BRIENNE ET MONT.l\IIRAIL. -
JANVIEI\
1814.
575
lótte, héritierc du sceptre d'Angleterre, et l'hé–
ritier de
la
maison d'Orange, projet qui en tout
autre temps auráit soulevé les plus grand-es op–
positioris. CepC'nd·ant :Ale'xandre avait accueilli
ces átnbitions
britanniqu'!~s
avec le sourire qtt'il
ac'COrdait a toules les passions dont
il
recher–
chait I'allianee, et s'était montré pret
a
consentir
saos exception aux voo1:1x de l'Angleterte. Ce
projet exigeait de l'Autriche un sacrifice person–
nel; -celui des Pays-Bas autricbiens, car., daos ce
retour universel au pa'ssé, les Pays-Bas auraient
du
tui ·revenir. Mais·, en fait de Pays-Bas; elle ai–
ma-it n1ieux ceux d'Italie, c'est-a-dire Venise, et
elle avait donné son ass,entiment aux vues de
l'Angleterre, apres av-oi-r acquis toutcfois la cer–
titude qu'elle.serait dédommagée de son sacrifice
en Italie. U était un dernier p oint sur lequel
lord Gastlereagh apportait un vceu forme!, c'est
qu'il ne fút pas question du droit maritime. Le
croirait·on
't
Daos cette réunion ou se trouvaient
des puissances qui aspiraient a former une ma–
rine, on s'occqpait
a
peine du droit
mnriti1~1e,
et
on le rcgatdait comn1e affaire part.iculiere regar–
dant tout au plus la France et l'Anglctcrre, et
natlirellement devant
et.reréglée au gré de Ja
derniere. Ainsi tout avait été concédé
a
lord
Castlereagh, royaume des Pays-Bas, union par
marfage entre ce reyaume et celui d'Angleteri·e,
et enfia silence de l'Europe ci'vilisée sur la légis–
Jation des mers.
Ces coacessions faitcs, restait
a
savoi; pour
qui se prononcerait lord Castlereagb, c-n tre ·ceux ,
qui désirai'ent la paix, et ccux, a1:1 contraire, qui
demandaient la guerre
i1
outrance. Une fois
rassasié, le puissant Anglais était redevenu pair–
faitement raisonnable, et, par exemple, sur la
question de traüer
01:1
de ne pas traitcr avec
Napoléon, il avaít été
a
Ja fois sensé et habile.
Au fond, cette question signifiait qu'on ne
rnulait plus avoir aífoire
i1
Napoléon, et qu'on
était résolu
a
le détróner pour substituer une
autre dynastie
a
la sicnne. Or, c'était pour lord
Castl'ereagh une lliffictillé , soit par rapport
a
l'Angléterre., soit par rapport
a
I
'Autriche.Onavait
longtemps repreché, commc nous l'avons déja
dit, aux ministres anglais, éleYes et successeurs
de
1'L
Pitt, de souteuir contre la Fra nce une
guerre de dynastie, et ils avaient pris une telle
habitude de s'en défcndre devant le Parlement,
qu'ils s'en défendaient encorc, rnemc quand le
peuplc anglais lui-meme, encouragé par Je succes,
n'était plus disposé
a
leur eri. faire un reproche.
Quant
a
l'Autriche, c'était embarrasser betiucoup
I'emp'ereur Fran<;óis que de lui dire brtitalemcnt
qu'on le mcnait
a
Paris pour détl'Óner sa fili e.
De plus, si la vacance
clu
tróne de Francé dormaiL
a
lord. Castlereagh l'espérance d'y voir monter
les Bourbons, dont il désirait vivement la res–
tauration,
ell~
luí faisait craíndre Bernadotte,
vers Iequcl l'empereur Alexandre paraissait sin–
gulierement porté, depuis les Haisoas que l'en–
trevue
í:l'
Abo et Ja question de Norwége ilvaient
fait naitre entre les cours de Russie et de Suede.
.Par tous ces motifs, lord Castle:rea-g-h pensait
sagement qu'il fallait ne ríen précipiter, et laiss'er
le rétabliss'ement des Bourbons naitre de la situa–
tion meme, sans vouloir substitucr l'actión des
hommrs
a
celle des événements. 11 <lit aux deux
partisqu'on avait publiquement offert
a
Napoléon
de négocier., que refuscr maintenant d'eb'voycr
des plénipotentiaires non-seulement
a
Manheim,
lieu indiqué par la France, mais
a
Chatillon, Iieu
indiqué par les alliés , ce serait aux yeux de
l'Europe se placer daos un état d'iriconséquence
vraiment embarrassant, qui serait vivemcnt re–
levé en Angleterre; qu'il fállait done négocier
avec Napoléon, qu'il le fallait absolument pour Ja
dignilé de toutes les p1:1issances. A J'empereur
Alexandre, pressé d'allcr
a
Paris, aux Prussiens,
avi<les de vengeance,
il
<lit en particulier qu'on
ne prenait pas, en agissant de la sorte, de bien
grands engagetnents, car en oflhii:it purement et
simplcment
a
Napoléon les fronLÍCl'CS de
1790,
ón
était certain de son rcfus; qu'en tout cas, s'il
acccp tait, on l'aurait tellement humilié, tellement
affaibli, que les uns dcv1·aient clre vengés, et les
autres rass-urés; que si, au contraire,
il
u'acceptait
point, alors on serait dégagé, et que l'Autriche,
prononcée elle - meme pour le rctour aux an–
ciennes frontieres de
1790,
sera it bien obligéc
de se rendre, et d'abandonner un gendre intrai–
table, avec lcqucl aucun accord n'était possiblc ;
qu'ainsi, en ne pressant rien' on amcnerait peu
a
pcu les choses au point ou on les souhaitait, sans
s'cxposer au reproche d'inconséquence, et sans
blesser la cour de Vienne, dont Je
CODCOUl'S
a
la
présente guerre était indispensable. A l'Autriche,
Jord Castlcreagh donna une satisfaction cutierc,
en appuyant l'opinion de ceux qui voulaient qu'on
trailat
a
Chatillon. 11 <lit
a
l'empereur Franc;ois et
tt
1\1.
de Mettcrnich, que, bien qu'il rcgardat
comme difficilc d'avoir avcc Napoléon une paix
stabl'e, i! était d'avis qu'on essayat de traiter avec
luí; qwe relativement aux questions de dynastie
qui pourraient s'élever en France, l'Anglcteri•c
n'avait.aucun partí pris, qu'elle cberehaiL meme
a
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