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LEIPZIG ET HANAU. -

OCTOBRE

1812.

259

plié en bon ordre et sans accident, grace a la

précaution qu'il avait prise de faire jeter pen–

dant la bataille plusieurs ponts de chevalets sur

le ravin de Rietschke. Dombrowski , secouru par

l'une des divisions de Souham, s'était aus i retiré

sain et sauf, apres avoir eu l'honneur de contenir

a

Euteritzsch tout le corps de Langeron. Vingt–

quatre millc hommes en avaient done tenu en

échec soixante mille, des plus hraves et des plus

acharnés. Ce combat, d'aprcs l'aveu meme de

l'ennemi, lñi cotitait de neufa c.lix millehommes.

11 nous en cotitaitsix, avec vingt pieces de canon

perdues par suite de l'explosion.

Telle avait été cette affreuse bataille du 16 oc–

tobre, composée de trois batailles, qui nous avait

enlevé

a

nous 26 ou 27 mille hommes, et pres

de 40 mille

a

l'ennemi. Triste et cruel sacrifice

qui couvrait notre armée d'un honneur immor–

tel, mais qui devait couvrir de deuil notre mal–

heureuse patrie, dont le sang coulait

a

torrents

pour assurer non sa grandeur, mais sa chute!

Sur aucun point nous n'avions été forcés dans

notre position; nous avions gardé le terrain au

sud entre Liebert-Wolkwitz et Wachau, et au

couchant vers Lindenau; nous l'avions aban–

donné, mais presgue volontairement, au nord,

et pour en prendre un meilleur. Mais des que

nous n'avions pas rejeté loin l'un de l'autre, de

maniere

a

ne plus leur permettre de se rejoin–

dre, Schwarzenberg et Blucher , la bataille,

quoique non perdue, pouvait se convertir bien–

tót en un désastre. Dans ce moment Bernadotte

s'approchait avec 60 mille hommes; on annon–

~ait

Benningsen avec 50 mille, et nous,

il

nous

en arrivait 15 mille sous Reynier, dont 10 mille

prets a nous trahir! La situation, des que nous

n'avions pas remporté une victoire éclatante,

était done bien pres de devenir affreuse

1

Aurait–

on pu obtenir un résultat décisif dans cette pre–

miere journée du 16? Voila ce qu'ont agité tous

les historiens spéciaux, ce que les uns ont nié,

les autres affirmé . Peut-etre si Napoléon, apres

1

Quelques éc1·ivains qui admcllraienl que uos généraux ont

élé léches ou traitres, et que nos soldaLs se sont mal conduits,

plulót que d'allribuer une faute a Napoléon, s'en sont pris

a

tout le monde, sauf

a

luí, du r ésultat de celte journée du 16.

D'abord, a les entend1·e, l\lurat

a

Leipzig trahis ait déja, el c'esl

par ce motif qu'il exécula mal la grande charge de cavalerie

ordonnée par Napoléon. Or Je pauvre Mural fort agité, il esl

vrai, pendant Lout l'hiver, et un moment prét

il

suivre les im–

pulsions de l'Autriche, était revenu tout eutier a Napolé? n des

qu'il s'était trouvé aupres de tui, et élait incapable d'a1lleurs

d'une trahison sm· le champ de bataille. Au surplus le neveu

de lord Cathcarl, témoin oculai1·e de la charge de l\lurat, el

app1·éciant les lieux mieux qu'on ne le pouvait fairc de not1·e

s'étre mis dans une position extreme, avai t poussé

l'audace jusqu'au dernier terme, et ne laissant

a

Leipzig que Margaron pour défendre la ville seu–

lement, se bornant de plus

a

laisser au nord de

Leipzig Marmont et Dombrowski sur la Partha

pour contenir Blucher, avait attiré a lui Bertrand

et Ney pour renforcer Macdonald de 50 mille

hommes, ces cinquante mille combattants de

Macdonald, Berlrand et Ney, jetés de notre

gauche sur la droite du prince de Schwarzen–

berg, auraien t pu l'accabler, et le précipiler

dans la Pleisse. Une grande victoire obtenue de

ce coté, nos communi91tfons avec Lutzen et

Mayence eussent été bientot r ouvertes, et Blu–

cher aurait été rudement puni le lendemain des

progres qu'il aurait pu faire. Au lieu de cela ,

les troupes de Bertrand étaient restées dans

Leipzig presque oisives, et les divisions de Sou–

ham, tantot dirigées vers Napoléon, tanto t ra–

menées vers Marmont, avaient perdu la journée

en allées et venues inutiles. C'est ainsi qu'une

force décisive avait manqué sur le théatre ' de

l'action principale. Mais ces raisonnements,

vrais d'ailleurs, ont été faits apres l'événement.

Il aurait fallu que Napoléon eut pu prévoir que

Lindenau ne serait pas l'objet d'une attaque

principale, que Bernadotte n'arriverait pas avec

Blucher au nord et

a

l'est de Leipzig;

il

aurait

fallu enfin que le corps de Reynier n'eut pas été

si loin en arriere. Ce qu'il est juste de reprocher

a

Napoléon, ce n'est pas d'avoir mal livré la ba–

taille que personne certainement n'aurait mieux

livrée que Jui, mais de s'étre mis dans une posi–

tion ou, assailli de tous les cotés

a

la fois, obligé

de faire face en meme temps a toute espcce d'en–

nemis, il ne pouvait exactement deviner cclui

qui,

a

chaque instant donné, serait le plus pr es–

sant, et exigerail l'emploi de ses forces disponi–

bles. C'est sa conduite générale et non pas sa

conduite particuliere duns cette journée, qu'il

faut, cette fois comme tant d'autres, blamer séve–

rement

1.

Quoi qu'il en soit, la position de Na-

cóté, a expliqué daos ses lllémoi1·es, publiés depuis, la cause

qui

fit

échouer celle charge. Celle cause n'étail autre que Ja

forme du sol le lon!J du village de Gülden-Gossa, village qu'il

suffit de voil' pour comprenclre commenl notre cavalerie duL y

elre arrétée. Apres Murat, ce sont deux autres lieutenanls de

Na poléon, c'est-a-dire lllarmont et Ney, qu'on a voulu incri–

mincr . l\larmorit,

a

ce qu'on prétend, aurait dü repasscr Ja

Partha, et Ney ne pas laisscr Berlrand inulile dans Leipzig.

Or, Berlrand ful Iaissé dans Leipzig par ordre de Napoléon,

el l\larmonl, quand il voulut se r ctirer derric1·e la Partha, ne

le pouvait plus, ayant déjll l'ennemi sur les bras, el n'ayant

qu'un seul pont pour défiler. C'esl Napoléon qui avait mis

J\larmont entre Breilenfeld et

1

·nden thal, dans la supposition