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560

LJVRE

CINQUANTE

ET.

UNIEI\JE.

sur quoi que ce soit, et un parti aussi grave que

celui de suspendre Jes opérations militaires, était

fort difficile, ce sujet étant de tous celui qui devait

Je plus diviser les esprits, et irriler les passions.

Toutefois on venáit d'apprendre une circon–

stance fort heureuse pour la coalition, c'était

l'arrivée prochaine de lord Castlereagh lui-meme,

qui n'avait pas craint de quitter le

Forcign Office

pour aller représenter l'Angleterre aupres des

monarques alliés. Jusqu'ici l'Angleterre avait eu

pour agents lord Cathcart, brave militaire, peu

diplomate, et lord Aberdeen, esprit sage, mais

acensé d'etre trop pacifique. Ce n'était pas assez

au milieu de ce conseil de souver·ains, ou chaque

puissance était représentée par des empereurs,

des rois, ou des premiers ministres, que de

n'avoir que de simples ambassadeurs, que! que

füt Ieur mérite. Le cabínet britannique se décida

done

a

envoyer le plus éminent de ses membres,

lord Castlereagh, aupres du congres ambulant

de Ja coalition, pour y modérer les passions, y

,mai ntcnir J'accord, y faire prévaloir les prínci-

paux vceux de l'Angleterre, et, ces vceux satis–

faits, y voter en toute autre chose pour les réso–

lutions modérées contre les résolutions extremes.

Etrc sage pour tout le monde, excepté pour soi,

était par conséquent Ja mission, du reste assez

naturelle, de lord Castlercagh. 11 devait en outre

s'expliquer sur Je budget de guerre apporté par

Je comte Pozzo, et se servir de la richesse de

l'Angleterre pour fafre triompber ses vúes, en

jetant de temps

a

autre dans la balance non pas

son épée, mais son or. Aucun homme n'était

plus propre qüe lord Castlereagh

a

remplir une

pareille mission. Il se nommait Robert Stewart;

son frere Charles Stewart, depuis lord London–

derry, accrédité aupres de Bernadotte, était un

des agents de l'Angleterre les plus actifs et les

plus passionnés. Lord Castlereagb, issu d'une

fa–

mille irlandaise ardente et énergique, portait en

luí cette disposition héréditaire, mais tempérée

par une raison supérieure. Esprit droit et péné–

trant, caractcre prudent et ferme, capable tout

a

1

Je cite ici en ori¡;inal cette lettre intéressante et instruc–

tíve, qui peint exaetement les dispositions personnelles de

l'empereur d'Autriche pour sa filie, pour son gendre et pour

la France.

Le 26 décembre i8i3.

Chere Louise, j'aí re\!u hier ta lettre du

12

·décembre, et

j'ai appris avec plaisir que tu te portes bien. Je te remercie

des vceux que tu m'adresses pour la nouvelle année; ils me

sont précieux parce que je te connais. Je t'offre les miens de

tout mon creur. - Pour ce qui regarde la paix, sois persua-·

la fois de vigueur et de ménagement, ayant dans

ses manieres la simplicité fiere des -Anglais,

il

était appelé

a

exercer, et il

exer~a

en effet la plus

grande influence. 11 était sur presque toutes

choses muni de pouvoirs absolus. Avec son ca–

ractere, avec ses instructions, on pouvait dire

de lui que c'était l'Angleterre elle-meme qui se

dépla~ait

pour se rendre au camp des coalisés.

Partí de Londres

a

la fin de décembre, ayant fait

un séjour en Hollande pour y donner ses con–

seils au prince d'Orange, il n'était attendu

a

Fri–

bourg que dans la seconde moitié de jauvier.

Personne n'eut voulu, sans luí, prendre un partí,

ou donner une réponse. C'était

a

qui le verrait,

a

qui l'entretiendrai

t

le premier' pour le gagner

a

sa cause. Alexandre lui avaitmandé par lordCath–

cart qu'il voulait lui parler avant qui que ce füt.

Cette attente fournissait

a

M. de Melternich

un moyen de répondre au négociateur

fran~ais.

11

fit

dire

a

M. de Caulaincourt que l'Angleterre

ayant pris Je partí d'envoyer son ministre des

affaires étrangeres au camp des alliés, on était

obligé de l'attendre avant d'arreter le lieu, J'ob–

jet, et la direction des nouvelles négociations.

Outre cette réponse officielle, M. de Metternich

écrivit une lettrc particuliere pour M. de Cau–

laincourt, polie et prévenante quant

a

sa per–

sonne, mais

plein~

d'embarras quant au fond des

choses, et dont le sens était qu'on désirait tou–

jours la paix, qu'on l'espérait, qu'il n'y fallait

pas renoncer, mais qu'on devait patienlerencore.

Du reste, pas un mot qui

fít

allusion

a

la possi–

bilité de suspendre les hostilités. A cette lettre

en était jointe une de l'empereur Frarn;ois pour

l\farie-Louisc. Ce prince avait cru sa filie malade,

avait demandé de ses nouvelles, en avait

re~u,

et y répondait. 11 exprimait

a

Marie-Louise

beaucoup d'affection, un grand désir de la paix,

une moins grande espérance de la conclure, la

résolution d'y travailler sincerement, et enfin le

chagrín de rencontrer de graves difficultés dans le

bouleversement des idées, résultat de l'immense

bouleversement des choses depuis vingt années

1

dée que je ne la souhaite pas moins que toi, que toute la

France, et,

a

ce que j'cspere, que ton mari. Ce n'est que dans

la paix qu'on trouve le bonheur et le salut. Mes vues sont

modérées. Je désire tout ce qui peut assurer Ja durée de la

paix, mais dans ce monde il ne suffit pas de vouloir. J'ai de

grands devoirs

a

rempli1· cnvers mes alliés, et malheureuse–

meut les questions de la paix future, et qui sera prochaine, je

!'espere, sont tres-embrouillées. Ton pays a boul1iversé tou–

tes les idées. Quand on en vienta ces questions, on a

a

com–

battre de justes plaintes ou <les préjugés. La chose n'cn est

pas moins le vceu le plus ardent de mon cceur, et j'espere

que bientót nous pourrons réconcilier nos gens. En Angleterre,