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292

LIVRE CINQUANTIEl\fE.

de Tauenzien.

11

ne pouvait guere exercer d'in–

fluence sur les événements pnr sa persévérance,

mais

il

pouvait s'honorer. Il l'avait fait, et il

était pret

a

le faire cncore. Les vivres ne lui

manquaient pas. N'ayant point, comme Ja place

de Torgau, recueilJi les restes des armées bat–

tues, il comptait peu de malades, mais beaucoup

d'étrangers. Il les conlenait par son énergie, et

paraissait disposé

a

soutenir un long siége.

Le général Lemarois, aide de camp de l'empe–

reur, revetu de toute sa confiance et la méritant,

avait re<;u le gouvernement de Magdebourg.

Quant

a

lui,

il

n'y avait aucune raison qui put

l'au.toriser

a

évacuer spontanément une forte–

resse aussi importante, si capable de résistance,

commandant le milieu du cours de l'Elbe E'.t le

centre de l'Allemagne. Il n'aurait pu etre en–

trainé len sortir que par l'intéret d'une grande

concentration dont

il

n'avait pas

a

prendre l'ini–

tiative, et dont personne ne venait malheureu–

sement luí fournir l'occasion. Il était des lors

dispensé de se poser

a

lui-meme la graye. ques-

. tion de l'évacuation, et il s'était tranquillement

enfermé daos

s~

forteresse, ou, avec des vivres

considérables~

une garnison nombreuse, des mu–

railles puissantes, peu de malades, parce qu'il

était _!'.-esté loin du carnage pestilentiel de Ja

Saxe, il pouvait tenir tete longtemps aux armées

de la coalition, et avoir le douloureux honneur

de survivre

a

la France elle-meme.

A Hambourg se trouvait l'intrépide et imper–

turbable Davoust, que Napoléon, par des mécon–

tentements qui se rattachaient

a

la campagne de

Russic, et aussi par estime pour son inflexible

caractere, avait placé dans une position éloignée,

au grand détriment des opérations de cette

guerre; car il s'était privé ainsi du seul de ses

généraux auquel, depuis la mort de Lannes et la

disgrace de Masséna,

il

put confier cent mille

hommcs. Le maréchal, parti de Hambourg avec

52 mille soldats pour commencer sur Berlin un

mouvement que les batailles de Gross-Beeren et

de Dennewitz avaient rendu impossible, y était

rentré en apprenant les maJheu-rs de la Saxe,

avait réso]u, avec ses trente mille hommes , avec

dix mille autres , Jaissés dans les ouvrages de la

place, de soutcnir un long siége, qui fUt plus

qu'un siége, mais une vraie campagne défensive,

de nature

a

couvrir la basse Allemagne, la Hol–

lande et le Rhin inférieur. Lui aussi, séparé de

l'empereur et de

la

France, impassible au milicu

de tous les désastres' les prévoyant sans

~n

etre

ému, se proposait d'etre le dernier des grands

hommes de guerre de ce regne qui remettrnit

son épée

a

la coalition

!

Sur l'Oder, les places de

Stett.in

) Custrin, Glo–

gau , tenaient encore, mais uniquement pour

l'honneur des armes. Stettin avait pour gouvcr–

neur le général Grandeau, remplacé quelque

temps par le brave général Dufresse, celui qui

pendant l'armislice s'était si peu ému des coups

de fusil tirés sur Bernadotte .

JI

avait des viv11es,

12 mille hommes de gnrnison, dont 5 mille

écloppés de Russie, et 9 mille hommes valides.

Son autorité s'étendait sur Stettin et Ja place de

Damm, qui commande devastes lagunes d:épen–

dantes du Gross-Haff. C'était le général Ravier

qui" défendait Damm, et il Je faisait avec la plus

grande énergie. Outre l'armée prussienne, on

avait affaire a toutes les flottilles anglaises ve–

nues par l'Oder. La vigueur de la défense avait

été admirable, et on avait rMuH les assiégeants

a

entourer les deux places d'une vingtaine de

redoutes, dans lesquelles

i.ls

paraissaient plutót

occupés

a

se garder contre les assiégés qú.'a les

attaquer. Ils laissaient aux

flo~tilles

;anglaises le

soin de bombarder la garnison, qui, ne s'en

inquiétant guere, souriait en quelque sorte d'un

moycn d'attaque funeste seulement aux malheu–

reux habitants prussiens. Toutefois avec cetteim–

passibilité, on pouvait bien résister au feude l'en–

nemi, mais non pas aux angoisses de la faim.

Le moment approchant ou les vivres allaient

manquer_(on était bloqué depuis pres d'un an),

le général Grandeau, de l'avis de son conseil,

était entré en pourparlers avec l'ennemi , afin

de n'etre pas réd-uit

a

se rendre

a

discrétion,.s'il

traitait quand

il

n'aurait plus un morceau de

pain. On lui avait proposé de déclarer sa garni–

son prisonniere de guerre, car la coalition était

résolue

a

ne laisser retourner en France aucun

des soldats qui pourraient la défendre, et ce but,

elle le poursuivait, comme on l'a vu, pail' des

blocus persévérants contre les garnisons qui ré–

sistaient, par des violations de foi contre les

garnisons qui avaient capitulé. Le général Ravier,

avec les troupes de Damm et presque toutes celles

de Stettin, s'était insurgé

a

la nouvelle des con–

ditions offertes, et refusait d'obéir au général

Grandcau. Cette vaillante garnison voulait jus–

qu'au dernier moment tenir flottant sur l'Alle–

magne le drapeau de la France. A la fin de

novembre, rien n'était encore décidé.

A Custrin, le général Fc;irnier d'Alhe, ayant

a

peine un millier de Fran<;ais au mi1ieu de 5 mille

Suisses, Wurtembergeois, Croates, qu'il main-