BRIENNE ET l\JONTMIRAIL. -
n lvRIEn
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troúpes harassées se répandraient confusémcnt
autour du village, ou dans la foret environnante,
et qu'en ap·paraissant hrusquement au milieu
d'elles pendant la nuit, on pourrait les jeter dans
un grand désordre, et surtout les pousser au
d.ela d'Étoges, en has du plateau sur lequel on
combattait depuis plusieurs jours. Destiné, d'a–
pres loutcs -les vraisemhla'nces, a garder de nou–
veau cette position pendant que Napoléon irait
combattre ailleurs, l\farmont tcnait a s'élablir a
Étoges Íneme, d'ou il pouvait rlomincr Ja routc
de Vertus.
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résolut done d'essayer sur Blucher
une attaque de nuit.
Toutefois, il n'avait que peu de forces asa dis–
position, ses soldats s'étant déja dispersés dans
les champs pour y chercher
a
vivre. Il était
suivi par la division du général Leva) que Ney
prétendait avoir sous ses ordres. Apres une al–
tercation assez vive entre ce maréchal et lui , il
prit un détachement de cette division, et, avec
un de ses régiments de marine,
il
s'enfon~a
dans les bois a Ja faveur de l'obseurité' puis
fondit brusquement sur Étoges, au moment oti
l'enncmi' épuisé de fatigue,
commen~ait
a goúter
un peu de repos. Cctte attaque imprévuc eut un
succes complet. Prussiens et Russes, assaillis
avant d'avoir pu se mettre en défense, furcnt
refoulés hors d'Étoges , et obligés, en pleine nuit,
de s'enfuir vers Bergeres et Vertus. On enleva
une bonne portion des troupes du général russe
Orosoff, et ce génér::il lui-meme avec son état–
major. Cette derni crc parlic de la journée couta
encore plus de 2 millc hommcs au corps de Blu–
eher, et beaucoup d'artillerie.
La journée du
14,
dile de Vauchamps,
fil
done
perdre a Blucher de 9
a
1
o
mille hommcs en
morts, blessés ou prisonniers. Il n'était pas pos–
sible de terminer plus dignement eette suite
d'admirables opérations. Parti le 9 février de
Nogent-sur-Seine, arrivé le
10
a Champauhert,
Napoléon y avait pris ou détruit dans cette jour–
née le corps d'Olsouvieff, hattu le
11,
a
l\fontmi–
rail, le corps de Sacken, ballu et refoulé le
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sur
Chateau-Thierry cclui d'YMk, crnployé le
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a
rélahlir le pont de Ja Marnc pour lancer Mortier
a la poursuite de l'ennemi, et le
14,
rebroussant
chemin sur l\fonlmirail,
il
avait assailli Bluchcr
qui venait maladroitement s'offrir
a
ses coups,
comme pour lui fournir l'occasion d'accabler le
dernier des quatre détachements de l'armée de
Silésie. Ainsi, presque saos bataille, en quatre
combats livrés coup sur coup, Napoléon avait
entierement désorganisé l'armée de Silésie, lui
CO
SOJ.AT,
5.
avait enlevé environ 28 milie hommes sur 60mille,
plus une quantité immcnse d'artillcrie et de dra–
peaux, et avait puni cru,ellement le plus pré–
somptueux, le plus brave, le plus acharné de ses
adversaires.
11
y avait de quoi etre fier et de son
armée et de Jui-meme, et des derniers éclats da
sa miraculeuse étoile, miraculeuse jusque dans
le
malheur!
Napoléon dirigea tout de suite sur Paris les
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mille prisonniers qu'il avait faits, afin que la
capitale les vit de ses proprcs yeux, et qu'en re–
gardant ces trophécs dignes des guerres d'Italie,
elle crut encore au génie et
a
la fortune de son
empereur.
Paris avai t successivemcn tappris les triomphes
inespérés de Napoléon, et, sauf quelques cceurs
égarés par }'esprit de parti ou par la haine du
despotisme impérial, s'en était r éjoui cordiale–
ment. L'annonce des colonnes de prisonniers
avait excité une vive attentc chez les Parisiens,
qui espéraient les voir défiler sur le boulevard
dans deux ou trois jours. Mais c'est
a
peine s'ils
avaient osé se livrer a la joie, car, tandis qu'ils
apprenaient que Blucher et ses lieutenants étaient
hattus
a
Champaubert, a Montmirail , a Chateau–
Thierry,
a
Vauchamps, ils recevaient la nouvelle
que Schwarzenberg était pres de forcer la Seine
de Nogcnt
a
Monte!eau, et que les Cosaques de
Platow s'étaient montrés dans la foret de Fon–
tainebleau. La malheureuse cité, du sein de
laquelle la tm;reur avait fondu pendant vingt ans
sur toutes les capitales, était en proie
a
son tour
aux plus cruelles angoisses. La victoire meme ne
la pouvait garantir de ses terreurs, car un en–
nemi n'était pas plutót batLu sur la Marne, qu'un
autre apparaissait sur
la
Seine, et que, rassurée
du coté de Meaux, elle avait sujet de s'effrayer
du coté de Melun et de Fontainebleau. De vives
instances étaient done parties de Paris pour ra–
mener Napoléon sur la Seine. Ce motif lui avait
fait abandonner Marmont avant la fin de la
journée de Vauchamps, et l'avait forcé de r eve–
nir
a
l\fontmirail, pour donner de nouveaux
ordres et préparer de nouveaux combats.
Voici en
eff~t
ce qui s'était passé
a
la grande
armée du prince de Schwarzenberg. Pendant
que Napoléon avait quitté l'Aube et la Seinc
pour se po1;ter sur la Marne, les souverains alliés
s'étaient rendus .a 'froyes, et leur armée, les
devan~ant,
avait occupé le cours de la Seine de
Nogcnt a Montercáu, avait meme cherché 3
s'étendre jusqu'a l'Yonne, afin de se garantir du
danger d
'et.redébordée par sa gauche. La pré-
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