BRIE iNE ET MONTl\IInAIL. -
JANVIEI\
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pr·omettant de Ja
mé1~ager.
Sans doute, elle avait
eu des torts, ou plutót son gouvcrnement en avait
cu; mais, en un jour, on les effa<¡ait, et si on se
rappellc que, deux mois auparavant, les puis-
, sanees lui avaient proposé ses frontiercs natu–
relles, avec de vives instances pour les lui faire
accepler; qu'apres un moment d'hésitation, elle
avait répondu par une acceptalion forrnelle qui,
en droit, liait les auteurs de cette offre, on nous
pardonnera de dire que les conditions cnvoyées
a
Ch:1tillon étaient indécenles. Aussi, bien que
le triomphede Napoléon füt celui d'un despotisme
iusupportable, sa victoire était alors le voou ele
tousles honnctes gens que l'esprit de par-ti n'avait
point égarés. C'était lui assurément qui nous
avait valu toutes ces humiliations, mais un cou–
pable, qui défend le sol, devient le sol lui-pieme
!
Tandis qu'on faisait partir les plénipoten–
tiaires pour Chatillon, M. de Metternich cut le
soin d'envoyer en avant
:M.
de Floret, sous pré–
texte d'y préparer le logemcnt des nombreux
diplomates du congres, mais en réalité pour
donner a M. de Caulaincourt, qui venait dºy arri–
ver, des avis pleins de franchise, et nous dirions
de sagesse, s'ils eussent été pour Napoléon com–
patibles avec sa gloire. M. de Metlernich n'avait
pas encore répondu
a
Ja demande d'armistice
que
1\1.
de Caulaincourt avait été chargé de luí
adrcsser. Il s'cxpliquait cetle fois sur ce sujeten
disant que, s'il n'en avait point parlé, c'est qu'une
telle proposition n'avait aucune chance d'etre
accueillie, qu'il en avait gardé le secrct et le
garderait pour cmpecher qu'on n'en abusat; que
les alliés voulaient la paix ou rien , la voulaient
prompte, et aux conditions qui allaient etre
communiquées; qu'il ne fallait pas se défier des
Anglais, car ils étaient parmi les plus modérés;
que leur témoigoer confiance, et surtout a lord
Aberdeen, serait bien entendu; qu'il fallait sai–
sir comme au vol cette occasion de négocier; que
si on ne la saisissait pas, elle ne se représenterait
plus; que les alliés se livreraient, en cas de refus,
a
des idées de bouleversement auxquellcs l'Au–
triche, en les regrettant, ne pourrait pas résister;
que l'empereur Franc;ois en serait désolé pour
sa filie, mais qn'il n'en serait pas moins fidele
a
ses alliés, auxquels l'unissaicnt les intérets de la
monarchie autrichienne, et de grandes obliga–
tions conlractées pendant la dernicre guerre;
qu'il s'uppliait son gendre d'y bien peoser, et de
se résigner aux sacrifices commandés par les
circonstances; que Jui-meme, empercur d'Au–
triche, avait cu dans ce siecle bien des sacrifices
a
faire, qu'il les avait faits, et qu'il n'en était pa
moins revenu plus tard
a
la position qui coñve–
nait a son empire; qu'il ·fallait done savoir se
soumettrc a la nécessité, pour évitcr de plus
grands et de plus irréparables malheurs.
Il était défendu
a
1\1.
de Floret de prendt·e les
devants relativement aux conditions de la paix,
et de les laisser meme entrevoir. l\fais les con–
seils qu'il était chargé de transmettrc suffisaient
pour indiquer qu'on n'en était plus aux bases de
Francfort.
La question politique étant résolue, restait
a
résoudre la queslion militaire. Le prince de
Schwarzenberg, qui jouait dans les affaires mi–
litaires le role que jouait 1\1. de l\letternich daos
les affaires politiques, se trouvait naturellement
a la tete de ceux qui voulaient s'arreter a Lan·–
gres, soit pour voir ce que produiraient les
négoeiations, soit pour s'épargner les dangers
d'une marche sur París. On allait rencontrcr
Napoléon, qui se serait autant renforcé en se
rapprochant de ses ressources, que les coalisés
se seraient aífaiblis en s'éloignant des leurs; on
devait se préparer
a
lui livrer une bataille déei–
sive, ce qui, avec un général tel que lui, avec
des soldats exaspérés comme les siens, ét.ait
toujours hasardeux, et celte ba taille, si on ne la
gagnait pas, ferait perdre en un jour le fruit de
deux annécs de succes inespérés. A ces considé–
rations s'en joignaicnt d'autres, puisées dans la
difficulté de se procurer des moyens de subsis–
tance. En effet, on était obligé d'appuyer vers
la Marne plus que vers la Scine, a cause des
troupes laissées autour des places, et en avan–
<¡ant on dcvait se trouvcr au milieu de In. sté–
rile Champagnc, oti l'on aurait du vin et pas
de pain, tandis qu'on abandonnerait
a
Napoléon
Ja fcrtile Bourgogne. C'était un motif de plus
pour attendre l'cffct des négociations et l'arrivée
des renforts, avant de s'engager a fond. 11
y
avait bien encore quclques arriere-pensées tout
autrichiennes dont le prince de Schwarzenberg
ne parlait pas, et qui agissaient ccrtainement
sur lui ;
il
se disait que l'entréc
a
Paris, tant dé–
sirée par Alexandre, serait saos doulc pour ce
prince un triomphe, mais n'en pouvait pas etre
un pour le beau-pere de Napoléon; que d'ail–
leurs rompre davantage l'équilibre de l'Europe
en poussant jusqu'a leur dernier terme les succes
de Ja coalition, c'était le rompre au profit de la
Russie et nullement au profit de l'Autriche.
Ces raisons, dont quelques-unes ont été de–
¡mis condamnées par le résultat, n'en étaient pas