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LIVRE QUARANTE-NEUVJEl\fE.
dans Ja journée le comte Ostermann pour sc–
courir le prinee Eugene de 'Vurtemberg, mais
on ne connaissait pas au juste la force du corps
de Vandamme, on ne savait pas s'il avait vingt,
trente ou quarante mille hommes, et
i
dans
l'intervalle il n'aurait pas réussi
n
descendre du
camp de Pirna pour fermer les défilés de la roule
de Péterswalde. Rcnooeer
a y
passer avait le
double inconvénient d'y Jaisser sans appui Je
prinee de " rurtcmberg et le eomte Ostermann,
et de se rc1)0rter en masse sur les chemins se–
condaires, qui étaient mal frnyés , et oú les
Russes allaieot former avcc Jcs Prussiens et les
Autrichiens un faclieux encombrcment. On dé–
cida done que le gros des Russes sous Barcfoy de
Tolly marcheraiL
a
la suite du comte Osterma nn
par la route de Péterswalde, et
la
rouvrirait de
vive force si elle était fermée; que les Prussiens
et une partie des Aut.cichiens prendraientlaroute
a
coté, celle d'Altenberg , Zinnwald, Trep1itz, par
laquelle était venue la seconde colonne des eoa–
lisés; qu'cnfin le reste de l'armée autrichieone
irait par Ja ehausséc de Freyberg gagner le grand
chemin de Lcipzig
a
Pragu e par Commotau. On
allait done rentrer en Boheme sur trois colonncs,
au lieu de quatre qu'on formait en arrivant.
JI
fut convenu qu'apres s'etre reposé toute la nuit
on partirait le Jenderuain 28 de tres-grand matin,
afio d'aboutir aux défilés des montagncs nvant
d'elre serré de trop p1·es par l'ennemi.
Ces dispositions furent cxécutées au moins
daos les premieres heures comme elles avaient
été arretécs. Le len<lcmain matin on se mit en
routc sur trois colonnes dans les directions
in–
diquées, tandis que les corps fran<;ais, s'ébran–
lant de lcur cóté, marchaient sur les traces de
ces memes colonncs, mais
a
une assez grande
distance,
a
cause du triste état des chemins. A
chaque pas on laissait des blessés, des trainards,
des voitures, destinés
a
devenir la proie des Fran–
c;ais. La tristesse était dans tous les crenrs. Le
roi de Prusse voyaít dans les événements de ces
derniers jours la suite de sa rnauvaise forlu ne
ordinaire; Alex:mdre se demandail si Je com-
- mencement de bonhcur sur lequel il avaitcompté
n'était pas une triste illusion , et si on n'avait pas
trop espéré en se ílattant de vaincrc Napoléon.
On s'avanc;ait ainsi, tres-inquict des reneontrcs
auxquelles on était exposé avant d'avoir franchi
ce ridcau de hautes montagnes qu'on avait de–
vant soi , tnndis qu'on avait. sur ses derrieres
un ennemi victoricu x, et personne, ni chez les
poursuivis, ni chez les poursuivants, ne se dou-
tant de ce qui allait survenir sous quarante-huit
heures
!
Chcm in faisant, Barclay de Tolly apcrcevant
beaucoup d'cncombrement sur la route de Pé–
tcrswaldc, et sentaot qu'il serait bicntót serré de
pres, commern;a de craindre, s'il trouvait des
diffieultés du cóté de Péterswalclc, d·y perclre un
temps précieux, et Je ne pouvoir plus se rabattre
asscz tot sur la route d'Altenberg; il imagina
done de changer tout
a
coup de direction avec le
gros de l'armée russe ' et de prendi·e
a
droile'
pour regagncr cette meme route d'Allenbcrg
que devaient parcourir les Prussiens et une par–
tie de l'armée autrichienne , au risque d'y pro–
duire un affreux engorgemcnt.
11
fit dire au
comte Ostcrmann de se replicr sur luí, et de
laisser le prince Eugene retourner seul par la
route de Péterswalde en Boheme.
Ces ordres amencrent entre le comtc Ostcr–
mann
et
Je prince Eugenc de Wurtembcrg un
conflit des plus vifs. Le prince Eugcne, qui était
aux prises avec le général Vandamme pour la
possession de la route de Péterswaldc, ne voulait
pas avcc raison y restcr scul, cxposé
a
trouver
Vandammc tanlót sur son :Oanc, tnntót. sur ses
dcrr\crcs, peut-ctrc meme dcvant lui, car les
Franc;ais descendus du plateau de Pirna se mon–
traient partout. 11 disait de plus que si on lais–
sait au corps de Vaodammc, qu'ou avait Iieu de
croire tres-fort, la libre entréc de la Boheme, ce
corps irait probablcment se placer
a
Treplitz, au
débouché des chemins que suivaicnt les diverses
colonnes en retrnite, et pourrait lcur causer de
graves embarras. Le comte Ostcrmann, de son _
cót.é, craignait de compromettrc les troupes de
la garde qu'on lui avait confiées, et résistait par
ce motif aux pressantes instances du prince
Eugcnc de Wurtemberg. Vaincu par les bonnes
raisons du prince, par ·son oíirc de prcndre pour
Jui-meme la plus forte part du péril, il se décida
enfin
a
suivrc la route de Péterswalde, et
a
la
forcer, s'il le fallait, pour devancer Vandamme
au débouché de TCX'plitz. En meme temps
il
fit
avertir Barclay de Tolly de Ja résolution qu'il
adoptait, ne s'en dissimulant pas les inconvé–
nients, mais croyant épargner ainsi de grands
dangers au reste de l'armée coalisée.
En conséquence le
28_
au matin, le prince Eu–
gene et le comte Ostermann essayerent de che–
mincr sur le plateau de Gieshübel, situé au–
dcssous de celui de Pirna, et séparé sculcment
de ce dcrnier par Je ruisseau de Gotleube. 11
fallai
t
franchir di vers passagcs trerS-difficilcs
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