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L' JNVASION . -

Dt.CEMilRE

1815.

249

il fallait au moins lcur parlcr franchcmcnt, et, en

avouant les torts passés, s'appuyer sur

la

bonnc

foi présentc, que la lettrc du 2 déccmbrc mettait

hors de doutc, pour obtenir du Corps législatif

la déclaration formellc que le gouvcrncmcnt

voulait la paix, la voulait honorable, mais la

voulait cnfin.

Napoléon permit de certaincs communications

un pcu plus amplcs nu Sénat, mais beaucoup

plus rcstreintcs au Corps Jégislatif. Le rapport

de.~

M. de Saint-Aignan, par cxcmplc, dut ctrc donné

avec des altérations dont l'intcntion était de

fairc disparaitre la trace de ce qui s'était passé

a

Praguc. Les lettrcs du 16 novcmbrc et du 2 dé–

ccmbrc durent toutefois ctrc communiquées

toutes dcux, car il était impossiblc, en produisnnt

cclle du 2 décembrc, de rctcnir ccllc du

16

no–

vcmbre, l'une se référant

¡,

l'autrc. Quant

a

la

forme <les communications,

il

fut convcnu que le

Sénat et le Corps législatif nommeraicnt chacun

de lcur coté une commission de cinq mcmbres,

et que cettc commission se rcndrait chez l'archi–

chancelier Cambacéres, pour prendre connais–

sance des pieces annoncées. En attcndant, on

s'oceupa dans le sein du Sénat et du Corps lé–

gislatif du choix des comrnissaircs destinés

l1

re–

cevoir les communications du gouvcrncment.

Le Sénat nomma de grands personnnges qui,

saos etre tout

a

fait dévoués, étaient incapablcs

en ce momcnt de la moindre imprudcnce. 11

désigna Ml\f. de Fontancs, de Talleyrand, de

Saint-1\'larsan, de Barbé-Marbois, de Bcurnon–

ville. Ces noms ne révélaicnt ni hostililé ni com–

plaisancc. Au Corps législatif il en fut autrement.

Le gouvernemcnt avait bien indiqué sous main

ses préférenccs, mais on n'en tint aucu n compte.

Ce corps, qui jusqu'ici avait été trop peu melé

a

la politique pour clre constitué en partis distincts,

et pour avoir ainsi ses candidats désignés d'a–

vnnce, les chercha comme

a

tatons, et fut obligé

de rccourir

a

plusicurs SCl'Ufins pour tl'OUVCr en

quclque sorte sa proprc penséc. Du premier

abord , il repoussa les candidats du gouverne–

ment; puis, apres y avoir réOéchi, il nomma

des hommes distingués, indépendants, qui jouis–

saicnt, sans l'avoir IJriguée, de !'estime de leurs

collcgucs. Ce furent

l\'I.

Lainé , célebre avocat de

Bordeaux, ayant vivement adopté autrcfois les

idées de la Révolution, rcvenu depuis

a

des opi–

nions plus modérécs, doué d une ñme honn ete

mais passionnée, d'une éloquence étudiée mais

brillante et grave; M. Ra nouard, homme de

lcures en réputation, autcur de la tragédic des

Tempriers,

honnCte hommc, vi

f,

spirituel et sin–

ccrc; l\I. l\Iaine de Biran, esprit médilalif, voué

aux étud cs philosophiques, l'un des savanls que

Napoléon accusait

d'icléolo,qie;

enfin MM. de

Flaugcrgues et Gallois, ceux-ci moins connus,

mais gens d'esprit et partisans trcs-prononcés de

la liberté politique. Tous,

a

la vcillc d'étre cn–

gagés dans une lutte contre le gouverncment,

étaicnt mis prcsque sans y penscr sur la voie du

royalisme

(nous enlendons par cette dénomina–

tion un pcnchant déclaré pour les Bourbons avcc

des lois plus ou moins libérales), mais ils n'y

étaicnt pns encore, au moins les trois prcmicrs,

les sculs qui jouissent alors d'une certaine r e–

nomméc.

Ces choix une foi s faits, chaque commission se

rendit., sous la conduile du présidcnt de son

corps, chez le prince archichancelier. La com-–

mission du Sénat fut admise la premicrc, c'est-a–

dire le 25 décembre. Elle r cc:ut les communi–

cations de M. de Caulaincourt lui-mcme, écouta

tout, ne <lit rien, et, :iprcs avoir entendu

Ja

lec–

ture des letlres du

1G

novcmbrc et du 2 décem–

bre, ne conserva pas un doute sur la faute qu'on

avait commise en n'acceptant pas purement et

simplcment, et tout de suite, les propositions de

Francfort. En clfet, des esprits lcls que l\Jl\L de

Tallcyrand et de Fontancs voyaient bien que

c'était la Icttre du 2 déccmbre qu'il aurait fallu

écrire le 1

G

novcmbrc. l\f. de Fontanes

fut

chargé

de préscnler au Sénat le rapport sur les opéra–

tions de la commission sénatoriale. Chose bizarre

!

la communication adrcssée aux hommes les plus

· sérieux était juslcmcnt la moins sérieuse, parce

qu'ellc était puremcnt d'apparat. Le

21t-

cut licu

Ja scconde communicalion, cclle qui, dcslinée

a

des personrnigcs moins importants, devai t avoir

cependant une importancebcaucoup plus grande.

Comme si l'on eut voulu en rapetisscr encore

le caraclerc, on avait chargé non pas le mi–

nistre lui-meme, mais !'un de ses subordonnés,

l\f.

d' Hautcrivc, hoinme d'u n véritable méritc du

rcsle, de s'aboucher avcc les mcmbrcs du Corps

législatif, et de lcur exposcr Ja marche des négo–

ciations. La conférence se tint égalcment chcz

le prince archichancelier. Au licu de grands

personnage , connus et froidcmcnt allentifs, on

eut dcvant soi des hommes

a

visage nouvcau,

curieux, pa sionnés, écoutant ce qu'on lcur di–

sait, mais dé irant et deman<lant cncore davan–

tage. Le rapport Ju, ils en réclamcrent une nou–

velle lccture, et on ne la Icor refu a pas. LeUI'

premicre imprc sion fut une sortc d'étonnement.