coalition, si elle n'avait pas tant craint de
rompre cettc coalition qui, une fois rompue, la
laissait sous
la
maiu de fer de Napoléon, si elle
n'eut pas tant rcdouté le caractere de ce dernier,
ene aurnit pu préter l'oreille
a
des considérations
qúi sous bien des rapports répondaient
a
]'esprit
politique de l'cmpereur Fran<;ois, a la sagesse de
son premier ministre, et
a
l'amour-propre blessé
de son général en chef. Mais ces leltres, il était
a
croire qu'au Jieu de les garder pour elle, I'Au–
triche les montrerait a ses alliés, afin de mcttre
sa bonne foi a l'abri du soup9on, qu'alors on se
ferait de nouvelles protestations de fidélité, et
qu'on se serrerait plus étroitement les uns aux
autres pour résister
a
un ennemi qui tour
a
tour
était Jion ou renard.
JI
y avait done plus
a
ris–
quer qu'a gagner dans cette tentative auprcs de
la cour d'Autrichc.
Quoi ·qu'il en soit, Napoléon apres avoir vaqué
a
ces soins divers, et ses troupes étant parvenues
a
la hauteur ou
il
les voulait, partit du chateau
de Surville le 21 au matin, passa la Seine
a
Mon–
tereau et la remonta jusqu'a Nogcnt. 11 trouva
partou.t le pays tellement ravagé, que désespé-
coNSULAT.
5.
rant d'y vivre,
il
fit
demander avec instances des
munitions de bouche
·a
París. A Nogent meme
tout élait dans un état affreux par suite du der–
nier combat. 11 accorda sur sa cassette des se–
cours aux sreurs de charilé qui avaient pansé
les blessés sous les halles de l'ennemi, et
a
ceux
des habitants qui avaient le plus souffert.
Le lendemain 22, continuant
a
rcmonter la
Scine
il
se dirigea sur Méry, point ou le com's
de la Scine se détournc, et au lieu de décrirc
une lignc de l'ouest
a
l'cst, en décrit une du
nord-ouest au sud-est, de Méry
a
Troyes. (Voir
la carte nº 62.) 11 suivait Ja grande route de
Troyes, menant avec lui les troupes du maré–
chal Oudinot (division de jeune garde Rothen–
bourg, et division Boyer d'Espagne), la vieille
garde, les divisions de jeunc garde de Ney et de
Victor, la réserve de cavalcrie, et enfin la réserve
d'artilJerie. A droite par des chemins de traversc
s'avanc;aient le maréchal Macdonald avec . le
11
e
corps, et un peu plus
a
droite le général·
Gérard avec le
2e
corps et la réserve de Paris.
Sur l'autre rive de la Seine, aux environs de
Sézanne, Grouchy avcc sa cavalerie et Ja division
Leval s'apprétait
a
rejoindre Napoléon par No–
gent , et Marmont avec le
6e
corps occupait la
contrée d'entre Seine et Marne, pour observer
Blucher et se Íier avec le maréchal Mortier ex–
pédié sur Soissons. Les forces de Napoléon, sans
les troupes de l\farmon t, mais avec cclles de Grou–
chy et de Leva!, s'élevaient a cnviron 70 mille
hommes.
Napoleon s'atlendait toujours
l1
livrer bataillc,
et
il
Je désirait, car depuis l'ouverturc de Ja cam–
pagne
il
n'avait pas cu 70 mille hommes sous la
main, sans compter qu'il suffisait d'une journée
pour attirer Marmont
a
lui. Ainsi que nous
l'avons déja dit, cherchant une combinaison qui
put rendre cette bataille décisive ,
i1
avait re–
noncé a suivrc le prince de Schwarzenberg sur
la grande route de Troyes, et il avait imaginé
de passer la Seinc
a
Méry, de la remonter rapi–
dement par la rive droite en laissant le prince
de Schwarzenbcrg sur la rive gauche, de le de–
vanccr a la h auteur de Troyes, et alors de re–
passer la rivicre pour venir lui offrir la bataille
entre Troyes et Vandrenvres, apres s'etrc emparé
de sa proprc ligne de retraite. Si ce plan pou–
vait s'exécuter,
il
devait avoir incontestablement
d'immenses conséquences.
Le 22au matin les ordres étant donnés d'apres
ces vues, notre avant-garde refoula l'arrierc–
garde du princc de Wittgenstein vers Chatres,
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