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LIVRE QUARANTE-HUITIEME.
que la poli tique de cctte puissancc
a
l'égard de
la Saxe était singul icrement obscure , qu'il fallait
tacher d'cn découvrir le sccret' et chercher
a
savoir si la place de Torgnu, oú s'était retirée
l'infanterie saxonne , serait ou non fidcle
a
la
Fra nce, ce qu'il importnit fort de connaitre
d:ms un momcnt oú l'on se préparait
a
opérer
sur l'Elbe ; qu'il fallait encore faire expliqucr
l'Autriche sur ce qu'on nvai t
a
attendre du corps
auxiliairc, la forcer
a
dire s'il obéirait ou non,
et surtout lui bien persuadcr qu'elle devait re–
noncer au désarmement des troupes polonaises.
Napoléon, en un mol, recommnndait
a
M. de
Narbonne de percer tous les rnystcres qui l'en–
touraient, rnais sans éclat , en n¡énageant le
pcre de l'Jmpératrice' et en lui donnant'
a
iui
Napoléon, le tcmps de couper
b
Dresde, oú il
allait marchc,r, Je nooud gordien qu'on ne pou–
vait pas dénouer
a
Vienne. En mcmc temps il
écrivit
a
M. de Bassano qui était resté
a
Paris,
pour que celui-ci mont1·at au prince de Schwar–
zcnbcrg les nouvelles rc<¡ues, en lui dcmandant
compte de l'étrange contradiction qui se trou–
vait entre ses paroles et les faits survenus
a
Cracovie. Le prince !le Schwarzenbcrg avait <lit
en effet
a
Napoléon que ses ordres seraicnt
exécutés par Je comte de Frimont, et néanmoins
lout
a
cette heure annon<¡ait le contraire.
Du reste c'élaicnt la pour Napoleon des sujets
de peu d'inquiétude. Ces embarras, ces ruses ; il
se promeltait d'y mettre un lerme prochain, en
débouchant bientót en Saxc avec deux cent millc
hommes par toutes les issues de la Thuringe.
A peine arrivé
a
Mayence, il y avait cmployé son
temps avec celte aclivité, cette intelligcnce sans
égalcs, qui en faisaient Je premicr administrateur
du monde. Quoiqu'il fUt le plvs obéi des h om–
mes, et celui qui commandait le mieux, quoi–
qu'il n'eut pas perdu un iuslant, il y avait dans
les résultats accornplis de nombreux mécomptes.
Malgré J'or<.lre précis de n'expédicr des dép óts
que des détachements bien organisés , bien
vetus, bien armés, malgré la présence
a
Mayence
et le zele infatigable du vieux duc de Valmy, il
manquait encore
a
tous les corps beaucoup de
matériel et sm·tout beaucoup d'officicrs. i\fais
dix ou quinze jours de travail sur les lieux suffi–
saient
a
Napoléon pour tout réparer.
JI
commcn<;a par !'argent, dont on était en–
tieremcnt dépourvu. La trésorerie , en effet,
interprélant lrop
a
la rigucur l'ordre de centra–
liser les caisses
a
Magdebourg, pour les mcttre
a
l'abri des surpriscs de
)¡¡
guerre ' n'avait pns
laissé de caisse
a
i\faycncc. Quantité d'opérations
administrativcs étaient arretécs par cette seule
circonstance. i\'apoléon
fit
rcmédier
a
cette er–
reur.
JI
apportaitd'ailleurs sa caisse particuliere,
rcstée un sccret pour tous ses coopérateurs, et
il
en tira ce qu'il fallait pour les bcsoins impré–
vus, toujours si fréquents
a
Ja guerre. Des of–
ficicrs de la ligne ou de Ja garde, revenus de
Russic aprcs avo ir tout perdu, attendaient encore
lc1.1r indemnité. On
la
leur compta immédiate–
ment. Beaucoup <le détaehements arrivaient les
uns
a~ec
une simple veste, les autres avec leur
habillement entier, rnais avec un armement
inco111plet. Les objets manquants ou n'étaient
point encore confcctionnés , ou étaient en route
a
Ja su ite des corps. Les régiments provisoires
notamment, qu'on avait composés, comme nous
l'avons dit, avec des bataillons épars, étaient les
plus mal pourvus, fauted' une administration com–
mune. lis n'avaicnt ni drapeaux, ni musique, ni
souvent les objcts d'équipement les plus indis–
pensables. Les officiers manquaient daos ces
régiments, et surtout dans les
r~giments
de
cohortes, qui ét.aient commandés prcsque en
enticr par des ofliciers tirés de la réforme. Le
matériel de l'artillcrie en canons était arrivé,
mais le harnachemcnt et bcaucoup d'autres ob–
jets n'avaicnt pas suivi. Les chevaux de trait
étaient en nombre insuílisant. La cavalerie, ainsi
qu il était facile de le prévoir, était Ja plus en
arriere de toutes les armes . Indépendammcnt de
celle que le général Bourcier réorganisait en
I-fonovre avec des chcvaux pris en Allemagne, et
avec des hommes revenant de Russie , le duc de
Plnisance recueillait da ns .tous les dépóts <lu
Rhin ce qui était prct
a
servir, et devait Je con–
tluire en régimcnts provisoircs
a
Ja grande
aril1ée; et ici encore c'étaient les chcvaux qui
conslituaient la plus grosse difficullé.
Napoléon pourvut
a
tont avec son activilé et
son argent comptant. Des officicrs envoyés de
tous les cótés allaient accélércr Je transport de
ce qui était resté sur les routes, eo payant et en
requérant des charrois extraordinaires. Le pays
sur les bords du Rhin, et sur ceux du Mein,
étant r ichc en toutes choses, Napoléon
fit
ame–
ner
a
prix d'argent les ouvriers et les matieres,
et de plus chargea les régiments, en leur avan–
<¡ant des fonds , de se pourvoir eux-memcs de ce
dont ils avaient besoin, ce qu'ils firent avec em–
pressement et :meces. J_,es chevaux aboodant
dans la contrée, on courut en acheter jusqu'a
Stuttgardt, et on en trouva beaucoup soit de