LUTZEN ET BAUTZEN. -
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'.l.8·15.
était sur la route méme de Leipzig, pr·et
a
porter secours, ou au maréchal l\facdonald, ou
au général Lauriston. Toute la garde suivait en
masse le prince Eugene sur Leipzig. Apres avoir
traversé ces nombreuses colonnes, qui le saluaient
des cris répétés de Vive l'Empereur
!
Napoléon
arriva devant Leipzig pour y etre témoin <lu
spectacle le plus animé.
La fusillade et la canonnade y étaient en effct
tres-vives. L'intrépide Maison, commandant la
premiere division du corps de Lauriston, atta–
quait avec sa réso1ution et son intelligence accou–
tumées la ville de I..eipzig, que défendait le
général Kleist avec l'infanterie prussienne. Des
terrains marécageux et boisés , traversés par
plusieurs hras de l'Elster, précedent, commc on
le sait, la ville de Leipzig, lorsqu'on vient de
Lutzen, et il faut franchir la longue suite des
ponts jetés sur ces <livcrs bras pour parvenir
jusqu'a la ville clle-meme. Des tirailleurs rem–
plíssaient les bouquets de bois environnants;
une forte nrtillerie, appuyée par l'infantcrie
prussienne, était au village de Lindcnau, qui se
trouve
a
l'entrée des ponts de l'Elster. Le général
l\'laison, apres avoir forcé les tiraillcurs ennemis
a
se replier, et mis une partie de son artilleric
en batterie, s'était porté au village de Leutsch,
situé
a
la gauche de Lindenau, et avec du canon
et une colonne d'infanterie, avait ouvert un feu
de flanc sur Lindcnau. 11 avait ensuite jeté dans
le premier bras de l'Elstcr un bataillon, qui,
passant
a
gué, dcvait prendre
a
rcvers les Prus–
sieos chargés de défendre la tete des ponts. Cctte
opération terminée,
il
avait formé une colonne
d'attaque qu'il dirigeait lui-meme, ctavait abordé
a la bafonnette les troupes chargées de défcndre
Lindenau. Les Prussiens, apres s'etre vaillam–
ment défendus, se voyant menacés d'etre pris
it
revers par la colonnc qui était entrée dans les
eaux de l'Elster, avaient évacué le premier pont,
en y mettant le feu, et Maison les avait suivis
a
la tete de son infanterie. Napoléou rcgarda quel–
ques instants avec sa lunette cette attaque si
bien conduite, vit ses soldats pénétrant pele–
mele avec les Prussiens dans Leipzig, et les
nombreux habitants de cette ville montés sur
les toits de leurs maisons pour savoir quel se'.rait
leur sort
!
Tandis que par un beau temps de mai
il
con–
templait cette scene, semblablc
a
tant d'autres
qui avaient rempli
~a
vic, une canonnade
rctentit tout
a
coup sur sa droite, juste du cóté
de Kaja, vers les villages ou il avait laissé en
faction le corps de Ney. Son esprit, qui avai't
calculé toutes les chances de cette vaste manreu–
vre, ne pouvait etre ni surpris, ni déconcerté.
11 écouta quelques instants cette canonnade, qui
ne
fit
que s'accroitre, et bicntót devint terrible.
- Tandis que nous allions les tourner, s'écria
Napoléon, ils essayent de nous tourner nous–
memes;
il
n'y a pas de mal, ils nous trouveront
prets pa1·tout. - Sur-le-champ
il
expédia Ney
au galop, lui cnjoignit de s'établir daos les cinq
villages, d'y tenir comme un roe, ce qui était
possible, puisqu'il avait 48 mille hommcs, et
qu'il allait etre secouru
a
droite,
a
gau'che, en
arriere par des forces considérables. Puis avec
la promptitude d'un esprit préparé
a
tout,
il
ordonna le renversement cntier de son ordre de
marche, chose si difficile
a
prescrirc
a
temps, et
a
exécuter avec précision' surtout quand on
opere avec de si
g1~andes
rnasses. D'abord il
recornmanda au géné1·al Lauriston de ne pas se
dessaisir de la ville de Leipzig, mais de n'y laisser
qu'uoe de ses trois divisions, et d'échelonner les
deux autres en arriere, la tete tournée vers
Zwcnkau, pour remonter l'Elster jusqu'a Zwen–
kau meme, et se porter sur la gauche de Ney.
(Voir la carte nº 58.) 11 prescrivit
a
Macdonald,
dont les instructions étaicnt de se diriger sur
Zwenkau, de se rabattre de Zwenkau sur Eis–
dorf, petit village placé tout pres de la gauche
de Ney, au bord du
Floss-Graben.
Le
Floss–
Graben
était ce canal d'irrigation qui travcrsait,
avons-uous dit, la plaine de Lutzeo, et que nos
troupes avaient du franchi1· pour se rendre
a
Leipzig, tandis que le corps de Ney, établi
a
Kaja, était resté en dec;a, et y appuyait sa
gaucbe. Macdonald devait remonter le
Floss–
Graben
jusqu'a Eisdorf et Kitzen, et
a
cet.tehau–
teur il était en mesure de flanquer la gauche de
Ney, et de déborder meme l'ennemi venu de
Zwenkau. Le prince Eugene, laissant Lauriston
a
Leipzig, deva it avec le reste de ses troupes sou–
tenir l\lacdonald. 'felles furent les dispositioos
a
la gauche de Ney. Marmont étant demeuré sur
les bords du I-lippach , en arriere de Lutzen, était
en ce moment en marche. Napoléon luí ordonna
de venir se placer
a
la droite du corps de Ney,
a
Starsiedel, l'un d'es cinq villages que ce córps
avait été chargé de garder. Le général Ber–
trand, qui était encore un peu plus loin, cut
ordre de déboucher sur les derrieres memes de
l'ennemi, en se liant
a
l\farmont. Ainsi Ney allait
etre flanqué
a
droite et
a
gauche par des corps
qui devaient non-seulement l'appuycr, mais se