L'INVASION. -
DÉCEMBRE
1815.
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ncur, et qui importaicnt autant
a
l'Espagne qu'a
nou&. La pvemiere consistait
a
stipuler que Fér–
dinand VII servirait
a
Charles IV la pcnsie-n
a
Jaquellc Joscph s'était obligé, et q,ui avait été
tres,..ioex,actcment payée; la seconde, qu'il ae–
corderait amnistíe entiere aux Espagnols qui
s'étaient attachés
a
la France; la troisi.eme, que
I'Espa·~ne
conscrverai! non-seulem.ent son terri–
toire continental actueIJement restitué, mais son
territoire colonial, et qu'aucune de ses colonics
ne serai.t cédé.e
a
la
Grande~Bretag.n'e.
11
n'y avait
rien dans ces conditions que Ferdínand, en con–
sultant son creur de fils, de roí et d'Espagnol ,
put refuser.. Restait enfin une derniere clause
plus difficile
a.
énonceu que les autres, mais que
Fcrdinand VU, poµr redevenir libre, était bien
capable d'.aecuelllir, c'était d'épouser la filie de
Joseph Bonapaile. M. de Laforest devait
~tre
plus réservé quant
a
celle-si, mais
il
avaít ordre
de l'articuler apres les au tres,. quand le momcnt
de tout dire serait venu. Ce traité conclu et si–
gné, un
personna.gede confiance choisi de con–
cert avec les princes espagnols, irait tres-secre–
tement le povter
a
la régenee' afi.n de ne pas
donner aux Anglais et aux chefs du parLi libéral
Je temps d'en empecher la ratification. Cette ra–
tification obtenue, Ferdinand, accompagné de
son frere don Carlos, de son oncle don Antonio,
pris6nniers éomme lui
a
Valern;ay, quitterait la
France pour remonter sur le trone des Espagnes.
Tandis qu.e M. de Laforest se mettait en route,
Napoléon, afia qu'il n'y efü pas de temps perdu,
fit
venir de Lons-le-Saulnier, ou iJ était en sur–
veiIJance, le duc de San-Carlos, personnage con–
sidérable, auhrefois· l'un des· famiJiers de Ferdi–
nand VII, l'accu·eillit de la- fac;on la plus arnicale,
l'entretint longuement, réussit
a
le persuader, et
le
fit
partir ensuite pour Valern;ay, afin qu'il
allat
seconder M. de Laforest, qui
rencon~rait
des
difficultés auxquelles on ne se serait pas attendu,
tant cette coupable affaire d'Espagne devait etre
suivie de punitions, de tout genre, petitcs et
grandes!
1\1.
de Lafo1 est, en para.issánt
a
Valen~ay,
avait extremement surpris Ferdinand VII. Ce
prince, pFisonnier dcpuis pres de six ans avec
si:m frere et son oncle, avait vécu·dans une igno–
rance presque complete de ce qui se passait en
Eu11ope, mais avait pu voir cependant par quel–
q l!
l.CSjournaux fra1,)i;ai·s qu-'on lui laissait lfre , que
la guerre d
!Espag.nese prolongeait iodéfiaiment,
que par conséqúent ses sujeLs se défendaient,
que l'Europe nen plus n'était pas so'wmrse puisque
la guerre était incessante avec elle , et il avait
assez de sagacité pour juger que des lors sa
ca~se
n'était pas entierement perdue. On soup<;onnait
<n1
outre que le curé de Vaiern;ay, chargé de lui
<lire la messe et de le confcsser, l'informait de
ce qu'il avait intéret
a
savoir, et probablement
lui avait fait connaitre la gravité des événements
de
1812
et de
1815. 11
aurait done pu n'etre pas
complétement étonné des communications de
M. de Laforest. Mais J'infortune et la captivité
avaient singulierement développé cbez ce princc
les dispositions naturelles de son caractere, Ja
défiance et la
dissimulati~n.
Tout ce qu'il avait
d'intelligence (et
il
n'cn manquait pas) il l'em–
ployait
a
regarder autour de lui,
a
rechcrcber
si on ne voulai t pas luí naire,
a
se taire,
a
ne
pns agir, de peur de donner prise
a
la volo·nté
malfaisante de laquelle
il
dépendait depuis tant
d'aunées. Dissimuler, ti·omper meme, lui sem–
blaient de légitimes défenses contre l'oppression
a
laquelle
il ·
était soumis, et la politique qu i
l'avait conduit de .Madrid
a
Valenc;ay lui donnait
assurément bien des droits. La défiance était ar–
rivée chez luí
a
un tel dcgré qu'il était en garde
c@ntre ses plus fideles serviteurs, contre ceux
memes qui étaient détenus en France pour sa
cause, et qu'iJ était toujours pret
a
les regarder
comme de secrets complices de Napoléon . Du
reste
il
n'était pas tres-malheureux. Se confesser,
bien vivre, se promener, ne courir aucun dan–
gcr, composaient pour luí une sorte de bien-etre
auquel
il
s'était habitué. Son
ame
dépourvue de
ressort pliait ainsi sous l'oppression, mais en
pliant s'enfonc;ait profondément en elle-meme, et
lorsqu'on voulait l'en faire sortir s'y refusait
obstinément, comme un animal
a
la fois timide
et faro uche, que les plus grandes caresscs ne
pc11J.veot tirer de sa reti1aite. Son frere don Car–
los
éta~t
plus vif, sans
~tre
plus ouvert; son
oncle était
a
peu pres stupide.
Quand
1\1.
de Laforest vint soudainement ap–
prcndre
a
Fer<linand VII que Napoléon songeait
a
luí rendre la liberté et Je tróne, sa p1·emierc
idée fut qa'ou le tnompait, et qu'il y avait sous
cette démarche quelque perfidie cachée. Les mo–
tifs qu'alléguait M. de Laforesi.., pour éviter J'a·veu
trop clair de nos malbeurs, et qui consistaient
a
dire que Napoléon agissait ainsi pour anacher
l'Espagne aux Anglais et aux anarchístes, n'é–
taicnt pas de nafure
a
prod.uire beaucoup d'illu–
SÍ'OI:l,
et Ferdinand cberchait qael'Je sombre
machination pouvaít etre cacbéc sous une propo–
sition aussi imprévue. Da-ns son premier entre-