L'INVA ION. -
DtCEMBRE
1815.
c'cst
i.1
ces howmcs cxlraordinairc qu'il
1p¡.rn 1·–
tient de jalouscr Napoléón. l\lais commcnt un
pcrsonnagc obscur, inconnu jusqu·ici , n'a ya nt
ni épéc ni éloqucncc, n'ayanL été melé qu'aux
tracasserics de son ilc, comment avail-il pu se
pcrmetlre de .ialouser le vainqueur de Rivoli, des
Pyramidesctd'Austerlilz? ll l'avait osé pourtant,
car les passions pour s'allumer n'atLendcnt Ja per–
mission ni de Dieu ni des hommes , clics s'allu–
ment comrne ces feux qui
rava~entlcsciLés
ou Je
campagnes saos qu'on en sache l'origine. Lor -
qu'un bomme supéricur sort du pays ou il es t
né,
il
y laisse ou des amis ardents ou des jaloux
implacables. Le comte Pozzo était de ces derniers
a
l'égard de Napoléon; mais,
il
fau t le r econnailre,
en cctte occasioo Je jaloux n'était pas indigne du
jalousé. En cffet Dieu lui avait accordé un genre
de génie aussi admirable que celui des batailles,
de l'éloquenec ou des arts, le génie de la poli–
tique, c'est-a-dire cette sagacité qui démele les
évéoements humains daos leurs causes, leur en–
chainement, leurs conséqucnces, qui décou vr e
comment
il
faut s'en garder, ou s'y meter: génie
rare que les grandes ames appliquenta lelll' pays,
les petitcs
a
elles-memes, qui perd en granrleur
ce qu'il gagne en égoisme, mais qui reste fund es
doos les plus précieux de l'esprit, et ne laisse
presquejamais ina
per~m,
oisifou inutile, le mortel
qui en est doué. Le comtc Pozzo en fut la preuve,
preuve pour nous bien malheureuse, car lui,
jusque-la saos renom, saos influence, presque
suns patrie,
il
contribua singulieremeot
a
la
ruine de Napoléon, et par conséquent a Ja nótre.
11 avait parcouru successivement tous les pays
pour nuirc
a
l'homme qu'il ba!ssait d'abord
l'Angleterre, puis l'Autricbe, puis la Russie et la
Suede, quittant alternativement les cours qui se
rnpprochaient de la France pour se rendre aupres
de celles qui s'en éloignaient, revenant aupres
des premiercs quand elles rompaient avec nous,
et toujours souffiant pa1·tout l'ardeur doot
il
était
animé. Employé it toutes choses, tantót il étai t
cnvoyé
a
Londres pour arracher
a
l'Angletcrre
}'argent dont on avait be oin, tantót ch z Berna–
dotte, qu'il méprisait et dominait, pour l'ameoer
ur le champ de bataille de Leipzig. Maintenant,
placé aupres d'Alexandre en qualité d·aide de
camp,
il
excrgait, avec son accent italicn, sa
gesticulation vive, son rei1 ardent et fie1', une
action puissautc, justifiée du reste par une per-
picacité, une sureté de jugement sans égales.
Cet homme a ait dit
a
Al xandre la trisl vérit ·
sur la France, comme sil 1avait parcourue tout
cntiere, et pourlant jJ y avait d • ann · • qu'il n
l'avaiL ue. - Ne vou lais cz pa iotimidcr, tui
di aiL- il san cessc, pnr l"idéc d·aller hraver ch •z
lui le colo e qui vo u a tou opprimés i long–
tcmps; le plus diffi cilc t fa it, c'éta it <le lera–
mener des bord de la Vi tulc aux bords du Rhin.
De Francfort
a
París il n'y a qu'un pas commc
distance, il
a moins cncoi·c commc difficulté.
Les for ·es procligicu ·e de la Francc ont été dé–
pen éc au d hor , il n'cn reste plu ri cn au- de–
dan ; la Franceell e-meme est dégout éc, révoltée
du joug qu'elle su lii t. l\farcliez done
S<1n
reiache,
marchez vite, ne lai cz pas rcspir ·r le géant;
allcz
a
ces Tuileries dont il a fait on rcpaire,
et la Fraoce épuisée vou s l'abanJonnera ans r é–
sistance. Vous serez étooné de la facilité de cette
reuvre, mais il faut arriver
a
París. A peine votre
épée aura-t-ellc bri é la clrnine qui ticnt Ja France
opprimée, que la France vous liv¡cra elle-mcme
son oppresseur et le vótre.
Ce soot ces vérités rcdoutables, constamment
préscote a l e prit clairvoyant du comte Pozzo,
qui lui valureot une influcoce décisive daos la
fatalc année 1814. Alexandre était heureux de
l'enlcndre, car il seutait en 1écoutanl toutes ses
passions remuécs, et apres l avoir entendu
il
échappaiL a la modératioo de
1\1.
de l\fetternich,
il
vo ulait comme les Prussiens marcher en avant,
fran chir le Rbio ,•et essaye1· contre Napoléon une
derniere et supreme lutle.
Lorsque les propo itions de Francfort furent
coonues des principaux agents de la coalition,
elles produisirent parmi eux une agitation
extreme, et encoururent de leur part une amere
désa pprobation. S'arretcr était suivant eux une
faible se dé astreu e, car on donnerait a l'ennemi
commun le temps de rétab lir ses forces. Lui con–
céder la Fl'ance avec le Rhin, les Alpes, les Py–
rénées, c'était lui assurer les moyens de ne jamais
lai ser l Europe en repos. 11 fa llait lui oter non–
seulement le Rhin et les Alpes, mais la Fraoce
elle-meme, et n admeltre pour contenir le peuple
fran .ai d'autre chefs que les Bourbon . 11 fallait
d ailleurs r établir en Europe les fami lle injuste–
ment dépouillée , r établir l'empire du droit, re–
con tituer en un mot l'ancienne Europe. Pour
y
r éu
ir il
ne restait qu'un pasa faire, mais
il
fal–
Iait le fai re tout de suite, saos reprendre haleine,
san se r po er un jour.
Malheureusement des l ttre écri lcs de France,
de rappor d agents secrct d
~
renseignemenls
fournis par les amis de Ja mai on de Bourbon,
confirmaient ces dires, et dé oilaient d'heure en