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LIVRE QUARANTE-NEUVJE1\1E.
ctre une bonne maniere d'opérer, mais que ce
n'était pas le cas ici, car, une fois
a
Leipzig, on
scrait cxposé a etre coupé de Ja Boheme, on au–
rait Nflpoléon dcrriere soi
a
la tete de trois cent
mille bommes toujom;s victorieux jusqu'alors, et
si daos cctte position on perdait une bataille, on
n'en reviendrait pas, les montagnes de la Boheme
étant occupées par lui, et l'Elbe étant jusqu'a
Hambourg dans ses terribles mains. Le général
Mo reau, consulté, avait lrouvé cet avis parfaite–
ment juste, et on avait rcnoncé
a
se diriger sur
Leipzig. On avait résolu, au lieu d'appuyer a
gauche, d'appuycr
a
droite, et de se rapprocher
des bords de l'Elbe. Les deux premieres colonnes,
celle qui avait passé par Pétcrswalde , et celle
qui avait passé par Zinnwald et Altcnberg,
avaient cheminé tout pres de Dresde; mais il
avait fallu ramener la troisieme par Marienberg
et Sayda sur DippOldiswaldc,
la
quatrieme par
Zwickau et Chcmnitn sur Tharandt. (Voir
la
carte nº ?:>8.) On s'était ainsi reporté sur Dresde
sans savoir précisément ce qu'on y feraü ; mais
on avait l'avantage, en restant adossé aux mon–
tagnes de Bobeme, de conserver toujours ses
communications, d'etre comme une épée de Da–
mocles suspendue sur la tete de Napoléon, et de
pouvoir au besoin, si l'occasion était favorable,
se jcter sur Dresde pour enlcver cette ville, ce
qui était le plus grand dommage qu'on put cau–
ser aux Fran9ais. Tandis qu'on exécutait ce mou–
vement transversal de gauche
a
droite, en sui–
vant le picd de
l'Erzgeb~·rge,
on avait appris
l'apparition deNapoléon en Boheme, circonstance
qui avait fait craindre de sa part une marche sur
P1'ague, et rendu plus évidente la convenance de
rebrousser chcmin vers l'Elbe. Puis
a
Dippoldis–
walde meme on avait connu la marche de Napo–
léon sur le Bober, et la situation périllcuse de
Blucher. C'étaitle cas de tentei· quelque chose, et
de profiter de l'absence de Napoléon pour frapp er
un grand coup, pour enlever Drcsde par cxem–
ple, ce queconseillaient les esprits hardis, ce que
craignaient les esprits ti mides, ce que les esprits
sagcs commc Moreau faisaient dépendre de 'état
dan~
lequel on trouverait les défenses de cette
villc.
C'est ainsi que la grande armée
des
coalisés
était arrivée
a
déploycr ses masses imposantes
auto ur de la belle capitale de la Saxe. La co–
lonne qu'on avait aper9ue la prcmiere était la
colonne russe de Wittsenstein, qui, dcscendant
le plus pres de l'Elbe par la route de Péterswalde,
avait rencontré le maréchal Saint-Cyr devant le
camp de Pirna. Ce qu'on appeUe le camp de
Pirna consiste dans un plateau tres-élevé, adossé
a
l'EJbe, taillé
a
pie presque de tous les cÓtés,
appuyé
a
gauche au fort de Koonigstein,
a
<lroite au chateau de Sonnenstein et
a
la ville de
Pirna. La grande route de Boheme par Péters–
walde, apres avoir franchi les montagnes, s'en–
fonce vers Hollendorf dans des terrains creux,
puis remonte a Berg•Gieshübel snr un autré pla–
tean situé au-dessous de celui de Pirna, passe
presque sous son feu, mais
a
une distance qui
rend Je passage possible, de maniere que la posi–
tion de Pirna, quoique invincible en elle-meme,
n~onne
cependant pas le moycn de barrer ab–
solument la route de Péterswalde. Seulem<mt
une armée établie dans cette position, outre
qu'elle a dans le camp de Pirna un asile assuré,
y trouve aussi un poste d'ou elle peut gener, ar–
reter meme, en opérant bien, l'ennemi qui veut
suivre la route de Péterswalde, soit pour descen–
dre en Saxe, soit pour remonter en Boheme.
Le maréchal Saint-Cyr, apres avoir occupé
par sa premiere division les forts de Krenigstein
et de Lilienstein, entre lesquels étaitjcté un pont
sur l'Elbe, avait placé la seconde sur la route de
Péterswalde, de maniere
a
ralen tir la marche de
l'ennemi , et
a
pouvoir se replier sur Dresde
comme
il
en avait l'ord1·e.
Celle~ci
avait défendu
pied
a
pied le plateau de Berg-Gieshübel, avec
un aplomb remarquable chcz des soldats
a
peine
formés. Peodant ce temps la troisieme des divi–
sions du maréchal Saint-Cyr observait le second
débouché, celui qui de Tooplitz vient abouti'r sur
Zinnwald, Altenberg, Dippoldiswalde, et la qua–
trieme enfin placée a la droite de Dippoldis–
walde, et veillant sur la grande route de Frey–
berg, servait de souLien au général Pajo!, qui
faisait le coup de sabre avcc les avant-gardes de
la cavalerie autrichienne arrivant par les débou–
chés les plus éloignés.
Le
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aout, le maréchal Saint-Cyr ayantconfié,
comme nous venoos de le dire,
a
sa premiere
division
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de l'armée) la garde des deux forts
de Komigstein et de Lilienstein, et tous les postes
des bords de l'Elbe afin d'empecher l'ennemi de
passer d'une rive
a
l'autre, s'était replié en ordre
sur Dresde, ou
il
avait ainsi, outre la garnison,
trois divisions d'infanterie avec tes cavaleries
Lhéritier et Pajol. Ces forces, appuyées sur des
o~vrages
de campagne et sur les défenses de Ja
ville, étaient capables d'opposer une résistance
sérieuse
a
l'ennemi, quoiqu'il comptat des les
premiers jours
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milie hommes, et 200 mille