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LIVRE CINQUANTE ET UNIEME.

se porter ensuite en masse dans l'angle formé

par la Marne et la Seine. Blucher en effet avait,

le 1•r janvier 1814, franchi le Rhin sur trois

points,

a

Manheim, a Mayence et a Coblentz, sans

trouver plus de résistance que la grande armée

du prince de Schwarzenberg le long du Jura, et

le prestige de l'inviolabilité de notre territoire

était ainsi tombé sur tous les points a la fois.

Effectivement

il

nous cut été bien difficile,

dans l'état actuel de nos forces, d'opposer une

résistance ' quelconque

a

cette masse d'envahis–

seurs. Le long de la frontiere du Jura , oú l'atta–

que était inattendue,

il

n'y avait aucun rassem–

hlement de troupes; seulement le maréchal

Mortíer, d'abord dirigé sur

Ja

Belgique avec la

vieille garde, revenai ta marches forcées du nord a

l'est, par Reims, Chalons, Chaumont et Langres.

Sur lafrontiere d'Alsace, le maréchal Víctor, avec

le 2• corps d'infanterie et le

?5°

de cavalerie, se

trouvait

a

Strasbourg, oú

i1

avait eu a peine le

temps de donner un peu de repos a ses troupes

et d'y incorporer quelques conscrits. Ce corps

qui, en puisant dans tous les

dépots~itués

en

Alsace, aurait du se reformer

a

trente-six batail–

lons et

a

trois divisions, ne comptait pas, apres

avoir pris a la

ha

te les premiers conscrits dispo–

nibles,_plus de 8

a

9 mille hommes d'infanterie,

mal armés et mal vetus. Le déplacement de nos

dépots, qu'on avait été obligé de reporter en ar–

riere, avait beaucoup ajouté aux difficultés de ce

recrutement. Pourtant le maréchal Víctor avait

dans le

!)•

corps de cavalerie pres de 4 mille

vieux dragons d'Espagne, cavaliers incompara–

bles, et de plus exaspérés contre l'ennemi. A

l'aspect des masses qui débouchaient par Bale,

Béfort, Besanc;on, le maréchal s'était bien gardé

de se porter a leur rencontre dans la direction

de Colmar

a

Bale; il avait, au contraire, rétro–

gradé sur Saverne, et avait pris position sur la

crete des Vosges, apres avoir Iaissé daos Stras–

bourg environ 8 mille conscrils et gardes natio–

naux, sous Je général Broussier, avec des ap pro–

visionnements suffisants. Ce maréchal si brave

était visiblement déconcerté. Pourtant sa belle

cavalerie s'était ruée sur les escadrons russes et

bavarois qui étaient venus s'offrir

a

elle, les avait

culbutés et sabrés.

Du cóté de Mayence, le duc de Raguse,

a

la

nouvelle du passage du Rhin, opéré le 1

cr

jan–

vier, s'était replié avec le 6° corps d'infanterie et

le 1

er

de cavalerie, laissant dans Mayence Je

4ª corps commandé par Je général Morand, et

réduit par le typhus de 24 mille hommes

a

11

mille.

11

avait recueilli chemin faisant

Ja

division

Durutte, détachée sur Cobleutz, et séparée de

Mayence ou elle n'avait pu rentrer. Sa premie11e

pensée avait été de courir en Alsace au secours

du maréchal Víctor; mais voyant

l'

Alsace envahie

par l'ennemi et presque abandonnée par nos

troupes qui avaient déja gagné le sommet des

Vosges,

il

était venu se placer sur le revers de

ces montagnes, c'est-a-dire sur la Sarre et Ja

Moselle, afin d'opérer sa jonction avec le maré–

chal Víctor vers Metz, Nancy ou Lunéville.

11

avait rencontré, Jui aussi, de grandes difficultés

pour le recrutemcnt de son corps dans Je

~aoque

de temps et le déplacement des dépóts.

11

comp–

tait environ 10 mille fantassins, et 5 miJle cava–

liers composant le 1

er

corps de cavalerie, et il

devait s'affaiblir encore en laissant queJques dé–

tachements a Metz et a Thionville.

Le maréchal Ney avait deux divisions de jeune

garde qu'il concentrait

a

ÉpinaJ. Nous allions

done avoir sur le revers des Vosges ]es maré–

chaux Victor, Marmont, Ney, entreMctz, Nancy,

Épinal , et sur les coteaux qu.i séparent Ja

Franche-Comté de la Bourgogne, c'est-a-dire a

Langres, le maréchal Mortier avec la vieille garde,

les uns et les nutres faisant face en reculant,

d'un coté

a

Blucher, qui

s'a,·an~ait

de Mayence

a

Metz

a

travers nos forteresses, de l'autrc

a

Schwarzenberg, qui ]es avait tournées en violant

la neutralité suisse, et qui se portait de Bale et

Besanc;on sur Langres. (Voir la carte n° 61.)

Ainsi la Lorraine, l'Alsace, la Franche-Comté

étaient envahies. L'ennemi promeUait partout

aux populations les plus grands ménagements,

et au début au moins tenait parole, par cainte

de provoquer des soulevements. L'épouvante

régnait dans nos campagnes. Les paysans de la

Lorraine, de l'Alsace, de Ja Franche-Comté ,

tres-belliqueux par caractere et par tradition,

- se seraient volontiers insurgés contre l'ennemi ,

s'ils avaient eu des armes pour combattre, et

quelques corps de troupes pour les soutenir.

Mais les fusils leur manquaient comme

a

tous les

habitants de la France, et la prompte retraite

des maréchaux les décourageait. lis se soumet–

taient done

a

l'ennemi le désespoir dans le creur.

A la retraite des armées se joignait la retraite

non moins regrettable des principaux fonction–

naires. Le gouvernement impé.1;ial, apres bien

des délihérations toutefois, avait pris la fücheuse

résolution d'ordonner aux préfets, sous-pré–

fets, etc., de se retirer avec les troupes, afin de

laisser

a

l'ennemi !'embarras' du reste tres-réeJ,