LEIPZIG ET JIANAU. -
SEPTEAIBRE
·1815.
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occupaientces diverses posiLions. Un autrccorps,
sous le comte Pahlen , déboucbant par la route
de Furstenwald qu'avait suivie Kleist Jors des
événeinents de Kulm, était venu vers Borna, la
ou les montagnes moins abruptes commencent a
se cbanger en plaine. Une irnmense cavalerie lan–
cée daos cette direction avait fort inquiété celle
de Pajol, et saos la vigueur de ce dernier , sans
son savoir-faire, lui aurait causé de grands
dommages.
Saint-Cyr, se voyant ainsi pressé, avait replié
du camp de Pirna sur Pirna meme sa
4.2e
divi–
tion, laissant, comme de coutume, quelques ba–
taillons daos la forteresse de
Koonigste~ n
, avait
ramené la 45e et la 44° de Giesbübel sur Zehist,
et la 45e, qui soutenait Pajol, de Borna surDohna.
C'est dans cette position que Napoléon le
trouva, point déconcerté, beaucoup moins alarmé
surtout qu'il n'avait affecté de l'etre, et tout pr et
a
reprendre l'offensive. Que signifiait cette nou–
vclle apparition de l'ennemi? Était-ce une con–
tinuation de la tactique au moyen de laquelle on
semblaitvouloir épuiser l'arniée
fran~aise,
ou bien
une attaque véritable? 11 valait la peine de s'en–
tretenir de cette question obscure avec un offi–
cier aussi intelligent que le maréchal Saint-Cyr.
Napoléon le questionna sur ce sujet avec beau–
coup de confiance et de cordialité. Quoiqu'il eft t
peu de gout pour son caractere,
il
appréciait fort
ses lumieres, et d'ailleurs dans la situation pré–
sente
il
avait besoin de ménager tout le monde,
surtout les gens de guerre déja bien fatigu és.
Par toutes ces raisons
il
s'entretint longuement
avec le maréchal Saint-Cyr, et ne parut pas con–
vaincu que cette derniere attaque füt sérieuse, ni
qu'elJe
füt
autre chose qu'une des alternatives de
ce va-et-vient perpétuel qui semhlait constituer
en ce moment toute la tactique des coalisés. Au
surplus Napoléon ne demandait pas mieux, d'a–
pres ce qu'il dit, que de réparer au moycn d'une
action décisive tout le tort que lui avaien t causé
les journées de Kulm, de la Katzbach et de Gross–
Beeren, mais
il
doutait avec raison que les coali–
sés, apres la le<;on re<;ue
a
Drcsde,
songe~ssent
a
s'en attirer une seconde du
m~me
genre. Evidem–
ment ils ne voudraient point se présenter encore
une fois la tete
a
Dresde, la queue aux défilés de
l'Erzgebirge, et quant
a
lesallercherchcraudcla,
c'esf-a-dire en Boheme,c'était un jeu trop hasar–
deux, et qui consistait
a
prendre pour soi la mau–
vaiseposition dont ilsnevoulaientplus apres l'avoir
essayée. IJ était plus vraisemblableque s'ils recom–
men~aient
une entreprise sur nos derrieres, ce
serait plus en arriere encore, c'est-a-dire par la
grande route de Commotau sur Leipzig , et l'ap–
parition de quelques cour eurs dans cetle direc–
tion , si'gnalée depuis dcux ou trois jours, portait
déja Napoléon a le penser , ce q ui prouvait,
comme on le verr a bientót, sa profonde sagacité.
Du r este il répéta qu'il se réjouirait fort d'avoir
encore une fo is l'armée de Boheme sur les bras,
entre Dresde et Péterswalde, mais qu'il n'osait
s'en llatter, qu'il était venu pour cela , que ses
r éserves étaient en marche, qu'elles ser aient le
lendemain matin
a
Drcsdc, le lendemain soir
a
Mugeln , et qu'on agirait suivant les circon–
stances .
Le ma1·échal Saint-Cyr parut etre d'un autre
avis . Ucroyait, lui ,
a
une attaque déterminée du
prince de Schwarzenberg ,
a
en juger par la vi–
gueur avec laquelle les divisions du 14e corps
avaient été poussées depuis
d~ux
jours, et
il
était
étonné surlout de voir ce prince s'avancer si pres
de Drcsde, si c'était pour une simple démonstra–
tion . 11 soutenait, comme il l'avait dé
ja
fa it, que
c'était vers la Boheme que Na poléon devait
cher~
cber
a
gag ner une grande bataille, qu'elle serait
la
plus décisive
a
cause de la présence des sou–
ver ains, dont
il
importait d'ébranler le couragé ;
a
quoi Napoléon répondait avcc r aison qu'il la
trouverai t bonne partout, meilleure sans doute
contre les souverains réunis, mais qu'il ne
d é~
pendait pas de lui de l'avoir ou il la désirait , et
qu'il la livr er ait la ou la fortune voudrait bien la
lui offrir.
Le maréchal Saint-Cyr était encore for t préoc–
cupé d'une idée, celle-ci tres-juste quoiquc bien
peu vraisemblable, c'cst qu'cn ce moment les
Autrichiens s'étaient séparés des Prussiens et des
Russes , car on ne voyait devant soi que de ces
derniers, saos un seul détachement autricbien.
Dans cecas, au lieu de
140
ou HiO mille hom–
mcs , c'étaient tout au plus 80 ou 90 mille aux–
quels on aurait
a
faire, et l'occasion était belle
pour se jcter sur les coalisés et les accabler. 11
y
avait la cependa nt une contradiction singuliere,
car la séparation des coalisés excluai t l'idée d'unc
ten talive sérieuse sur Dresde, et Napoléon croyait
plutót que si les Autrichiens s'étaient éloignés,
c'était pour préparer une marche ultérieure sur
Lcipzig, en se portant vers les directions qui pou–
vaient y conduire. Ces raison ncments entre deux
militaircs si compétents , r évélant si bien au mi–
lieu de quelles obscurités un général en chef est
obligé de se dirigér , n'importaient nullement
quant a
Ja
conduite
a
tenir, puisqu'on était d'ac-
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