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LIVIlE CINQUANTE ET
UNIEME.
accélércr, étaient loin de r épondrc
a
l'étendue et
a
la proximité du dangcr. Douze ou quinze mille
conscrits jetés précipitamment dans les cadr es
de la gardc, vingt ou viogt-cinq mille dans les
dépóts concentrés
a
París, présentaient
un
fa ible
sccours pour les maréchaux qui ·allaicnt se
r eplier sur la Champagne et la llourgogne avee
les débris de Leipzig et. de Hanau. Napoléon se
décida, quoiqu'il y cut répugn é d'aLord,
a
se
servir des gardcs nationales.
II
y avait la des
forrnations tou tes prctes, auxquelles, da ns un
danger aussi pressant, on était for t autorisé
a
rccourir. Napoléon chargea les préfcts de In
Bourgognc, de la Picardie, <le la Nor ma ndie,
de la Touraine, de la Bretagne, de s'adr csser
aux communes ou le mécontentemcnt n'avait pas
éteint le patriotismo, et de leur dcrnandcr des
compagnies de gardes nationalcs d'élite. La levée
de
500
millc hommes sur les ancienocs classes
et de
160
mille sur la classc de '1815, n'ayan t
pu, fa ute de temps, s'cxécuter dans ces con trées,
on n'avait pas lieu de s'y plaindre des appcls
trop répétés, et on ne pouvait pas rcfoscr , i1
quclque opinion qu'on appartint , de fa ire un
dcrnier eífort pour rcjctcr l'enncmi hors d u ter–
ritoire. Napoléon assigna pour point de réunion
i1
ces gardes nationales Paris, Meaux, l\fontereau,
'froycs. L'Alsace, la F1'anche-Comté durent en
fournir aussi pour occuper les défil és des Vosges.
l\'lalheureuscment on manquait de fo sils pour
les armer, car malgré les ateliers créés
a
París
et
a
Vcrsailles, les armes
a
fcu n'arrivaicn t point
en nombre suffisant, et on avait, commc nous
l'avons déja <lit, plus de bras que de fu sils, bien
qu'on cut tant prodigué les hras depu is la l\Ios-
kowa jusqu'au 'fage
!
·
Rcslait une r essourcc
a
laqucllc Napoléon était
prct
a
fairc appcl, san s s'inquiéter du sacrif¡cc
qu'elle entrainerait, c'était celle que lui oífraicnt
les deux armées d'Espagne, lesquelles r éun ies en
avant de París lui auraient procuré quatrc-vingt
ou cent millc soldats admirables. Avec cettc res–
sourec seule il aurait eu Je moyen d'écrascr la
coalition, et de la précipitcr daos le Ilhin . Mais
il était bien douteux qu'il put en disposcr en
temps utile. Le duc de San-Carlos, partí pour Ja
fronti ere de Catalogne, l'avait franchic, s'était
cnfoncé en Espagne, et n'avait plus donné <le
ses nouvcllcs. Le malheureux Fcrdinand, aussi
prcssé de quiLter Valcrn;ay pour l'Escurial, que
Napoléon de ramencr ses soldats tic l'Adour sur
la
Scine, se mourait d'impatience. l\Iais r ien
n'arrivait. Joseph , saisissant
a
propos la circon -
stance pour sortir d'une situation fausse, avait
écrit
a
Napoléon que devant l'invasion du terri–
toire il n'avait plus de condition
ti
faire, de
dédommagemcnt
i1
stipuler, et qu_'il demandait
a
servir l'État n'importe en quelle qualité et en
quel lieu. Napoléon l'avaitrec:;u
a
París, luí avait
rcndu sa qualité de prince franc:;ais, ainsi que sa
place au conseil de régence, et avait décidé que
sa ns lui donner, comme dans le passé, le titre de
ro i d'Espagne, on l'appellerait
le roi Joseph,
et
sa femme
lct
reine Julie.
Cct arrangcment qui avait l'avantage de réta–
bfü l'union dans le sein de la famille impériale,
était jusqu'ici le scul résultat des négociatfons de
Valen<;ay. En attendant qu'il put rappeler de la
fronti ere d'Espagne la totalité des forces qui s'y
trouvaient, Napoléon voulut du moins en retircr
une partie. Il prcscrivit aux maréehaux Suchet
et Soult de se tenir prels
a
marcher avec leurs
armécs tout cntieres vcrs le nord de la France,
et provisoirement de fairc partir, le maréchal
Suchct douze millc hommcs de ses meillcures
troupes pour Lyon, le marécbal Soult quatorzc
ou quinzc millc, également des meilleures, pour
Pa~is .
Des relais furent préparés sur les routcs
pour transportcr l'infautcric en poste, ainsi qu'on
l'avait fait en d'autres temps. Ccrtainement les
dcux maréehaux Suehet et Soult allaient etre
fort affaiblis apres ce double déLachemcnt, mais
comrnc on ne leur <lemandait que de rctardcr
les progres de l'ennemi da ns le midi de la
France~
Napoléon espérait qu'avec ce qui leur restait ils
en auraicut les rnoycns. D'ailleurs, d'aprcs des
ordres aolérieurs, ils avaientenvoyé
a
Bordeaux,
a
Toulouse,
a
l\footpcllier,
a
Nimes, des cadres
oú les conscrits de ces départcmcnts, levés,
haLillés, armés
a
la lu\te, commcn¡¡aient
a
se
r éunir. Il est vrni que les hostilités nous sur–
prcnant, la commc sur les autres points, avant
l'époquc pr évuc du mois d'avril, il dcvait y
avoirs au li cu de 60 millo hommes,
a
peine
20 millo hommes dans les quatre dépóts. 'fclle
quellc, dans notre extreme détrcssc, cettc res–
sourcc n'éLait point
a
dédaigner.
Aprcs avoir donné sos soios
a
la création de
ces forces, Napoléon s'occupa de leur emploi.
Ilico qu'a la premicre démonstraLion de l'ennemi
vers In Belgiqu e il cut supposé que son principal
cffor t se dirigcrait de ce cóté, des le passagc du
lll1in
i1
Bt\le il n'cut plus un doute sur la marche
de l'invasio n. 11 vit que, tout en poussant le corps
de Bl uchcr de l\Iayence sur l\'leLz pat• la route du
Nord-Est, la coalition voulait cepeudants'avancer