LIVRE CINQUANTIEl\fE.
l'Elster et a la Pleisse, de l'autre au ravin de
Ri etschke, quoique étant assez forte par elle–
meme, présentait un inconvénient grave, c'était
d'avoir
a
dosce meme ravin de Rietschke, Jequel,
apres avoir longé le flanc de la position, passait
par derriere pour tomber dans la Pleisse
a
Goh–
lis. (Voir la carte nº 60.) Il était possible, si on
étai t repoussé, qu'on
y
füt
jeté en désordre.
Aussi
Jo
maréchal aurait-il voulu le traverser
pour venir se ranger derriere la Partha. Il n'en
eut pas le temps, et ce fut heureux, car s'il avait
commis la faute de s'abriter tout de suite der–
riere la Partba, nous aurions été trop resserrés
·dans Leipzig, et surtout privés de communica–
tion avec celles de nos troupes qui étaient encore
en marche. Quoi qu'il en soit, c'est dans cette
position assez dominante de Mockern que s'était
engagée la troisieme bataille livrée dans cette
journée funebre, et avec une passion digne de
celle qu'on avait déployée
a
Wachau.
Le combat avait commencé entre onze heures
et midi, des que Blucber était parvenu en ligne.
Préoccupé dela vue des dernieres troupes de Sou–
ham etdu pare d'artillerieremontantde Diiben sur
Leipzig, Blucher avait laissé tout le corps de Lan–
geron en observation devant Breitenfeld , et
n'avai t dirigé sur l\farmont que le corps d'York
et une partie de celui de Sacken, ce qui faisait
encor e trente et quelques millehommes. Il s'était
porté d'abord sur Mockern, pour enlever ce vil–
lage sur lequel s'appuyait la gauche de Marmont,
et l'avait attaqué avec l'acharnement qui signa–
lait cette funeste guerre. l\farmont l'avait dé–
fendu avec un acharnement égal. 11 avait dans
ce village le
2e
de marine de la division Lagra nge,
un peu en arriere la division Lagrange elle–
meme, au centre sur la pente du plateau la divi–
sion Compans,
a
droite et en arriere la division
Friederichs, enfin en réserve la cavalerie wur–
tembergeoise du général Normann, et la cavale–
rie frarn;aise de J,orge. Quatre-vingt-quatre bou–
ches
a
feu couvraientson front. Environ 20 mille
bommes composaient ce jour-la le nombre réel
de ses combattants.
Le village de Mockern avait été disputé long–
temps, et plusieurs fois le
2e
de marine, repoussé
des ruines fumantes de ce village,
y
était rentré
a
la bafonnette. En fin, accablé par le nombre,
il
avait été obligé d'en sortir. Alors le 4° de ma–
rine et le 35° léger, formant la seconde brigade
de la division Lagrange, avaient exécuté
a
la
bai:onnette une charge furieuse, culbuté l'une
des quatre division du corps d'York, et repris
Mockern. Blucher voyant qu'il ne gagnait rien
a
vouloir nous arracher cetappui de notre gauche,
avait porté deux divisions en avant pour aborder
i!
découvert le plateau incliné sur lequel s'éten–
dait la division Compans. Les deux divisions
prussiennes s'étaient bravement déployées de–
vant Marmont, mais foudroyécs par nos quaLre–
vingt-quatre bouches a feu, elles avaient fait des
pertes crueJles, et vu tomber un tiers de leurs
soldats. Une charge de cavalcrie pouvait tout dé–
cider, et Marmont l'avait aussitot ordonnée.
Malheureuscment la cavalerie wurtembergeoise,
mal disposée, apercevant devant elle et sur sa
droite les six mille chevaux de la réserve de Blu–
cher, avait chargé t_ard et faiblement, et s'était
meme, en revenant, renversée sur un bataillon
de marine qu'elle avait mis en désordre.
Le combat s'était ainsi soutenu pendant une
moitié de l'apres-midi, lorsque Blucher rassuré
sur les troupes qu'il avait aper<;ues dans le loin–
tain, sachant que le gros de l'armée fran<;aise
n'était pas sur son flanc gauchc, avait dirigé le
corps de Langeron vers Dombrowski, pour tenir
celui-ci en respect, amené
a
lui le corps de Sac–
ken tout entier, et attaqué la Iigne de Marmont
avec trois divisions prussiennes appuyées de
toutes les divisions russes de· Sacken. A cette
vue Marmont s'était avancé sur l'ennemi avec la
division Compans , que le brave Compans com–
mandait lui-rneme. Alors s'était engagée
a
cent
cinquante pas une lutte terrible, et l'une des
plus meurtrieres de cetle guerre. Marmont avait
re9u une blessure a la main, une contusion
a
l'épaule, plusieurs halles dans ses habits, et avait
perdu trois de ses aides de camp. Les régiments
de Compans avaient déployé une fermeté hé–
ro'ique, et leur formidable artillerie, décimant de
nouveau les rangs desPrussiens, avait couvert le
sol d'une ligne de cadavres. Un triomphe complet
aurait couronné cette résistance, si un obus tom–
bant au milieu de l'une de nos batteries, et en
faisant sauter les caissons, n'y avait mis le désor –
dre. L'ennemi, profitant de la circonstance, s'était
élancé sur cette batterie et l'avait prise, tandis
qu'au meme instant plusieurs milliers de chevaux
fondant sur la droite de la division Compans déja
écrasée par la mitraille, l'avaient forcée
a
plier.
La division Friedcrichs était accourue
a
son se –
cours, mais Mockern étant emporté daos ce mo–
ment, cet appui de notre gauche nous manquant,
la droite étant menacée par Langeron qui me–
na<;ait d'el).velopper Dombrowski, Marmont avait
jugé prudent de battre en retraite. Il 'était re-