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L'JNVASION. -

NOVEOlllRE

1815.

299

Au lieu de Ja Jaisser parlagée en armées d'Anda–

lousie, du Centre, du Portugal et du Nord, ce

qui présentait de graves inconvénients, il l'avait

formée en simples dívisions,

a

la tete desquelles

il avait placé de trcs-bons <livisionnaires, qui

étaient nombreux dans cette armée dont la forte

constitution avait résislé

a

tous les revers. Apre ·

l'avoir distribuée en dix <livisions, dont une de

réserve, il avait confié la droite au général Reillc,

Je centre au général comt.e d'Erlon, la gauehc

au général ClauscJ. Ce dernier, apres la bataille

de Vitloria, ayant réussi, par un miraclc de cou–

rage et de présence d'esprit,

a

gagner Sarugosse,

était rentré en France par Jaca, et vcnait de re–

joindre le maréchal Soult avcc 15 roillc Lommcs.

Ce mouvement avait,

il

est vrai, l'inconvénient

de découvrir Saragosse, mais il avait l'avantage

de coacentrer nos forces contre les Anglais, qui

étaient nos enncmis les plus redoutables en

Espagne, et il était permis d'en espérer quelque

résultat si ces forces, tres-considérables rncore,

étaient bien employées. L'armée, sous le raµport

des qualités militaires, n'avait pas d'égalc, sur–

tout depuis les perles que nous avions foitcs en

Russie et en Allcmagne. C'étaicnt les plus brares

soldats, les plus aguerrís, les plus rompus a la

fatigue qu'il

y

cut alors en Europe. l\Iais en meme

temps ils étaient, comme nous l'avons déja <lit,

dépités, dégoutés de se voir depuis six ans sacri–

fiés non- seulement a une entreprise funeste,

mais

a

l'iocapacité et

a

la rivalité de leurs chefs.

Avec une

confian~e

immense en eux-mellles, ils

n'en avaient aucune daos lcurs généraux, excepté

toutefois les généraux Reille el Clausel , et. ils ne

s'attendaient qu'a etre battus. Ce défaut de con–

fiance dans ceux qui les commandaient avait

achevé de détruire parmi eux la discipline, déja

fort ébranlée par la miscre. Habi Lués

a

n'ctre

jamais nourris,

a

vivre uniquement de ce qu'ils

arrachaient

a

une population qu'ils ha'issaient

et dont ils étaient ha'is, ils se regardaient comme

les maitres de tout ce qui était sous leur main ,

et, meme rentrés en France,

i1

n 'élait pas pro–

bable qu'on changeat beaucoup leur maniere de

penser, si on ne chaugeait pas leur maniere de

vivre. Déguenillés, hftlés par le soleil, irrilés,

arrogants, ayant

a

leur tete des officiers encore

plus

a

plaindre qu'eux' et qui n 'osaicnt pas

montrer leurs vetements en lambcaux, ils pré–

sentaient le spectacle le plus navrant, cclui

de braves soldats aux priscs avcc le vice et la

misere. Un grand général, qui aurait su s'em–

parcr d'eux et qui les aurait reconduits

a

la vic-

toire, en eut fait la premierc arméc du monde.

Napoléon , de peur de désorganiser les seulcs

provinces ou Ja gucrre d'Espagne n'eut pas élé

désastreuse, n'avait pas voulu retirer le maré–

chal Suchet de l'Aragon, et, par le rnotif que nous

avo11s

d éj~

iudiqu é, il avait choisi Je rnaréchal

Soult. Ce maréchal , qui avait une grande reoom–

mée, moindre toutcfois en Espagnc oú il avait

servi qu'aiiieurs, n'était pas accueilli de l'armée

avec une enticre confiance. Cependant il pouvait

bca ucoup réparer.

11

avait affaire

a

un redou–

table cnnemi, nou s voulons dire

a

l'armée anglo–

porlugaise, comptant 45 mille Anglais et 11'> miJle

Portu gais cnorgueillis de leurs victo ir es, plus

50 ou 40 millc Espagnols, les meilleurs soldats

de l'Espagne.

JI

élait certainement possible avec

70 mille Fran<;a is de tcnir tete

a

cctte armée,

plus nombrcuse que la nótrc, muis inférieure en

qu alité, les Anglais cxceptés.

Lord \Vellington, mcme apres la bataille de

Vitlori a, hésitait

a

pénélrer en France : aussi

essriyait-il d'assiéger Saint-Sébastien et Pampe–

lune, bien plus pour se donner un prétcxte de

tcmporiser que pour se procurer ces deux postes,

qui valaicnt au surplus la iJeine d\10 siége. Pour

protéger cette double ent.repri e contr c les re–

Lours oífensifs des Frarn¡ais, il avait distribué son

armée assez habilemcnt , et surmonté, autant que

possiblc, la difficullé des lieux. Sai11t.-Sébastien,

comme on le sait, est situé au bord de Ja mer,

presque

ñ

l'embou chure de la Bidassoa, et

a

l'ex–

trémité de Ja vallée de Bastan; Pampelune, au

conLra fr e, capitale de la Navarre, cst sur le

r cvcrs de cctte vall ée et daos le bassin de l'Ebrc.

(Voir la carte n° 43 .) Lord Wellington avait

chargé du siége de Saint-Sébastien l'armée espa–

g nole de Freyrc, aidée d'un c division vortugaise

ctde deux divisions un glaiscs. Ces trou pes étaient

natu r ellcment pres de la mer,

a

l'extr émité de

la vallée de Bastan. Il avait aux envirous de Saint–

Estevao, au centre meme de la vallée de Bastan,

lrois divisions aoglaises pretes

a

descendrc sur

SainL-Sébastien, ou

a

r emonter la va llée, pour

se jetcr en Navar rc au secours de Lrois autres

di visions anglaises qui cou vraient le siége de

Pampelunc, confié aux troupes espagnoles du

général .Morillo. Avec une pareillc disLribution

de ses forces, le général nnglais croyait etre en

mesure de faire face aux événements quels qu'ils

fussent. Attaqué cepcndant avec promptitude et

en sccret, il n'est pas certain qu'il eút pu pal'cr a

tout. Aussi n'était-il pas saos ioquiétude, et se

gardait-il avcc une extreme vigilance.