248
LIVRE
CINQUANTIEl\fE.
De l'autre coté de cette espece de vallon, on
apcrccvait en
fa
ce de nous Kleist et Wittgenstein ,
entre Gross-Possnau, Gülden-Gossa, Cri:ibern,
avec les gardes russes et prussiennes pour ré–
serve. L'armée autrichienne était partie a notre
droite, entre la Pleisse et l'Elster, s'avanctant
dans l'angle formé par ces rivicres, et menactant
le pont de Dolitz, partie
a
notre gauche, en avant
d'un bois dit de l'Université, vis-a-vis de Liebert–
Wolkwitz, et devant tendre plus tard la main
vers Blucher a traversla plaine de Leipzig, si nous
perdions du terrain et si les coalisés en gagnaient.
Napoléon approuva eomplétement la position
prise par l\iurat. 11 résolut de disputer énergi–
quement la lignede Liebert-Wolkwitz
a
Wachau
et Mark-Kleeberg, pour cela de doubler les trois
corps de l\lurat, en playant
A
ugereau a droite
pres de Mark-Kleeberg, la garde et la cavalerie
de Latour-Maubourg au centre a Wachau, Mac–
donald avec la cavalerie de .Sébastiani agauche,
au dela de Liebcrt-Wolkwitz, afin d'empechei·
que notre aile gauche ne fUt débordée, et d'es–
sayer meme, comme on le verra bientót, de
déborder l'aile droite de l'ennemi. Les Autri–
chiens s'avanyant entre la Pleisse et l'Elster sur
le pont de Dolitz, Napoléon, pour n'etre pas
tourné par sa droite, y placta la brigade Lefol,
tirée des tr9upes qui formaient la garnison de
Leipzig. Apres les combats qu'on avait livrés, les
marches qu'on avait exécutées dans la boue, les
corps de Lauriston, Víctor, Poniatowski, Pajol,
amenés par lHurat, pouvaient monter a 58 mille
hommes, Augereau et Lefol a 12 mille, la garde
a 56 mille, Latour-Maubourg a
9
mille, l\facdo–
nald et Sébastiani a 22 miile, ce qui faisait
environ 114 a 115 mille hommes opposés a
·160 mille. Mais en manreuvrant bien, en se
baltant énergiquement, toutes choses dont il n'y
avait pas a douter, en se servant par exemple de
quelques-uns des corps restés en arriere sous
Ncy, on pouvait renforcer Macdonald de
2o
a
50 mille homrnes, puis se rabattre en masse par
la gauche sur la droite de Schwarzcnberg, et
précipiter celui-ci dans la Pleisse. C'était en effet
le projet de Napoléon, si les corps actuellement
en marche n'étaient pas indispensables au nord
contre Blucher et Bernadotte.
Cette
re~ue
du terrain terminée et ces disposi–
tions arretées, Napoléon rcvint par la gauchc au
faubourg de Reudnitz. 11 parcourut les bords de
cette petite riviere de la Partha, qui roule,
comme nous venons de le dire, ses faibles eaux
dans une cavilé du terrain
a
peine sensible,, et
passant par Taucha, Schonfeld, va les verser
dans la Pleisse, au nord de Leipzig,
a
travers le
faubourg de Halle.
La,
si on se joignait de plus
pres, pouvait s'ofl'rir, un peu en arriere de notre
gauche, un nouveau champ de bataille; mais
il
n'y avait pas
a
s'en occuper, l'cnnemi n'osant
pas encore s'y montrer, et nous n'ayant que de
la cavalerie
a
y mcttre.
Ce n'était pas asscz que d'avoir tout disposé
pour résister
a
la grande armée de Boheme ; il
fallait songer aussi a tenit tete
a
Blucher, qu'on
devait s'attendre
a
voir paraitre d'un moment
a
l'autre au nord de Leipzig. Heureusement se
trouvait de ce coté, en dépassant la Partba, une
position asscz avantageuse, s'étendant du village
de Mockern a celui d'Euteritzsch, barrant la
routc de Halle
a
Lcipzig, et présentant un terrain
large, élevé, appuyé d'un coté a la Pleisse et
a
l'Elster, de l'autre
a
un gros ravin, et oú un
corps pouvait se déployer a l'aise en ayant sur
l'ennemi qui arrivait de Halle un fort eomman–
dement. Obligé d'abandonner eette position, on
avait la ressource de se replier derriere la Partha ,
et d'aller s'adosser
a
Leipzig, en avant du fau–
bourg de Halle.
C'cst la que Marmont, n'ayant cessé d'observer
Blucher pendant la marche de nos troupes, était
venu se placer pour le combattre au besoin. Na–
poléon approuva la position que Marmont avait
prise, et luí recommanda de s'y maintenir. Ney,
avec Bertrand, Souham, Reynier, Dombrowski,
tous retardés par la destruction des ponts de la
l\folde et de l'Elbe, dcvait se ranger
a
la droite
de Marmont, puis
a
mesure qu'il arriverait se
replier autour de Leipzig, du nord au sud, et se
relier
a
travers la plaine qu'arrose la Partha,
avec la gauchc de Murat. Ces dernieres troupes
venues,le cercle autour de Leipzig seraitentierc–
ment fermé.
Restai t a bien garder la ville meme de Leipzig,
et non-seulement la ville, mais la grande routc
du Rhin, qui apres avoir franchi la Pleisse et
l'Elster sur une longue suite de ponts, débou–
chait par Lindenau dans la plaine de Lutzcn, et
allait rejoindre Weissenfcls, Erfurt, Mayence.
11 étai t indispensable de garder spécialement la
route, parce qu'elle était notre seule ligne de
retraite, et parce qu'en l'occupant nous empe–
chions Blucher et Schwarzenberg de communi–
qucr entre eux par dela l'Elster et la Pleisse.
Napoléon avait laissé Ja division Margaron, com–
posée de troupes de marche, dans Leipzig meme,
avec mission de défendre les ponts de la Pleisse