LEIPZIG ET HANAU. -
OCTOBRE
1815.
2tH
eles vaincus, on se trouverait sur les dcrrieres
des Franrtais, la position de ceux-ci ne serait
plus tenable, et ce scrait un mi racle s'ils pou–
vaient se retirer sains et saufs sur Leipzig. Aussi
les généraux autrichiens voulaient-ils que non–
seulement on employat
a
celte opération l'armée
autrichienne, mais que les réserves de Barclay
de Tolly, composées de la garde impériale russe
et de la garde royale prussienne , fussent char–
gées d'agir entre la Pleisse et l'Elster. Il y avait
certainement quelques raisons
a
fa ire valoi r pour
ce plan, mais
il
y avait deux fortes obj ections
a
lui opposer : la premiere, c'est qu'avec peu de
monde Napoléon pourrait en ar reler beaucoup
a
la position de Dolitz, et la seconde, c'est qu'en
voyant combien était peu consid érable la masse
chargée de le combattre de front,
il
se raba ttrait
par sa gauche sur elle, et la jetterait dans la
Pleisse. Or, lorsqu'il aurait anéanti comme a
Dresde un tiers de l'armée alliée au moins, la
question serait évidemment décidée en sa faveur.
Il ne suffit pas cependant qu'une opinion ait
contre elle des raisons excellenles pour qu'on y
renonce. Apres l'avoir adoptée par position et de
bonne foi, on y persiste par amour-propre, et il
estrare qu'une opinion logiquement détruite, soit
une opinion abandonnée. On contesta vivement,
et suivant la coutume, bonne en politique , mais
souvent dangereuse
a
la guerre, on transigea, on
répartit les forces avec une certaine égalité. Le
corps autrichien de Giulay, renforcé des troupes
légeres deLichtenstein et de Thielmann, dut, au
dela de la Pleisse et de l'Elsler , se porter sur
Lindenau, pour s'emparer de la communication
des Franctais avec Lutzen, c'est-a- dire avec
l\fayence. Ce corps, de 20
a
25 mille hommes ,
pouvait' s'il étai t heu.reux' donner la main
a
Blucher
a
travers la plaine de Lutzen. Le gros
de l'armé-e autrichienne, comptant 40 mille
liommes environ , composé du cor ps de Merfeld
et de toutes les
rése~ves
tant de cavalerie que
d'infanterie du prince de Hesse-Hombourg,
devait s'enfonce,r dans l'angle formé par la Pleisse
etl' Elster, et essayer de déboucher par Dolitz sur
les derrieres des Franc.;ais. A la droite des deux
rivieres, sur le front des Franc.;ais, devant les
positions de Mark-Kleeberg, Wachau , Liebert–
Wolkwitz , les armées prussienne et r usse, ap–
puyées de toutes leurs réser ves et présenta nt
une force d'environ 70 mille hommes , devaient
se ruer sur la ligneoccupée par Napoléon, tandis
que le général autrichien Klenau, comptant
a
peu pres 25 mille hommes avec le renfort d'une
brigade prussienne et de la eavalerie de Platow,
déborderait au loin Liebert-Wolkwitz par la
plaine deLcipzig, lacherait de tournernotre gau–
che, et de lendre, lui aussi, la main aux armées
de Blucher et de Bernadotte.
Tel fut le plan adopté le 10 au soir pour etre
exécuté le lendcmain 16 des neuf heures duma–
tin. On essaya de faire parvenir
a
Blucher, dont
on avait appris l'arrivée au nord de Leipzig, l'avis
qu'on allait attaquer le 16, afin que s'il entendait
le canon, il se portat lui-meme au feu, et ne lais–
sat aux Franc;ais que le moindre nombre possible
de troupes inoccupées.
Le 16 octobre était done !e jour choisi par les
deux armécs .pour cette grande et terrible lutte,
de laquelle allait dépendre l'empirc du monde.
Napoléon avait déja disposé ses troupes des la
veille. Macdonald et Sébastiani étant arrivés, il
les avait dirigés sur Holzbausen, a gauche de
Liebert-Wolkwitz, afin de fairc face
a
Klenau .
Quant
a
Ney et
a
Reynier, ils ne dcvaient etre
rendus
a
Leipzig, le premier que dans la matinée
du 16, et le second que dans celle du 17. Blucher
ne se montrant pas encore sur la route de Halle,
ce qui était naturel puisqu'il fallait que le canon
l'attirat sur le champ de bataille pour qu'il osat
s'y aventurer, Napoléon supposa que peut-etre
il
ne l'aurait pas sur les bras dans cette journée,
et il enjoignit
a
Marmont de quitter sa position
au nord de Lcipzig, de traverser
le
faubourg de
Halle, et de venir se placer sur les derrieres
de la grande armée, afin de coopérer
a
la ma–
nreuvre décisive contre Ja droite de Schwarzcn–
berg, par laquelle
il
espérait assurer le gain de
la bataille. 11 prescrivit
a
Ney de prendre la po–
sition laissée vacante par Marmont, et d'etre
prct, de concert avec Bertrand,
a
conlenir l'en–
nemi qui se montrerait au nord de Leipzig. Ces
ordres don nés, Napoléon était des Ja pointe du
joul'
a
cheval au milieu de sa garde, sur un terlre
élevé,
a
la bergerie de l\Jeusdorf' d'ou il domi–
nait le champ de bataille, et voyait
a
sa gauche
Liebert-Wolkwitz, au centre et un pcu dans le
fond Wacbau,
a
droite et dans le fon d aussi
Mark-Kleeberg, plus a droite enfin la Pleísse et
l'Elster, entre Iesquelles s'avanc.;aient les Autri–
cbiens pour forcer le pont de Dolitz. 11 avait,
commc nous l'avons di t, environ 160 mille
hommes devant lui, et environ 115 mille pour
les combattre, Macdonald et Sébastiani compr is.
Le r este de l'arméc franc;aise était
a
deux licues
en arriere, pour faire fa ce aux éventualités qui
pouvaient se présenter sur d'autres points.