LEIPZIG ET HANAU. -
NOVEMBRE
i8i5.
28ts
pour recueillir les plus
~ttardés
de nos trainards.
11 en avait passé pres de quarante mille en quel–
ques jours.
Ai·nsi nous revimes le Rhio , apres tant de
victoires suivies maintenant de tant de revers,
le Rhin, que nous avions l'cspérance fondéc de
repasser paisiblement, apres une paix glorieuse
et générale. ll aurait pu en etre ainsi, mais
l'orgueil indomptable de Napoléon ne l'avait pas
permis!
Napoléon était en ce moment daos l\Jayence,
pouvant se convaincre de ses yeux de toute
l'étendue de ses fautes. Ce Rhin devenu tclle–
ment notre propriété, que six mois auparavant
on aurait regardé comme une grande preuve de
modération de notre part de nous en contenter,
ce Rhin,
il
était douteux que nous pussions le
défendre
!
Napoléon avait tant soogé
a
la con–
quete, et si peu
a
la défense, que le sol de l'Em–
pire se trouvait presque entierement découvert.
Excepté en Italie, qui était de la conquete aussi,
on n'avait rien fait aux places de la frontiere.
Napoléon avait bien commencé
a
y penser, mais
a une époque ou
il
ne r estait plus assez de tcmps
pour que les ordre& donnés rec;usscnt leur exécu–
tion. Les grands approvisionnements memcs
provoqués par l'intermédiaire de M. de Bassano
aprcs la bataille de Dennewitz, délibérés, ré–
solus entre les principaux ministres
a
París,
avaient été contremandés par Napoléon a cause
de la dépense, et surtout
a
cause des alarmes
qu'il craignait de répandre sur le Rhin. Aussi le
long de cette fronti ere qui aurait dil etre le pre–
mier objet de nos soins , tout était-il dans un
état déplorable. On s'était épuisé en munitions,
en armes de toutes especes pour Erfurt, Drcscle,
Torgau, :Magdebourg, Hambourg, et les arsc–
naux franc;ais étaient vides . Les approvisionne–
ments en bois ordonnés depuis peu de jours
n'élaicnt pas commandés . Les approvisionn e–
ments de siége se trouvaient daos le meme cas
1
•
Le personnel était encore plus insuflisant que le
matériel. A Strasbourg, Landau , Metz, Coblentz,
Cologne, Wezel, il n'y avait que quelques com–
pagnies de gardes nationales levées
a
la hate par
les préfets, et qui savaient
a
peine tirer un co up
de fusil. Mayence seule, vaste dépót de recrues
qu'on n'avait pas eu le temps d'expédier, de
maraudeurs successivement rentrés, de malades,
de blessés transportés comme on avai t pu , centre
enfin de ralliement pour nos débris de toute
1
Nous parlons d'aprés les rapporls des maréchaux envoyés
sur le Rhin pour
y
commandcr.
espece, l\Iayence conlenait des moyens de dé–
fense . Mais c'est une armée qu'il aurait fallu
dans cette place, et ce qui ren trait, quoiqae ce
füt la grande armée, n'aurai t pas fourni 40 mille
bommes en état de combattre. Les divisions de
la jeune garde qui s'étaient si bien conduites,
comprenant 8 mille hommes
a
la reprise des
hostilités,
o
mille encore apres Leipzig, étaient
réduitcs lesunes
a
1,000, les autresa 1,100 hom–
mes. Tous. les corps étaient diminués dans la
mcme proportion.
Napoléoa , voulant réserver
a
Mayence ce qu'il
nvait ramené demeilleur,
y
laissa le
4e
corps sous le
général Bertrand . Ce corps élait destiné
a
former
l'avant-garde de l a fu ture armée que Na poléon
espérait composer.
11
devait comprendre la di–
vision Morand qui en avait toujours fait partie,
la divisioo Guillcminot qu'on jui avai t récem–
ment adjointc, les di visions Durulte et Semelé,
seuls r estes, comme nous l'avons dit , des 7° et
'16•
corps. Ces quatre divisions, meme aprcs
qu elques jours de repos, ne comptnient pas
quinze mille soldats. Napoléon ordonna qu'elles
fu ssent immédiatcment r éorganisées au moyen
des hommes débandés qu'on arrctait au passage
du Rbin . La cavalerie de la g·arde fut employée
a
recucillir ces hommes
a
plusieurs licues au-dessus
et au-dessous de l\'Iayence. i\Ia is les fusils, les vetc–
ments, les souliers, lesvivrcs qu'on leurdistribuait
ne pouvaient surmonter l'influencedes mauvaises
habitudes qu'ils avaient contr aclées, et, bien que
la plupart d'entre cux se fosse nt comportés tres–
bravement deux ou trois scmaines auparavant,
il
était douteux qu'on parvin t
a
en faire cncore
des soldats. A peine cessait-on rl'avoir l'reil sur
eux , qu'ils désertaient
a
l'intérieur. Les cadres
r cstaient cxcell ents, et tout prouvait que, grace
a
eux,
il
scra it plus facile de créer des soldats
avec des conscrils sortant de Jeurs chaumieres,
qu'avec des hommcs qu'on venait d'exposer lrop
tót, trop
a
l'i mproviste, et sans I'encouragement
de la victoire, aux plus eruelles extrémités de la
gucrre.
En quelques jours cependant, on reporta au
nornbt'e de vingt et quelques mille hommes ce
4c
corps, derniere r eprésentation de I'armée qui
avait combattu
a
Lutzen , Dresdc et Leipzig.
Lefebvre-Desnouettes lui futa ttaché avecla cava–
lerie légere de la garde et les vieux drag·ons du
15º corps, composant en tout 5
a
4 mille chevaux.
On lui donna une bonne arLille.rie. La garde du
Rhin fut partagée entre les trois maréchaux
l\farmont, l\facdonald et Víctor.
Le
muréchul