LEIPZIG ET' HANAU. -
AOUT
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dait, en effet, et méritajt l'entiere confiance de
Napoléon qui l'avait toujours aupres de lui , soit
pour les coups de vigueur, soit pour les missions
qui exigeaient du jugement, de l'exactitude, de
la
franchise. Ce soldat intrépide et spirituel, si
connu des hommes de notre génération, joi–
gnant
a
une taille de grenadier' a une figure de
dogue, la plus profonde finesse, se tirait de
toutes les missions que lui confiait Napoléon
sans le tromper et saos lui déplaire, s'arran–
geant pour dire la vérité saos compromettre ni
lui ni les autres. A son extreme adressc,
a
sa
rare bravoure,
il
réunissait le talent et le gout
de l'organisation des troupes , daos laquelle il
cxcellai·t. On ne pouvait pas mieux choisir pour
rendre au 1
er
corps !'esprit militaire qu'il avait
du perdre daos le désastre de Kulm. Napoléon
distribua ce corps en trois divisions de dix ba–
taillons chacune, lui restitua la moitié de la di–
vision Teste qu'on en avait momentanément dé–
tournée , lui óta la brigade de Reuss qu'on lui
avait aussi momentanément pretée, et, soit avec
les soldats rentrés , soit avec quelques batail–
lons de marche ·ventfs de l\iaycnce, luí procura
encore un effectif d'environ
18
mille hommes.
11 puisa daos les arsenaux de Drcsde, ou un im–
mense matériel avait été amené par ses soins,
de quoi remplacer les fu sils perdus et les soixante–
douze boucbes
a
feu abandonnées sur le champ
de bataille de Kulm. Il fournit des soulicrs, des
vetements a ceux qui en manquaicnt , et n'oublia
rien pour remettre le moral des bommes, soit
par des encouragemen ts, soit par des revues,
soit par ces petites satisfactions matérielles qui
composent le bonheur du soldat. Le comte de
Lobau fut chargé d'opérer cette résurrection en
quelques jours, Napoléon entendant se servir du
1
er
corps pour la défense de Dresde pendant sa
prochaine absence.
Quant
a
la conservation de Dresde, il y pour–
vut de la maniere suivante . Au lieu·d'y laisser le
14° corps seul, comme lorsqu'il avait marché sur
la Silésie ,
il
laissa le 14° ( maréchal Saint-Cyr)
au camp de Pirna, le
2e (
maréchal Víctor) a
Freyberg, etle1er enfin (comte de Lobau) dans
l'intérieur meme de Dresde, ou celui-ci aurait
plus de facilité pour se réorganiser. Le 14e corps,
qui, en recouvrant la 42e division, en avait des
Jorsquatre, dut garder Koonigstein et Lilienstein,
le pont de I'Elbe jeté entre ces deux forts, le
camp de Pirna, le défilé de Péterswalde et les
débouchés secondaires de la Boheme qui ve–
naient tomber sur la droite de
1a
chaussée de
Péterswalde. Le maréchal Victor,
a
Freyberg
1
veillait
a
la fois sur la grande chaussée de Frey–
berg, et sur le chemin de Tooplitz par Altenberg.
La cavalerie de Pajol galopait entre deux pour
exercer une active surveillance. En cas de nou–
velle apparition de l'armée de Boheme, ces deux
corps avaient ordre d'opposer une résistance
modérée, suffisante seulement pour retarder ,
saos se compromettre, Ja marche de l'ennemi, et
de se replier sur Dresde en y donnant l'éveil.
Ils devaient venir se placer, Saint-Cyr sur la
gauche du camp retranché, ou
il
avait déja com–
battu vaillamment le 26 aout, Víctor sur la
droite, ou il avait décidé le gain de la batailJe
du 27. Attaqués sérieusement, ils avaient ordre
de rentrer derriere les redoutes, qui avaient été
porlées de cinq
a
huit et beaucoup mieux
31'–
mées. Napoléon , pendant l'attaque de Dresde,
ayant remarqué plusieurs défectuosités daos
leur établissement, avait nommé un comman–
dan t spécial pour chacune d'elles, augmenté
leur arlillcrie , préparé des artilleurs de re–
cbange pour les servir, défendu de laisser daris
aucune des caissons de munitions, et fai t con–
slruire, avec des sacs
a
terre, des especes de ré–
duits pour tenir lieu de magasins a pou dre pen–
dant le combat. Il avait distríbué leur armement
en artillcrie de position nécessairement immo–
bilc, et en artillerie attelée qu'on porterait de la ·
rive droite
a
la rive gauche de l'Elbe, selon
qu'on serait attaqué par l'une ou par l'autre. Il
avait soigneusement recommandé qu'on tint des
troupes en réserve derriere chaque redoute,
pour reprendre
a
l'instant celle qui serait enle–
vée, et enfin, il avait décidé que le 1
er
corps ,
sous le comte de Lobau, serait placé tout entier
en réserve derricre les corps de Saint-Cyr et de
Víctor, pour déboucher au dernicr moment,
ainsi qu'avait fait la garde, le 26 aoút, sur I'en–
nemi qui se croirait victorieux . C'était, comme
on le voit, une répétition fort améliorée de la
journée du 26, et qui promettait le meme suc–
ces, car les trois corps de Saint-Cyr, Victor et
Lobau réunissaient pres de 60 mille hommes,
c'est-a-dire plus que Napoléon n'en avait eu
pour résister le 26 aux
~00
mille de l'armée de
Boheme. Ajoutant cette circonstance, qu'au lieu
d'etre a quatrc ou cinq journées, comme
il
était
Jors de la premiere apparition de l'ennemi, ·i'l ne
serait plus qu'a dcux en se
pla~ant
a Hoyers–
werda, Ñapoléon s'éloignait sans inquiétude
pour la conservation de Dresde, si l'armée de
Boheme renouvelait sa récente manoouvre, en
..