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BRIENNE ET l\JONTMIRAIL. -

FÉVlllER

-1814.

579

terie, pourpouvoir la protéger, et, apres s'en etre

serví, on l'abandonnait, ·en se contcntant de sau–

ver les canonníers et les attelages. Du reste, tan–

dis que le centre, composé de la garde, "1e la

cavalerie et des débris de Víctor, se retiraít sans

etre entamé, la gauche sous i\'Iarmont se dérobait

tres-heureusement

11

travers le bois d'Ajou, et

Ja droite, sous Gé1·ard, qui s'était montrée iné–

branlable

a

Dienville ; se replíait sans échec le

Jong de l'Aube, apres avoír tué ou blessé un

nombre considérable d'hommes

a

l'ennemi.

Ainsí se termina

cet.te

terrible journée oú la

résistance de 52 mille hommes contre

'170

mille,

dont

100

mille engagés, fut, on peut le dire, un

vrai phénomene de guerre. Cette résistance était

due a l'habileté et

a

l'énergie du général Gérard,

au bon emploi que le maréchal l\'Iarmont avait

fait de son artillerie, au dévouement héroi:que

des maréchaux Oudinot et Victor, et par-dessus

tout

a

la ténacité indomptable de Napoléon. Sans

son caractére de fer,

il

aurait été précipité dans

l'Aube. Sa tenue étaít de nature a faire réfléchir

l'ennemi, et sauvait pour le moment sa situation.

Il avait perdu environ

1)

mille bommes en tués

ou blessés, et en avait mis hors de combat 8 ou

9 mille aux alliés, grace

a

l'avantage de la posi–

tíon et au grand emploí de l'artillerie, différence

qui était une satisfactiou sans doute, mais un

faible succés militaire, car les moindres perles

étaient pour nous bien plus sensibles, que les

plus considérables pour la coalition. Notre sacrí–

fice en artillerie fut d'une cinquan taine de bou–

ches

a

feu; mais presque sans perte d'artilleurs

ou de chevaux

1,

ce qui prouvait que c'étaient

bien plutót des pícces abandonnécs que des

pieces conquises par l'ennemi. Napoléon n'avait

livré ce combat si disproport.ionné que pour cou–

vrii: sa re traite : dans la nuit,

il

passa sans confu–

sion

le

pont de Lesmont, et gagna Troyes en bon

ordre. Comme il lui fallait toute la nuit pour

défiler, et qu'il pouvait etre assailli par l'ennemí

a

la pointe du jour,

il

laissa le corps de Marmont,

qui ne se composait que de la

divisio~

Lagrange,

sur la droite de l'Aube et sur la hauteur de

Perthes, de maniere

a

persuader a Blucher qu'e

l'armée

fran~aise

ét.ait la tout entíere prete a

combattre de nouveau.

Ce

corps ne courait au –

cun danger bien sérieux, car il avait pour se

couvrir la petite riviere de la Voire, étroile mais

profonde, dont

il

possédait les ponts, et derriere

1

L'ennemi parla de 2,000 ou 2,500 prisonniers. C'élaient

des blessés que

nou~

abandonnions, faule de pouvoir les em–

mener, et non point de vrais prisonniers pris en ligne.

Jaquelle Íl était assuré

de

trouver un asile des

qu'il serait trop vivement attaqué.

Le lendemain,

en

effet, l'ennemi, fatigué du

combat de Ja veille, et s'éveillant un peu tard,

s'avan~a

d'un cóté vers le pont de Lesmont, de

l'autre vers la hauteur de Perthes, et demeura

daos une sorte de doute en voyant le corps de

l\farmont en bataille. Tandis qu'il se demandait

ou était l'armée

fran~aise,

elle achevait de défiler

tout pres

de

Jui par le pont

de

Lesmont, et Mar–

mont lui-meme, apres avoir suflisamment con–

tribué

a

son illusion, se dérobait en passant la

Voire a Rosnay.

-

Cependant Marmont fut suivi sur Ja Voire

par Je maréchal de Wrede. Aprcs avoir occupé

asscz longtemps la hautcur de Perthes , et y avoir

fait bonne contenance,

il

avait traversé le pont

de Rosnay sous les ycux des Bavarois, et s'était

haté de le détruire. l\'Iais, serré de tres-pres.

il

n'avait pu enlever que

le

tablíer du pont, et en

avait laissé subsister les pilotis, dontla tete

per~ait

de quelques píeds au-dessus de l'eau. Pendant

qu'il mettait en hataille de l'autre cóté de la Voire

le

peu de troupes qui lui restaient,

il

aper~ut

au–

dessous de Rosnay des détachcments ennemis

exécutant une tentative de passage. 11 envoya

d'ahord de Ja cavalerie pour s'y opposcr; puis,

ayant reconnu que la cavalerie ne suflisaít pas,

et qu'une troupe de deux

a

lrois mille hommes

avait déja franchi la riviere, il y accourut lui–

meme avcc quelques centaines d'hommes, car si

ce passage n'était pas interrornpu , son corps

pouvait se trouver coupé de l'Aube et de Napo–

léon , des lors rejeté au milieu des corps de

Wittgenstein et d'York,

c'est·~-dire

enveloppé et

pris. Sur-le-cbamp, il se précipita, l'épée

a

la

main, sur Je détachement qui avait passé la Voire

au moycn de quelques pieux et de quelques

planches, l'attaqua brusquement, et le refoula

sur la ríviere. Sa cavalerie,

a

cet aspcct,

fit

une

charge

a

outrance, et en un clin d'reil on sabra

ou prít un millier d'hommes. Cet exploit accom–

pli au-dessous de Rosnay, :Marmont fut rappelé

a

Rosnay méme par une tentative

a

peu pres

semblable. Prévoyant qu'un passage pourrait etre

essayé par ce pont

a

moitié détruit,

il

y

avait

embusqué un capitaíne d'infan.terie fort intelli–

gent avec sa compagnie. Celui-ci avaít laissé

passer un

a

un, sur les appuis du pont ¡.¡rivés de

tablier, un certain nombre d'hommes, puis les

avait fusillés

a

bout porlant. l'\farmont arriva pour

les

achever. Ainsi un corps de 5 mille

Fran~ais

environ, c'était, en effet, ce qui restait

a

l\farmont