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LIVHE CINQUANTE-DEUXIEME.
moins d'un grand poids. l\fais, tnndis qu'on les
discutait, on avait tout
a
coup rei;u la nouvelle
que Blucher, quoique obligé de laisser en al'l'iere
plus de la moitié de ses troupes autour de
l\fayence et de .!\Ietz, était venu se placer en
avant de la grande armée de Schwarzenberg, et
se jeter
it
la
renconlre de Napoléon avec la
moindre partie de ses forces. Apres un tel évé–
nemcn t,
il
n'y avait plus
a
délibérer, et
il
étai t
indispensable d'aller au secours du téméraire
général de l'armée prussienne, sauf
a
décider
ensuite ce qu'on ferait ullérieurement. En eífct
Je 30janvicr, Jelendemain du combatdeBrienne,
Je prince de Schwarzenberg mit en mouvement
tous ses corps sur l'tme et l'a utre rive de l'Aube.
Blucher s'était retiré un pcu en a1·riere de Ja
Rothiere, sur les coteaux boisés de Trannes.
(Voir les cartes
nºº
G~
et 63. ) Le prince de
Schwarzenberg rangea derrierc lui les corps du
général Giulay et du prince de Wurtcmberg,
qui, en poursuivant le maréchal Mortie1·, s'étaient
arrctés
a
J3ar-sur-Aube. 11 dirigea sa gauche,
composée de toules les réserves autrichieones
sous Je prioce de Colloredo, sur Vandreuvres,
a
Ja ri\'c gauche de l'Aube, afio demenacer le flanc
dl'oit de Napoléon et de contenir Je maréchal
l\fortier. II porta sa droite, composée des Ilava–
rois,
a
Éclance,
IHJ
peu au dela de Trannes, et
envoya l'ordre
a
Wittgenstein, déja pai·ven u
a
Saint-Dizier, de s'avancer en toule hale ju qu
O.
Soulaines. Le corps d'York, qui avait été laissé
dcvant l\ietz , rei;ut égalcment l'ord1·e de se ren–
tlrc
a
Sui nt-Dizie1·. Enfin au centre, ou déja Je
prince de 'Vurlemberg et Je générnl Giu lay
étaient venus appuycr Hluche1., il di posa
u11
dernier renfort en
y
attirant les gardes russe et
prussienne.
C'était la une immcJ1se accumulation de forces,
car Blucher, aprcs le cornLat de Bricnne, con–
sc1·1'aÍt bien 28 millc hommes , eu complant
Sacken, Olsouvieff et Pablen; le général Giulay
et le prince ele Wurtefnbcrg ne luí amcnaient pas
moins de 25 millc hommes de secours; on en
supposait autant au maréchal de Wrede, autaut
au prince de Colloredo ; on estimait
a
30 mill e
les gardes russe et prussienne,
a
18 millc Je
corps de Wittgenstein,
a
1
o
mille celui du gé–
néral d'York. Le tout formait par eonséquent
'170 mille hommes, dont plus de 100 mille
conceotrés autour de Ja Rothic1·e. 01· , on voyait
Napoléoo en fa ee de soi, ayant une aile sur
l'Aube, l'auti·e sue le coteau hoisé d'Ajou, cL
pour toute défense au centre le village de Ja
Rothiere : qu'avait-il de troup·es d'tlns cette posi–
tion? 50 mille hommes, si on en jugeait par
le combat du 29 janvier, et peut-etre 40 ou
41) mille, si Mortier, qu'on savait
a
Troyes, avait
pu le rejoinclre. C'était done le cas ou jamais de
se jeter sur lui, avant qu'il füt renforcé, et de
l'accabler avec 170 mille hommes qu'on avait
da ns un espace de quelques licues, et dont
100 mille étaient déja réuois daos la plaine
de la Rothiere. Ces raisons décisives mirent fin
aux discussions des jours préeédents, et
il
fut
résolu qu'on livrerait bataille. D'ailleurs, entre
Chaumont et Bar-sur-Aube on ne pouvait pas
vivre, il fallait ava ncer ou reculer, et reculer ne
convenait
a
personne; Ja bataille, condition de
tout mouvement en avant, était inévitable. Seu–
lement,
1t
l'audace de Napoléon,
a
ses vives allu–
res, on regarda commc po ible qu il prit l'initia–
tive, et
011
voulut la lui laisser, car on se trouvait
sur les plateaux hoisés de Traones et d'Éclanee,
et l'on avait Lout avantage
a
l'y attendre.
La journée du 51 janvier se passa dans cette
allente . Napoléon étant resté immol.Jilc, on se
décida, le 1
•r
février,
a
J aller chercher dans la
plaine de la Rothiere . On avait un eertain espace
a
francbir ; les orps élaientencore a sez éloignés
1
s uns de aulres les chemins étaieot argileux
et uifficiles
a
pa1·courir, bien qu'iJ eu t fait froid,
et par tous ce moLifs la bataille ne pouvnit com–
mcncer de bonne heure. Le maréchal Blucher
fit
doublcr les
allelage~
de son arLillerie , afio de
n'clre pas retardé, mais cette précaution l'obli–
gca de Jai. scr la rnoitié d ses canons en arriere.
JI crnplo a lá ma tin ée
a
se porter de 'frannes
a
la Hotliicre. Le pla n conveuu était le uivant.
(Voir le plan de Brienne,
al'LC
nº 65.)
Le maréchal Bluche1· devait avec Sacken,
OlsouviclTJ Scherbatow et Pahlen, aborder· Ja
Rothiere et l'enlevcr, ce qui paraissait facile pour
lui , car il n'avait d'autre ob tacle
1t
vaincrc qu 'un
villagc situé au milieu d'une plainc prest¡ue unie ,
et s'élevant en pente insensible. Pendant ce
temps, le génél'al Giulay devait se porter sur
Dicnvillc, fJOUr cnlever le pont de l'Aubc ou Na–
poléon appuyait sa droile, tandis que le prince
de \Yurtemberg, ngissant; vers le coté opposé, a
lravcrs les bois d'Éelancc, devait enlever la
Gibe1·ie et Chaumenil, petils villages qui se re,
liaienL au bois d'Ajou, ou Napoléo1'l avait sa gau.
che. Enfin, le maréchal de Wredc dcvait atlaquer
cctle gauehe, formée par le mal'échal Marmont.
11 fallait pom· cela qu'il s'enfoni;at dans un. ruis–
seau fangeux et boisé qui passc au pied du vil-