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LIVRE CINQUANTE El
UNIEJ\IE.
sions d'infanterie et une de can! rie, jeunes en
soldats, mais vieilles en officiers, et avec leur
secours il avait essayé de gardcr Ja Drave et la
Save de Villach a La)•bach, couvrant Je Tyrol
par sa ga uche, la Carniole par a droite. (Voir la
carle nº
31.)
Apres s'étre maintenu, pendant les
mois d'aout, ele septembre et d'octobre, sur cette
ligne si étendue, attendant toujours les Napoli–
tains qui n'arrivaicnt pas, il avaít vu les Autri–
chiens se présen ter en masse aux débouchés de
la Carinthie, son armée s'amoindrir par la déser–
tion des Croates et
des
Italiens, et il s'éta it suc–
cessivement replié d'a bord sur l'Isonzo, puis sur
le Tagliamento. La défcction de la Bavicre, ou–
vrant tous les passages du Tyrol sur sa gauch e,
avait rendu la position encore plus difiicilc, et,
dans le désir de couvrir
a
la fois Vérone el Trieste,
il
avait partagé son armée en dcux corps. 11
avait envoyé le général Grcnicr sur .Bassano avcc
15 mille hommcs, tandis qu'avec 20 millc
il
ta–
chait, en manmuvrant en tre le Taglit1mcnto et la
Piave, de couvrir le Frioul et Venisc. C'était
l'étude des campngncs du gé11ér al Bonaparte qui
luí avait inspiré l'idée d'cmoycr le géuéral Gre–
nicr dans la vallée de Bassaoo, car en rcmon lant
cette vallée, ce généra l pouvait se jeler da11s le
flan c des Autr·icbicns, landis qu e le général Gif–
lenga e sayait, avec quclq ucs mi lle hommes, de les
contenir de front entre Trente et Ro vcredo.·l\Jais
il ne suffit pas d'empruntcr leurs i<léesaux grands
capitaincs, il faudrnit aussi lcur emprunter Ja
précision et l'éncrgie de l'exécution; or le géné–
ral Grenier, lalonnant sa os cesse, avait perdu un
lemps précieux, et Je prin ce Eugcne, c1ui dispo-
ai t tou t au plus de 20 mi lle hommes pour
ré istcr
a
la colonnc des Autrichicns venant de
Laybach , avai t crainL d"ctre rejelé ur l'Aelige,
e'est-i1-dire en arriere de l'ou vcrture de la vallée
de Bas·ano, ce qui !'cut séparéelu généralGrenier.
11 avait done rappelé cclui-ci, pour se r ctirer dé–
finitivement sur Véronc.11 ava it ai11si abandonné
aux Autrichiens la Carni olc, le Frioul,
le
Tyrol
italien, et gardé sculcmen t les places, c'e t-a-dire
Osopo, Pnlma -Nova, Venise. La nécessilé ele
laisser quelques garniso ns dans ces illlporta nlcs
forterc~
es et la désertiou l'avaient réduit
a
56 millc hommes de troupes aclives, tand is c1ue
les géoéraux ennemis, Hillcr et Bel legard e, en
comp laient 60 mille, indépendamruent des insur–
gé t rolien .
Uoefoi eoocentré ur l'Adigc, le princcEugcne,
rcprenant confiance, et e jetant ur les Autri–
chiens , laotót
a
gaucbe vers Ro erc<lo, tan tót de-
vant
lui
vcrs Caldiero, Jeur avaü tué ou pri sept
ou huit mille hommcs en divcrs combats. 11 élait
parvenu ainsi
a
se faire respectcr ; mais, ayant
derrierc lui l'Italie que les souffranccs de la
guerrc avaient détachée de nous, que les pretres
et les Anglais excitaien t
a
In
révoltc, et que "Murat
ne cherchait point
t\
nous ramener, il était dou–
teux qu'il réussit
a
se soutenir. 11 ne pouvait
répondrc que
de
sa_fid élité, et de la sicnne, hélas,
toute scule
!
La désolante nouvellc de Leípzig
avait constern é et fortcment ébranlé les cours
d'Jtalie , quoiqu'clles fu ssent loutes d'origine
frarH;ai se. Quant au prinee Eugene, époux, comme
on sait, d'une princesse bavaroise, son beau–
pcrc lui avait envoyé un officier pour l'informer
des motifs impérieux qui avaicot détaché la Ba–
vicre de la Franee, et pour lui proposcr, au nom
de la coalition, une principauté en ltalie, s'il con–
sentait
a
abandonner la cause de Napoléoo. Le
prince Eugene, plein de douleur
CD
songeant
a
sa
fcmme et a ses enfaots qu'il aimait, et qu'il
craignait de voir bientót privés de tout patri–
moinc, avait répondu que, devant sa fortuue
a
Na poléon, il ne pouvait se séparcr de Jui , et que
réd11 it peut-ctrc avan t peu
a
cliercher un asile
a l\Iuoich, il était ccrtain que le roí de Baviere
aimerai t mieux y reecvoir un gcndre saos cou–
r oonc qu' un gcndre sans hooneur ! Le prinee
Eugenc, apres celte honorable réponse, s'était
bomé
a
communiquer
a
Napoléon le récit exact
de cette entrevue.
La fin de l'année 18 15 avait été plus triste
encore en Espagne qu'en Italic. On
se
souvient
que Napoléon,
a
la suite de Ja bataillc de Vitto–
ria, profond ément irrité contrc son frere Josep·h
et co11trn le maréch al Jourdan , avait chargé Je
maréchul Soult d'aller rétablir nos aífaires en
E pagnc, et lui avait conféré, pour rendre son
autorilé plus impo ante, Ja qualilé de lieulenant
de l'Empereur. Le maréch al Soult, dont on se
rappellesans douteles démelés avec le roi J oseph,
revena11t avec le pouvoir de faircarreler ce prince
s'il résislait, avait éprouvé une salisfaction d'or–
gucil que, malheureusement pour nos armes, il
d •va it prochainement expier. Dans un ordre du
jour, offcnsant pour J oseph et pour le maréchal
Jour<lan , il avait imputé nos infortunes en Es–
pagne
000
pas aux cil'cooslances, mais a )'inca–
paci té t
a
la lache té de ccux qui l'avaient pré–
cétlé dans le commandcment, ne prévoyant pas
qu'il s"ótait ainsi toule excuse pour ce qui devait
bicntót lui arriver. Sur-le-champ, il était entréen
fon ction, et s'élait occu pé de réorganiser l'arméc.