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582

LIVRE CJNQUANTE-DEUXIEl'ifE.

car celte occasion est comme celle de Prague,

comme celle de Francfort; une fois négligéc, elle

ne se représentera plus. -

M.

de Caulaincourt,

effrayé de ces avis, et voulant savoir quels sacri–

fices on allait irnposer

a

la France , n'avait pu

obtcnir de

M.

de Floret aucunc explication, mais

il en avait tiré Ja certitude qu'il fallail se r ésigocr

a

de bien autres sacrificcs que ceux de Fr:mc–

fort, si on voulait sauver París et, avec Paris, le

tróne impérial. 11 avait done écri t ;. Napoléon ,

et J'avait supplié de luí accorder des latitudes

pour négocier, car des instructions qui lui en–

joignaíent d'exiger non-seulement l'Esca ut, mais

le Wahal ;

non-seul~ment

les Alpes, mais une

partie de l'Italic; non-seulement une influence

légitime sur le sort des provinces cédées, mais la

possession d'une partic d'enlre ell es pour les

freres de Napoléon , étaicnt un afTreux contre–

scns avec la situalion présente.

JI

avait demandé

des latitudes sans dire lesquelles, et les avait

demandées

a

genoux, non comme un h omme

qui se prosterne pour sauver sa fortu ne et sa

vie, mais comme un bon citoyen qui-s'humilie

pour sauver son pays. Se défiant de

1\1.

de Bas–

sano, qu'il n'aimait point, et dont il n'était point

aimé, qu'il considérait

a

tort commc la cause de

l'entetemcnt de Napoléon, il avait écr) t

a

Bcr–

thier, pour le pricr d'abord de lui envoyer des

informations exactes sur la situalion militaire,

et pour le eonjurer ensuite , lui le noble et fid cle

compagnon des dangers de I'empcreur, d'cm–

ploycr toute son influence

a

le fairc céder.

C'est ainsi que Napoléon avait cu

a

subir non–

seulcment

la

lettre de

M.

de Caulaincourt de–

rnandant d'autres instructions, mais les pderes

les plus vives de Berthier, et de

M.

de Bassano

lui-meme, qui en ce momcnt était loin d'exciter

son maitre

a

la résislancc. Des nouvelles venues

de divers cólés aiguillonnaient encore le zcle

de tous ceux qui entouraicnt Napoléon. En

effet, des corps autrichiens semblaient s'etre

étendus

a

notre droite par dela I'Yonne. Quatre

a cinq mille Cosaques avaient dépassé Sens, et

menai;aient Fontaineblcau.

A

notrc gauchc, vcrs

la l\1arne, l'aspect des choscs n'était pas moins

inquiétant. Le maréchal .Macdonald, qui avai t

rei;u ordre de se rcplier sur ChaJons et de s'y

1

Suivant ruon habitude de ne jamais trace1· des lableaux

de fanlaisie, je diraique j'empruntc ces détails non-sculcment

a

Ja correspondancc tlu roi Joseph, qui a élé publiéc en pal'–

tie, mais

a

celle du pl'ince Cambacércs, du duc de Rovigo, du

duc de Fellre, qui ne l'ont pas été, el qui sonl cx lrémemcnt

délaillées. Elles donncnt avec encore plus de vivncité toutes

maintenir, en avait été expulsé par l'ennemi,. et

avait été contraint de se retirer sur Chateau–

Tllierry. On le disait meme rejeté sur l\foaux.

Les 11

e

eL

1)c

corps d'infanterie, les 2° et 5e de

cavalerie qu'il arnenait avec lui, et que Napoléon

évaluait

a

1.2

millc hommes au moins. étaient

en réalité réduits

a

6

ou 7 mille. Des

b~ndes

de

fuyards, aprcs avoir quitté l'armée, s'étaient ré–

pandues entre l\foaux et Paris , et y avaient porté

l'épouvanle. Les Parisiens voyaient l'ennemi

arriver sur eux par trois routes, celle d'Auxerrc,

celle de Troyes, celle de Cbalons, et sur une des

trois sculemcnt disccrnaient une force capable

de les couvrir, celle que Napoléon commandait

en personne, laquelle avait eu, disait-on, l'avan–

tage dans le combat du 29 janvier, mais un désa–

vantage marqué dans Ja bataille du 1

er

février.

On parlait en outrc de mouvemcnts dans la Ven ·

déc, et ce pays naguer e si tranquille, si recon–

naissant envers Napoléon, paraissait prct

a

s'agitcr. Eofin,

a

la stupéfacLion générale, on

annon <¡ait que Murat, le propre beau-frere de

l'empereur, élcvé pa1· lui au tróne, venait de

trahir

a

la fois l'alliance ' Ja patrie , Ja parenté,

en se portant sur les derricres du prince Eugene.

Ce concours de mauvaises nouvelles avait bouJe–

versé to utes les tetes. L'impératrice, épouvantée,

appelait sans ccssc aupres d'ellc tantót Joseph,

tantót l'archichancelier, pour Ieur con.fier ses

chagrins, et, en voyant le péril s'approcher, se

moLu·ait de p eur pour son époux, pour son fils,

pour clle-mcme. On répandait dans París que la

cour allait se retirer sur la Loire, et tous les

jours une foule inquiete venait aux Tuileries,

pour s'assurer si les voilures de promenade qui

ordioairemcnt transportaicnt l'impératrice et Je

roi de Rome au bois de Boulogne, n'étaient pas

des voitures de voyagc destinées

a

se diriger sur

Tours

1

Ces circonstances irritaicnt Napoléon sans l'é–

branl cr. Ou chacun voyait des sujets de crainte,

il

apci·cevait plutót des sujets d'cspérance. 11 se

doutait, en cffet, qu'un corps autrichien s'était

approché de lui, et il songeait

a

se précipiter

sur ce corps pour l'accabler. Le danger de l\fac–

donald, la maniere dont il était poursuivi, le

disposaient

a

croirc que la grande armée des

les pal'liculal'ités que je l'apporte

ici.

J'allénue clone plulót

que j e n'exagcrc les eouleurs, sachant qu'il faut loujoul's oler

quelque chose

a

J'exagération d11 temps, bien que cctle exa–

gération soit un tics traits de la situation qu'il convient de

conscrvcr clans une ccrtaine mesure.