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LIVRE CINQUANTIEl\IE.
tre coté Oudinot et Victor, débouchant de Wa–
chau, repousserent le princc Eugene de Wur–
Lemberg, luí firent repasser l'espece de vallon
qui nous séparait, et le refoulcrent sur la berge–
rie d'Avenhayn, qui se trouvait sur la droite du
village de Gülden-Gossa. Tandis que l'on s'avan–
c;ait aiosi victorieusement vers Je milieu de notre
ligne, Macdonald faisant irruption
a
gauche par
dela Liebert-Wolkwitz, aborda Klenau, et l'obli–
gea de lui céder une grande étendue de terrain.
Chemin faisant, il arriva devant une vieille
redoute, dite des Suédois, d'oú pleuvaient des
flots de mitraillc, la masqua au moyen de la divi–
sion Charpentier, et avec les divisions Ledru et
Gérard enleva Scyffcrtshayn. L'eonemi se défen–
dit vigoureusement, mais on le rcjeta
d~un
cóté
sur Klein-Possnau, de !'nutre sur Gross-Possnau
et le bois de l'Univer,sjté. La favorisé pades diffi–
cultés locales, il s'arreta, et nous tint tete. Si un
corps de réserve, appuyantalors l\facdonald, était
venu l'aidcr
a
se rabattre de gauche
a
droite, on
aurait pu cnlbnter une partie de Klenau sur
Gortschakoff, l'un et l'autre sur le prince deWur–
temberg et sur Kleist, et tous ensemble daos
la
Pleisse. Muis Marmont était en ce moment aux
priscs avec Blucher, l\'largaron avec Giulay;
Bertrand entre dcux, se réservait pour aller au
secours du pfos mcnacé. Ney n'osait disposer de
Souham, tant Marmont lui paraissait attaqué
violemmeot, laissait Dombrowski sur la droitc
de Marmoot, pour faire face
a
des masses qu'on
voyait confusément daos le loiotaio, et enfin
attendait encore Reynier.
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fallait done que
Napoléon remportat la victoire avec ce qu'il avait
sous la main.
•
.Les ennemis aprcs avoir per<lu toute la lar–
geur du champ de bataille en disputaient pied a
pied !'extreme limite. Klenau résist.ait soit
a
Gross-Possoau, soit
a
la tete du bois de l'Univer–
sité. Gortschakoff, rejeté sur l'autre coté de ce
bois, s'y défendait, et cherchait en mem.e temps
a s'appuyer au village de Gülden-Gossa, qui,
étant enfoocé en terre, et présentant une suite
de bois et de mares d'eau assez allongée, était
tres-propre
a
la défensive. Le prince Eugcne de
'Vurtemberg placé tout aupres,
¡,
la bergerie
d'Avenhayo, tachait de s'y mai11lenir avec les
débris de son corps. A l'aspect du danger qui les
mena<;ait, les souverains alliés étaient dans la
plus grande perplexité.
1\J.
de Wolzogen, comme
nous venons ele le dire, avait été envoyé au prince
de Schwarzenberg, le général Jomini s'était joint
a
lui, et sur les vives observations de tous deux,
le prince reconnaissant la difficulté d'emporter
Dolilz pou:ri déboucher sur nos derricres, et le
péril pressant des armées russe et prussienne,
avait consentí
a
faire passer sur la rive droitc de
la Pleisse la réserve du prince de Hesse-Hom–
boui:_g, forte de plus de 20 mille hmmes. l\fais ce
n'était pas avant trois heures de l'apres-midi que
ces renforts pouvaient etre ar.rivés. En attendant
les souverains se déciderent
a
engager toutes
leurs réserves, certains qu'ils étaient de les rem–
placer bientot par une partie de l'armée autri–
chieone. On lan<;a d'abord les cuirassiers russes
sur notre infantcrie,
tandi~
qu'on porta
~o
ligne
les dix miHe grenadiers de Rajeffsky, dont une
eolonne fut dirigée sur Gülden-Gossa, et l'autre
sur Ja bergerie d'Avenhayn.
Tels étaient les événements du coté de l'en–
nemi. Lauriston et J.\fortier a notre gauche vers
Gülden-Gossa, Victor et Oudinot a notre droite
vers la bergerie d'Avenhayn, rec;urent en carrés
les cuirassiers russes, et par un feu impertur–
bable les renversereot sous les cadavres de leurs
ehevaux. Les dix milie grenadiers de Rajeffsky,
réparlis entre la bergerie d'Avenhayn, le village
de Gülden-Gossa et le bois de l'Université, vin–
rent se placer comme up.e longue muraille, sou–
tenue <l'intervalle en intervalle par du canon. Le
brave Drouot, qui était resté entre nos deux
colonocs d'attaque avec sa formidable b3'tterie,
imagina de diriger toutes ses pieces sur cette
magnifique infanterie, négligeant l'artillerie en–
nemie, quelque importance qu'il y eut a éteindre
ses fcux. Quoiqu'il füt bien pres de l'ennemi,
il
s'avan<;a plus encore, et se mita tirer
a
mitrail-le
sur les grenadiers russes qui tombaient comme
des pans de murs sous le feu de nos· canons.
Lorsqu'ils parurent suffisamment ébranlés, la
division Dubreton, s.e détacbaot du corps de Vic–
tor
a
notre droite, exécuta une charge a la ba'ion–
nette sur la bcrgerie d'Avenhayn, et l'emporta.
A gauche le général Maison, formant la tete de
Lauriston, se jeta sur Gülden-Gossa et parvint
a
y pénétrer. Mais les grenadiers Rajeffsky, favo–
risés par des batiments de forme, des bois, des
mares <l'eau, s'y défendirent avec la derniere
opiniatreté. On conduisit une partie de la garde
russe
a
leur secours, et tandis' que Maison tenait
une cxtrémité du village, les Ru-sses lenaient
l'autre, et ne voulaient pas l'abandonner. Maison
atteint de plusieurs coups de feu, couvert de sang,
changea trois fois de cheval, et ramena ses sol–
dats dans ce village de Gülden-Gossa qu'il ne
pouvait enlever aux
Russes~
et que de leur coté