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5:!8

LIVRE CINQUANTE ET UNIEl\IE.

ta ch e, pour sa personne une fin crue11e. Ce

prince, né avec des sentirnenls boas et généreux ,

dou é de quelque esprit el d' une Lravoure hé–

roi'que, n'avuit pas assez de jugement pour dis–

cerner que si avec la France il courait Je double

danger d'etre abandonné par la vicloire et par

Napoléon, il avait

fa

certitudc avec la coalition,

;1pres aYoir été ménagé, caressé pendant qu'on

aurait hesoin de luí , d'c tre bientót S•-lCJ·ifi é aux

vi eill es royautés italienncs, el d'ctre ainsi ¡1 la

fois dé tróné et déslionoré. N'aya nt pas assez de

porlée d'esprit pour apercevoir cet avenir ,

n'ayant. pas des príncipes assez arr ctés pour

préférer l'honneur

a

l'intéret,

j)

devait :llotter

quelques jouris entre mille sentiments contraires,

pour finir par une défection déplorable.

A peine revenu dans ses Élats, trouvant Ja

r eine convertic

a

son opinion, il était entré en

pourpm·lers avec la légation autrichienne, et ne

disputait plus que sur l'étend uc des avantages

qu'on lui accorderait. PassanL touL

a

coup , avcc

]'extreme mobilité de sa nature, du déscspoir

a

une sorle d'incsse d'ambition, il se Hvrait en

ce moment aux r eves les plus étranges, et se

flattait d'etre bientót le roí et le héros de la n n–

tion italienne .

JI

avait éLé frapp é en traversant

l'Italic d'une disposition asscz générale ch ez les

Italiens, c'ét.ait de devenir indépendants de l'Au–

triche aussi bien que de la France . Saos doute

les nobles, les pret.res, Je peuple memc souhai–

taient Je r etour

a

l'Autriche, parce qu e pour les

uns c'était Je retour

a

leur ancien état, pour k s

autres l'exemplion de la conscription. La bour–

geoisie au contraire, éprise des idées d'indépen–

dance, disai t que c'était bien d'échapper

a

Ja

France, mais tout aussi bien de ne pas retomber

sous Ja main de l'Autriche; qu'il n'y avait au–

cune raison d'al1er de l'une

a

l'autre ' d'etre

ainsi toujours Je jouet, la victime de maitres

étrangers ; que l'Autriche devrait se trouver

heureuse de ne plus voir l'Italie aux mains de

Ja France, et la France de ne plus

Ja

voir aux

mains de l'Autriche; que pour l'une et l'au tre

l'indépendance de la Péninsule était un moyen

terme acceptable, désirable meme, et au fon d

plus avantageux que Ja possession directe, car

l'ltalie soumise

a

l' une des deux puissances serait,

contre celle qui ne l'aurait pas, un dangereux

moyen d'attaque, et pour celle qui la posséderait,

un sujet toujours révolté, toujours pret

a

de–

venir un ennemi furieux. Ces idées avaient en–

vahi la partie la plus active et la plus cultivée

de la bourgeoisie. l\furat, placé au fond de Ja

Péninsule,

a

égale distance des Fran<;HÍS et des

Autrichiens, ayant intéret

a

se sauvcr sans

trahir Napoléon, capable avcc ses talents et sfl

gloire militaires de créer une armée italienne,

l\'.lurat avait paru au partí des indépendanl s

propre

a

devenir leur héros.

JI

pouvait en effrt

dire aux Autrichiens : Je ne suis pas la France;

aux F1·a1JC;ais: Je ne suis pas l'Autriche; il pou–

vait dirc

a

tous: l\Iénngez-moi, et acceptez-moi

comme ce qu'il y a de moins hostile pour vous,

et meme cornme ce qu'il y a de plus avantageux,

si vous savez comprendre vos intérets véritables.

- Les partisa ns de J'indépendance avaient don e

entouré l\'.lurat, lui avaient prodigué les pro–

messes et les flatteries, et l\'Iurat qui, dans cet

étnt de fermentation d'esprit, pensait

a

lout,

était pret

a

tout, les ª''ait accueillis et acceptés

pour ses agents. Ceux-ci,

a

Florence,

a

Bologne,

a

Rome, le célébraient comme le s11uveur rle

l'Jtalie, et

annon~aient

en prosc et en vers sa

missioo providentielle.

Les Autrichiens naturellerncnt n'accueillaient

guere ces id ées , mais ils ne les décourageaient

pas absolument , et laissaient espérer

a

Murat,

sous le prétexle de l'indemniser de la Sicile, un

agrandissement assez notable dans l'Italie cen–

trale. Mural, dans I'élan de son ambition, ne

mettant plus de bornes

a

ses désirs, avait pensé

que peut-elre il rencontrerait aupres de Napo–

léon plus d'encouragement qu'aupres des Autri–

chiens pour sa nouvclle royauté italiennc. De–

venu daos ces circonstances plus" mobile encorc

que de coutumc, cessant. d'apercevoir le péril du

cóté de l'alliance fraiu;aise quand il croyait y

trouver plus de chances de grandeur , se ber«;ant

de J'espérance de voir tous les Italiens se lever

en masse s'il leur promcttait J'indépendance et

l'unité, il ·se disait que si Napoléon Jui permet–

tait de proclamer celle índépendance et cetle

. unité, et de s'cn fairc le représentant,

il

appor–

terait au prince Eugene non-seulement le se–

cours de l'armée napolitaine, mais celui de 100

mille Jtaliens accourus

a

sa voix; qu'alors

il

se

sauverait en s'agrandissant, en s'honorant, en

réunissa nt tous les av:intagcs

a

la fois, et notam–

ment celui de conserver, s'il était allié de la

France, les officiers fran<;ais qui étaient en grand

nombre dans son armée, et qui en constituaient

Ja principale force.

T elle était l'espece de tourbillon d'idées qui

s'était produit dans la tete enflammée de ce mal–

hcureux prince. Par Je découragement conduit

a

la pensée funeste d'abandonner la France et