BRIENNE ET MONTI\llRAIL. -
FÉVRTER
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lagc de Morvilliers , qu'il le franchit , enlevat
l\'lorvillicrs, et traversát cnsuitc une plaine dé–
couvertc et ereuse, bordée par le bois d'Ajou.
Derriere les
70
mille hommes qui allAicnt s'en–
gager de la sorte, les gardes russe et prussiennc
devaient marcher en réserve, ce qui porterait
a
100
mille hommes le nombre des combattan ls.
Eiifin, aux deux extrémités de cetle lignc de
bataille, Colloredo, qui était
a
la gauche de
l'Aubc, Witr.gcnstcin et d'YMk, qui traversa ient
la foret de Soulaines, devaient, en exécutant un
double mouvement circulairc, énvelopper Napo–
léon avcc
70
mille hommes répartis sur les deux
ailes. Quelle probabilité qu'il s'en tirat, eUt-il
50, 40, et meme 50 mille combattants?
Telle élait l'opinion que les coalisés se faisaient
de la situation de l'ar:mée fr:rnc¡aisc. Cette situa–
tion était au moins aussi filcheuse qu'ils la sup–
posaient. Ce n'était pas
BO
mille combattants, ce
n'était meme pas
4.0
mille que Napoléon pouvait
opposcr aux
170
mille hommes de la coalition,
mais 52 mille au plus.
11
avait, il est vrai, une
po.sition bien choisie, son génie, et le dévoue–
ment de ses soldats
!
On va voir comment il usn
de ces ressources.
Des le matin,
il
avait remarqué un grand rnou–
vemcnt parmi les troupes de Bluchcr, et sachan!.
que le prince de Colloredo s'était montré de
l'autrc colé de l'Aube, vcrs Vandreuvres, il incli–
nait
a
quitter les bords de cclle riviere, et
il
se
replicr sur Troyes, pour s'y réunir
a
l\lortier et
te!IÍl' tele
a
la masse des coalisés qui scrnblait
prcndrc celle route, lorsq ue au milicu du jour il
apprit par quelques lransfugcs et par les disposi–
tions manifesles de l'ennemi, qu'il allait ctre
attaqué de front a Ja H.othiere. Des ce mornent,
il n'ét.ait ni de son caraclcre ni d'un bon calcul
de se retirer. Il résolut de faire tete
a
l'orage, de
reccvofr chaudement l'attaque qui s'annorn;áit,
sa uf
ú
se rctirer ensuitc des qu'il aurnH assez
résisté pour ne paraitrc 11i découragé ni vaincu.
Napoléon, comrnc nous l'avons <lit, avait su
droite appuyée sur l'Aube,
a
Dienville, ou se
lrouvaient, sous le général Gérnrd, la division
Dufour (prcmiere de réserve) et la division
H.icard détachée du corps de Mannont.
11
avait
son centre, formé des troupes <lu maréchal Víc–
tor,
a
Ja H.olhiere, coupant la grande route et
s'étendant jusqu'a la Giberie; il avait sa gauchc
en avant du bois d'Ajou, prolégée pa:r le ruis–
seau et le villagc de i\lorvilliers. Cctte gauche,
composée du corps de :Marmont, qui était réduit
en ce moment
a
Ja division de la Grangc, n'était
pas de plus de 4 rnille hommes. Elle possédait,
il est \'rai , beam:oup de canons que le maréclrnl
l\farrnont avait adroitement disposés, et de ma–
niere
a
contenir les Bavarois qua11d ils atlaque–
r aient le ruisseau et le villagc de Morvilliers.
Enfin, avec deux divisions de jeune garde, tO'lítC
la cavalerie et une nombreuse arlillerie, Napo–
léon se tenait en réserve derriere Ja Rolhiere, et
u1) peu sur la gauche, de maniere
a
secourir ou
l\Iarmont ou Victor. Il est certain,· d'apres les
appels faits le matin, qu'il ne comptait pas plus
de 52 mille hommes.
Le feu ne cornmen¡;a pas avant deux heures de
l'apres-midi. Bluchcr, apres avoir franchi avec
peine l'espace qui le séporait de nos positions,
s'avan¡;a sur la Rothiere
~n
deux fortes colonnes,
l'unc composéc des troupes de Sacken, l'autre
de celle d'Olsouviefi' et de Scherbatow. Une vive
canonnade s'engagea de part et d'autre; mais,
comme nous avions beaucoup d'artillerie, ce ne
fut pasa l'avantage des Russes, que Blucher c·o1n–
manda.itdans celte journée. Bientót celui-ci vou–
lut agir plus séri'eusement, et il poussa ses masscs
d'infanterie sur les premieres maisons de la Ro–
thiere. C'était la division Duhesme, du corps du
maréchal Víctor, qui occupait ce villagc. Nns
jenncs soldals, bien embusqués ·aans les maisons
et les jardins ' avec des barricades
a
toutes
les issucs, répondirent par un feu des plus
violents aux tentatives des soldats de Blucher, et
parvinrent ainsi
a
les arreter. Le maréchal Víc–
tor, abaltu en sórtant de Slrasbourg, avait rc–
trómré toute l'éncrgie de la jeunesse dans cette
grave ci1·constancc, et
il
était au plus fort du
dangcr, donnant l'exemple
a
ses soldals qui le
suivaient noblement .
•
Tandis qu'au centre Blucher Juttait coRtre cet
obstaclc, le général Giulay, ayant défilé derriei"c
!ui pour se porter s·ur rn·cnville, y
rencont.ranotrc aile d!'Oilc clablie en avant de ce bourg, et
sur les Lords de l'Aube. Le général Gérard avait
disposé une partie de ses troupes <lans l'intérieur
du bourg, l'autrc dans la plaine, en liai:;on avec
Ja Rothicre, et so us la protcclion d'un grand
nombre de bouches
a
fcu. Le général Giulay,
<l'abord accueilli commc Blucher par une forte
cCJnon nade, ne fut pas plus heureux, et voul'ut
en vain aborder le Lourg lui-mfünc. I1 perdit
beaucoup de monde, sans
y
pénétrcr. Afin de se
donner plus de chance de succes, en attnquant
Dienvilie par les deux cótés de l'Aube,
il
porta
la brigade Fresucl sur la rive gauche de cettc
riviere, pai· le pont d'Unienville situé un 'peu en
•